Le monopole:  La gangrène des entreprises publiques tunisiennes

Une autopsie de certaines entreprises publiques monopoles démontre qu’elles ont été menottées tant économiquement que politiquement. Par conséquent, il faudrait qu’on prenne conscience qu’aujourd’hui se joue le sort de ces monopoles et que c’est le moment ou jamais de réaliser des mesures structurelles en profondeur.

L’autopsie des entreprises publiques gangrenées

Certains secteurs sont réputés pour être gangrénés par la corruption, mais rappelons également que le mode de gouvernance actuel, le « touche pas à mon poste», la gestion de la paie qui prédomine sur la gestion des compétences, les lobbies au sein des entreprises… sont des fléaux qui gangrènent, non seulement ces entreprises, mais également l’économie et aggravent la crise sociale déjà insoutenable. Le style de leadership des responsables et de ses collaborateurs, qui s’avère souvent incompatible, est l’une des raisons majeures citée par un personnel insatisfait à qui nous reprochons le manque de productivité. Il est, donc, dans l’intérêt des entreprises publiques de construire des équipes compatibles susceptibles de favoriser la performance du management.

Par ailleurs, il est temps de repenser à moderniser le style de gestion des conflits, mais également de repenser la culture organisationnelle de l’entreprise à travers une vision adéquate et un style de communication claire sur sa conception des choses.

Aujourd’hui, la plupart des managers refusent des postes de responsabilité par peur d’être pointés du doigt ou d’être injustement taxés de corruption. Il est donc primordial de valoriser les compétences et de générer de la valeur au pouvoir de confiance au travail.  Le manque de motivation empoisonne également les entreprises publiques. Le temps que passent les fonctionnaires dans leurs entreprises ne sert qu’à effectuer le strict minimum de ce qu’ils pourraient faire.

Le type de tâche confiée, l’organisation et même les réorganisations, qui sont souvent fort mal préparées, l’attribution des postes non conformes aux profils…, et bien d’autres facteurs, font des ravages au sein des entreprises, mais également au niveau de l’économie.

Entreprises publiques et développement durable

Le développement durable est tributaire de la mise à niveau du modèle de gouvernance des entreprises publiques, qui demeure assez précaire malgré toutes les études et les missions entreprises dans le but de l’améliorer.

Aujourd’hui, savoir renouer le dialogue, repenser le modèle économique et libérer certaines entreprises sont des dispositions urgentes et prioritaires pour sauver ce qu’il reste des entreprises publiques et reconstruire sur de nouvelles bases garantissant des politiques publiques économiques efficientes et efficaces. Le mode de gouvernance actuel est un mal qui ronge nos entreprises et qui s’étend avec une inquiétante rapidité !

Pour conclure, les mesures annoncées en guise de sédatif n’aboutissent à rien. Il faut réfléchir à des réformes applicables à court, moyen et long termes. Les entreprises publiques sont la colonne vertébrale de l’Etat, elles ont joué, et continuent à jouer, un rôle important pour assurer la continuité du service public : sauvons-les, c’est urgent !

Rappelons-nous donc et retenons bien les propos de Peter Drucker : «Chaque fois que vous voyez une entreprise qui réussit, dites-vous que c’est parce qu’un jour quelqu’un a pris une décision courageuse».

Les points à retenir

-Les entreprises publiques devraient être un atout face à la crise économique, politique et sociale actuelle. En effet, la crise devrait les inciter à innover et à adopter de nouveaux outils pour se développer.

-L’impératif d’impliquer les entreprises publiques dans des politiques répondant aux attentes économiques et sociétales, en les mobilisant et les motivant en faveur d’un profond changement créateur de valeur et d’activités nouvelles innovantes.

-La collaboration «public-privé» est un atout de croissance majeur à favoriser pour que l’économie soit stimulée.

-L’Etat doit garantir à l’entreprise le pouvoir d’exercer ses activités sans pour autant privilégier le rôle social sur le rôle économique, et ce, à travers le renforcement du dialogue social et de la responsabilité sociétale.

-L’amélioration de la gouvernance passe par un appui financier et des textes réglementaires permettant de pallier les insuffisances au niveau du système d’information et au niveau de la maîtrise des coûts et de la mesure des opportunités.

-Le mode de nomination de certains responsables incompétents est à l’origine de l’effondrement de certaines entreprises publiques. Il faudra agir fermement et non se contenter de faire des constats et des diagnostics.

Meriam BEN BOUBAKER

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