Accueil A la une Foires et salons d’artisanat : Une hirondelle ne fait pas le printemps

Foires et salons d’artisanat : Une hirondelle ne fait pas le printemps

Qu’est-ce qui manque à notre artisanat, afin qu’il puisse voler de ses propres ailes ? Bien des choses dont une vraie stratégie de promotion et un marketing de marché, bien évidemment.

Jamais l’évolution de tel ou tel secteur en difficulté ne se limite uniquement à l’effet promotionnel. En partie, oui. Mais cela ne lui suffit pas toujours pour se faire valoir et forger, de la sorte, sa propre identité. L’artisanat en est un exemple édifiant. Il y va de son histoire séculaire, mais aussi de son patrimoine matériel et immatériel jusque-là omniprésent. Cela nous commande de l’accompagner pour épouser son temps.

L’évènementiel ne dit pas tout… !

En l’état, certes, l’évènementiel ne dit pas, forcément, tout. A moins qu’il soit couplé à tout un plan d’action et de réflexion sur le devenir d’un métier ancestral qui a du mal à se frayer un chemin vers la gloire. D’autant plus qu’il n’a pas su gagner en compétitivité et fidélisation des clients, ce qui lui permettrait d’augmenter sa part du marché local et se tourner vers l’exportation. Pourtant, nos produits et nos marques faits maison, avec doigté et perfection jusque dans les moindres détails, ont eu la chance d’être notoirement reconnus. Imbus d’idées et de projets, artisanes et artisans font ainsi de leur mieux pour s’exposer ici et ailleurs. Tant il est vrai que notre fameuse chéchia, tapis kairouanais, poterie de Sejnane et bien d’autres, véritable pièce maîtresse du secteur, se posent en porte-drapeaux à une grande échelle.

Qu’est-ce qui manque donc à notre artisanat, afin qu’il puisse voler de ses propres ailes ? Bien des choses dont une vraie stratégie de promotion et un marketing de marché, bien évidemment. L’année dernière, et comme tous les ans ou presque, la tournée des manifestations artisanales avait crevé les yeux. Des médias en étaient, alors, témoins. Du Nord au Sud, foires et salons ont dû rendre au secteur son blason. Et des exposants issus de tous les horizons, ainsi que des visiteurs, aussi nostalgiques pour tout savoir-faire manuel, n’ont pas manqué à pareils rendez-vous. D’un large éventail de choix jaillit un profil professionnel typiquement tunisien et incarne le legs d’un passé revisité. Aujourd’hui, on s’adonne à un vieux métier quasiment révolutionné.

Mieux comprendre les enjeux du présent

En fait, dans la foulée de ce grand marché d’artisanat, qui n’obéit guère à l’offre et à la demande, l’on s’aperçoit visiblement que le secteur aurait dû être mieux géré et valorisé. Cela dit, l’on doit, au fur et à mesure, réviser nos comptes et capitaliser sur nos acquis et expériences. Encore faut-il apprendre de notre passé pour mieux comprendre les enjeux du présent. De quoi sera fait demain ! Ne vaut-il pas mieux désamorcer la crise dans laquelle s’enlise le secteur, il y a si bien longtemps ? Et c’est encore mieux qu’un faux pas en avant ! L’on devrait, alors, tirer la leçon des moult manifestations tenues partout.

Dimanche dernier, le rideau est tombé sur la foire de l’artisanat et de l’habit traditionnel, organisée dans sa 16e édition, à Nabeul. Une région qualifiée de capitale de l’artisanat dans tous ses états. Du 6 au 20 de ce mois, la ville vibrait, ainsi, des estivants, devenus, par la même occasion, des clients adeptes des produits et modèles qui font sentir le parfum du bon vieux temps. Un petit rappel de l’histoire de nos aïeux ayant déjà transmis le flambeau à une nouvelle génération d’artisans.

Sur les lieux, une soixantaine d’exposants venus de 13 gouvernorats, soit une mosaïque d’objets d’art, d’effets vestimentaires et des articles à la mode tissés avec un style haut en couleur. Poterie de Nabeul, la plus connue en Tunisie, bois d’oliviers, tissage, joaillerie, broderie, haute couture, fibres végétales, il y a eu de quoi se réjouir. Sans pour autant perdre de vue les délices gourmandes de nos pâtisseries traditionnelles importées de Zaghouan, dont des femmes artisanes ont fait partie des participants. Et ce n’est pas tout.

Assurer la relève

Le Cap Bon n’a pas fini, semble-t-il, de renouer avec ses traditions artisanales, comptant sur l’évènementiel pour faire sa promotion.

Cette région côtière s’enorgueillit également de son potentiel particulier et des us et coutumes qui ajoutent au secteur. De quoi être fier son commissaire régional à l’artisanat, Afif Jerad, se disant être constamment aux côtés des artisans de sa région. Lui qui se targue d’avoir le flair d’un maître d’œuvre méticuleux, fin connaisseur du secteur. Et c’est lui qui a déjà dessiné les contours de la vaste carte artisanale et sa géographie étendue aux quatre coins de la Tunisie. «L’artisanat, c’est notre cause…», nous révèle-t-il, confiant en lui-même.

En ces temps de crise, où l’artisan tunisien cherche désespérément la matière première et les moyens nécessaires à l’écoulement de ses produits, la solution ne réside pas seulement dans les évènements et les multiples affiches de promotion. Elle ne l’est pas, non plus, dans le calendrier commémoratif des rendez-vous, si festifs et figés. Et encore loin de la réalité ! Toutefois, la communication demeure toujours la pierre angulaire de tout projet de promotion et de modernisation. Sauf que l’on doit l’inscrire dans la durée, en s’attaquant, a priori, à la racine du problème : l’approvisionnement en matière première, la formation, la commercialisation et l’écoulement du produit artisanal, mais aussi l’accessibilité à de nouveaux marchés prometteurs.

Ainsi, la nouvelle génération d’investisseurs en la matière aura du souffle pour continuer et résister face aux aléas de l’informel et de la contrefaçon. L’idéal, c’est de défricher le terrain, dans le but d’assurer la relève. Ceci étant, à la seule condition de surmonter les difficultés et relever tous les défis du secteur. Ici, l’ONA, l’Office national de l’artisanat, semble décidé à faire de la promotion artisanale son cheval de bataille. Mais une hirondelle ne fait pas le printemps !

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