Accueil Actualités Gouvernance locale : A la recherche d’une vision claire et salvatrice

Gouvernance locale : A la recherche d’une vision claire et salvatrice

La Haute instance des finances locales (Hifl) a organisé, hier à Tunis, une conférence de presse au cours de laquelle il a été procédé à la présentation de son premier rapport annuel 2017-2019. Le point de presse a été l’occasion pour éclairer l’assistance sur les défaillances entravant, jusque-là, l’optimisation de la gouvernance locale et la lutte contre les disparités régionales en la matière. A la lumière du présent rapport, les membres du conseil de ladite instance se sont mis d’accord sur une série de mesures, législatives et fiscales, à même de résoudre les problématiques récalcitrantes.

La Hifl est une institution établie selon l’article 61 de la loi organique n° 29-2018, relative au Code des collectivités locales. Elle joue un rôle crucial dans l’assistance, l’accompagnement et la supervision des collectivités locales en matière de gestion des ressources, de l’amélioration des prestations ainsi que dans la contribution au développement des localités. Chaque année, la Hifl est appelée à publier un rapport sur l’avancement des objectifs et des projets planifiés par les collectivités locales, mais aussi sur les difficultés auxquelles elles sont confrontées. Une étude analytique est prévue tous les trois ans pour évaluer le domaine des collectivités locales, son autonomie financière et son rendement.

Présentant le rapport, Mme Amel Elloumi Baoueb, présidente de la Hifl, a rappelé les prérogatives de l’Instance dont la garantie des transferts financiers de l’Etat vers les collectivités locales en prenant soin de réduire les disparités régionales conformément au principe de la décentralisation et de l’équité des chances.

Le présent rapport s’appuie sur le travail méthodique du Conseil de la Hifl en prenant pour données basiques des sources officielles ainsi que des indicateurs fournis aussi bien par les municipalités que par les conseils régionaux.

70% des dépenses sont consacrées aux charges !

Mme Elloumi Baoueb a indiqué que la santé budgétaire des collectivités locales s’appuie essentiellement sur les transferts de l’Etat à raison de 61,2% contre seulement 38,8% de financement propre, ce qui montre la frêle autonomie financière et la dépendance évidente des collectivités locales de l’Etat, et ce, en dépit d’une légère amélioration vu que l’autonomie financière des collectivités locales n’était, en 2017, que de 34,2%. « Les ressources globales des collectivités locales sont de l’ordre de 3.145,6 MD en 2019, réparties entre communes (2016,7 MD ) et conseils régionaux (1128,9 MD) ». Les charges accaparent, dans 127 municipalités, 70% des dépenses, ce qui représente un excédent alarmant. La charge salariale, quant à elle, correspond à 47% des dépenses des collectivités locales. Or, le budget desdites collectivités devrait être réparti, équitablement, entre deux volets : les charges, d’une part, et l’investissement pour le développement du territoire en question, d’autre part ; une logique qui semble difficile à appliquer et qui réduit, sensiblement, l’efficacité du travail municipal et des conseils régionaux.

Pas d’investissement : pas de développement !

Néanmoins, un excédent de 744 MD a été enregistré en 2019, ce qui traduit l’absence de toute stratégie de développement et de plans d’actions axés autour d’une panoplie d’objectifs clairs et applicables et par conséquent d’une logique d’investissement à même de promouvoir le développement au sein des communes.

Dans le présent rapport, l’on note que « 38,5% de l’ensemble des communes sont dans un état de non-contribution », car incapables de générer des excédents et encore moins de résoudre les problèmes liés à la gestion des ressources et à  l’investissement.  « Suite à l’analyse de l’état des lieux, nous avons constaté l’absence de toute vision régionale voire de toute stratégie, à même de fixer les enjeux et les objectifs en matière de gouvernance locale. D’un autre côté, poursuit-elle, le manque des ressources humaines, l’absence de mécanismes de contrôle et de suivi ainsi que l’inefficacité du système informatique convergent vers une gouvernance locale bien en deçà des résultats requis ».

Une fuite de 80% des ressources propres aux CL

La présidente de la Hifl a insisté sur la faible contribution des ressources financières, propres aux municipalités, en raison — en outre —  de l’exemption fiscale sur le mobilier, en date de 2019. Cette mesure entrave la collecte, par les municipalités, de 80% de ressources financières et fiscales locales. Parallèlement, le taux d’endettement des communes ne cesse de grimper en dépit d’un bon repli, enregistré en 2018 (soit 93 MD en 2018 contre 238,3 MD en 2017). Un endettement qui revient, nécessairement, à la mauvaise gestion des ressources. D’ailleurs, l’Etat a dû combler les dettes de 64 communes démunies, et ce, dans le cadre du Programme de développement régional, lequel programme est financé par la BAD.

Mme Elloumi Baoueb n’a pas manqué de souligner l’inadéquation de la Constitution ainsi que du Code des collectivités locales — lesquels constituent des textes législatifs novateurs — avec des textes juridiques désuets, notamment le Code de comptabilité publique ainsi que le Code des fiscalités locales, ce qui empêche la mise en application des nouvelles législations.

Stratégie 2020-2023

La Hifl projette, en tant qu’institution de coordination, d’assistance et de supervision, de booster le domaine des collectivités locales en mettant en place une stratégie spécifique pour la période fin 2020-2023. Cette stratégie a pour finalités de renforcer l’autonomie financière des collectivités locales en misant sur la lutte contre les disparités régionales. « Pour ce, il est impératif, souligne Mme Elloumi Baoueb, d’outiller les collectivités locales des mécanismes nécessaires, à savoir une réforme législative, des recommandations sur la bonne gestion, la rationalisation des transferts financiers de l’Etat selon les priorités mais aussi conformément au cadre juridique. Il convient aussi d’impliquer les médias et la société civile dans la réalisation de ladite stratégie ».

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