La politique des visas est à revoir.
Lundi 17 août, le ministre des Affaires étrangères italien, Luigi Di Maio, et Madame Luciana Lamorgese, ministre de l’Intérieur, avec une délégation de l’Union européenne, ont effectué une visite officielle en Tunisie pour rencontrer le Président de la République Kaïs Saïed et leurs homologues tunisiens. La rencontre a abordé essentiellement la politique de voisinage et les rapports qui risqueraient de s’envenimer à cause de l’émigration irrégulière à partir des côtes tunisiennes vers les côtes italiennes.
Cette réunion, malheureusement n’apporte rien de nouveau aux précédentes et nombreuses rencontres sur l’émigration illégale qui ont lieu depuis des lustres entre les gouvernants italiens et Tunisiens.
Ces derniers jours ,la presse italienne a même parlé «d’invasion» des côtes italiennes de la part des migrants tunisiens qui, désespérés, quitteraient le navire Tunisie à cause de «la crise économique et de l’instabilité politique».
Il suffit tout simplement de jeter un coup d’œil aux statistiques fournies par l’Italie pour se rendre tout de suite compte que pendant l’année 2011-2012, le nombre d’arrivées a été supérieur aux 5.000 clandestins qui ont débarqué de janvier à juillet 2020 sur les côtes siciliennes.
De quelle invasion parlerait-on ? Peut-on parler « d’invasion » quand 5.000 personnes émigrent sur une population de 12 millions d’habitants?
Ce qui est consternant dans cette énième rencontre, c’est le fait de ne pas vouloir aborder le vrai sujet et de se limiter tout simplement à analyser la partie visible de l’iceberg, comme si la solution si attendue pouvait nous parvenir d’une donation ou bien d’un prêt. Je me demande même si les gouvernants, avant de se réunir, ont recours aux spécialistes des mouvements migratoires ou bien ils nous racontent des salades concoctées le soir d’avant en compagnie d’une coupe de champagne.
Nous savons tous pertinemment que ce genre de rencontres ne résolvent pas les problèmes liés aux flux migratoires.
Cette rencontre n’a même pas osé aborder la discussion sur l’octroi des visas, responsable de ces départs vers la rive nord de la Méditerranée.
Mais comment peut-on parler d’émigration sans traiter un sujet si important comme celui des visas et de la liberté de mouvement?
Comment peut-on parler d’émigration sans considérer la Tunisie comme un vrai partenaire d’égal à égal, mais plutôt un garde-côtes, allant ainsi contre les accords bilatéraux qui soulignent la réciprocité entre les États signataires?
Comment peut-on parler d’émigration sans faire référence à la culture, aux bourses d’études, aux échanges universitaires?
Comment peut-on faire abstraction de tous ces sujets fondamentaux lors d’une rencontre bilatérale sur l’émigration?
Ce lundi 17 août, le premier sujet que l’Italie aurait dû mettre sur la table lors de cette rencontre avec les autorités tunisiennes, c’est la révision de la triste et honteuse politique des visas, unique et seule responsable des morts en mer et des départs clandestins.
Si l’Italie et toute l’UE voulaient efficacement trouver des solutions à ce phénomène, elles auraient dû tout d’abord se pencher sur l’octroi des visas. Celle-ci est la condition sine qua non pour éviter les départs incontrôlés et sauvages vers les côtes italiennes et pour permettre aux gens honnêtes de pouvoir partir et de pouvoir revenir comme bon leur semble, car tous les citoyens ont le droit de se déplacer sans restriction aucune dans n’importe quel pays du monde, tout en respectant la législation du pays d’arrivée.
Du côté italien, la révision, voire l‘abolition des visas pour les citoyens tunisiens, permettrait aux autorités de mieux contrôler les flux migratoires illégaux et la fermeture des centres dits d’accueil, dispersés sur tout le territoire italien.
La réforme de la politique des visas permettrait donc à l’UE et à l’Italie de pouvoir mieux faire une sélection entre légaux et illégaux, de simplifier les échanges économiques et culturels entre la Tunisie et l’Italie et de diminuer considérablement le nombre de morts en mer.
Depuis la création du monde, personne n’a pu arrêter les mouvements migratoires, ni la construction de murs, ni les océans.
J’espère que les gouvernants en prendront conscience.