Les derniers cas d’immolation par le feu, la hausse des féminicides et les dérapages inquiétants de plusieurs apprentis du savoir interpellent et intriguent.
Loin d’être des cas isolés, ces faits de société devraient être analysés comme il se doit par ceux qui nous gouvernent. Si bien que « c’est dans le paroxysme de la violence, les sociétés se révèlent à elles-mêmes », comme on dit.
L’analyse est donc l’arme la plus efficace dont peut disposer un décideur dans toute société pour élucider, tracer et suivre son chemin dans un contexte politique, économique et social extrêmement difficile.
En perpétuelle hausse, ces dernières années, le taux général de la criminalité poursuit sa montée en flèche en Tunisie. En 2018, ce taux a connu une hausse de 13%, par rapport à l’année 2017. En s’appuyant sur les récentes statistiques établies par les autorités sécuritaires dans la lutte contre le crime, les unités sécuritaires disent « avoir réussi à résoudre 81% des affaires criminelles, à l’instar de la violence, d’homicide volontaire, vol, trafic de drogue, contrebande et émigration clandestine».
Toujours est-il qu’au-delà des faits réels et concrets, il y a l’interprétation et l’analyse dont il faut s’armer pour sauver la Cité. Face à l’ensauvagement croissant d’une société déchue, il faut avoir l’honnêteté de saisir ce qu’il pourrait traduire de violent, de rugueux, d’obscur et d’obstruant. Il faut également avoir le courage de le dire à des décideurs plus soucieux d’approbation sans réserve que de mise en évidence critique de la réalité.
Nous butons devant des murs. Nous sommes enfermés dans une cruelle impasse. Et l’odeur de la mort n’est que l’image tragique d’une société qui peine à déjouer les pièges que l’histoire lui tend. Réalise-t-on, aujourd’hui, que le Tunisien est largement soumis à un environnement qui l’infléchit plus qu’il ne l’enrichit, qui le bloque plus qu’il ne favorise l’épanouissement de ses capacités mentales ?
Une chose est sûre : nos gouvernants et politiciens veulent aborder des thèmes aussi graves et complexes comme ceux de la santé, de l’économie, de la sécurité et de l’éducation avec le mélo de la téléréalité et non avec la rigueur des économistes et la pertinence des sociologues. Ils cherchent, par-delà, à tisser les nœuds avec des médias prêts à rapporter, sans un abattement de cil ni le moindre commentaire, des propos creux. Or, c’est là qu’affleurent le plus clairement leurs fêlures.
«L’homme est une forêt de symboles», a-t-on dit un jour. Et il incombe aux timoniers de la barque de décoder les messages que recèlent ces symboles avant qu’il ne soit tard.
«Des mots sur les maux », cette nouvelle rubrique remplace « AU FIL DE L’ACTU » sans pour autant arrêter de braquer les projecteurs sur ce qui secoue notre société. Car la critique constructive est un levier du progrès.