«La réussite de ce gigantesque réseau commercial réside dans l’identité méditerranéenne. Et qui serait, alors, mieux méditerranéen que les Tunisiens ?»
La route de la soie, ce mégaprojet, lancé en 2013 par la deuxième économie mondiale, fait son chemin à travers le monde, malgré les multiples réticences émises par divers pays. Son objectif est de connecter la Chine au reste de l’Asie, l’Europe, l’Afrique et l’Amérique du Sud par voies terrestres, ferroviaires et maritimes. Pour les pays du Nord de la Méditerranée, seule l’Italie a adhéré au programme d’aide chinois des «nouvelles routes de soie».
Pour la Tunisie, les opportunités sont, effectivement, grandes. Comment ? La réponse à cette question a été étalée par le médecin et ancien diplomate, Dr Mohamed Sahbi Basly, lors d’un débat sur l’intégration économique de la Tunisie en Afrique, où il s’agissait également de débattre des relations sino-africaines.
Relations sino-africaines approfondies
Quand les relations économiques entre la Tunisie et la Chine ont-elles commencé à s’approfondir réellement ? Quel potentiel économique induit par une telle intégration ? Et quel rôle pourrait jouer la Tunisie dans cette gigantesque entreprise que la Chine a entamée ?
L’ancien diplomate précise que l’année 2006 est une date clé pour le partenariat entre les Chinois et les Africains. Elle correspond à la tenue du 1er sommet sino-africain. «Ce n’est qu’en 2005 que j’ai découvert que les Chinois s’intéressent aux Africains. Un an plus tard, le 1er sommet d’envergure entre ces deux entités a eu lieu. A vrai dire, le sommet a été organisé à la demande des Africains. Ils voulaient en finir avec l’intermédiation européenne, notamment française mais aussi israélienne au niveau de la gestion de leurs économies et richesses respectives», a souligné Dr Basly.
Il a ajouté qu’à cette période-là, les Chinois «se sont cassé les dents», en s’aventurant à une ouverture d’ordres commercial, culturel et communicatif sur l’Afrique. Et de souligner que des sommes faramineuses ont été dépensées, sans une préalable et profonde connaissance de l’environnement des affaires en Afrique. Et c’est ainsi que l’idée de la route de la soie naquit. «Où en sont, maintenant, les pays arabes qui ont étroitement coopéré avec la Chine, comme le Yémen, la Syrie, la Libye et la Jordanie qui n’a pas connu le même sort qu’eux ?», s’est-il interrogé.
Le monde en 3 blocs
Mais pour identifier la place qu’occupe la Tunisie dans ce gigantesque circuit commercial qui traverse le monde antique, il faut tout d’abord comprendre la répartition du monde actuel. Dans ce contexte, Dr Basly devait préciser que le monde est composé de trois principaux blocs, en l’occurrence le bloc de l’Amérique avec ses deux continents Nord et Sud et son économie intégrée, le bloc de l’Est qui est l’Asie où la Chine détient un leadership absolu et un troisième bloc appelé la verticale.
En raison d’une composition hétérogène due à une dissonance entre ses trois composantes (l’Europe, la Méditerranée et l’Afrique), ce bloc n’a pas de leadership effectif. La verticale peine à s’aligner convenablement. La faible croissance économique de l’Europe, les problèmes identitaires et religieux qui foisonnent dans la Méditerranée et l’histoire africaine ponctuée d’ères coloniales et de conflits avec l’Europe sont à l’origine de cette hétérogénéité qui caractérise la verticale, explique Dr Basly. «Comment la Chine peut-elle accéder à un tel bloc dissonant et réussir son projet si coûteux auquel les Américains s’intéressent aussi. La clé de voûte réside bien dans l’identité méditerranéenne. Et qui serait, alors, mieux méditerranéen que les Tunisiens ?», s’est interrogé Dr Basly. «La Tunisie ne peut défendre que son positionnement méditerranéen», conclut-il.