Les positions unanimes des experts pour le maintien des cours n’ont pas convaincu la Fédération générale de l’enseignement secondaire. Pour le secrétaire général, Lassâad Yaâkoubi, la fermeture des établissements scolaires relève de l’urgence…
Le variant Omicron, bien que léger et moins grave que ses précédents, continue à sévir si rapidement. Force est de constater qu’il s’attaque, semble-t-il, aux enfants. En milieu scolaire, il fait encore des ravages : «Plus de 7 mille cas de contamination au coronavirus ont été détectés chez les élèves et le personnel éducatif, alors que 122 des 6.100 écoles et 373 des 78.000 classes ont été fermées », selon les statistiques du ministère de l’Education. Soit un traitement au cas par cas. Agir ainsi de façon sélective ne peut être, de l’avis des syndicalistes, une solution qui va dans l’intérêt des élèves, d’autant plus que cela est de nature à perturber le rythme des cours et consacrer davantage l’inégalité des chances.
13 mille enseignants et cadres éducatifs non vaccinés
Et malgré les appels lancés à répétition pour la suspension des cours et la fermeture des établissements éducatifs, aucune décision officielle n’a été prise à cet effet. En attendant la réunion du comité scientifique qui devait avoir lieu hier dans la journée, afin de trancher la question. Toutefois, la Pr Rim Abdelmalek, spécialiste en maladies infectieuses, est catégorique, admettant, à maintes reprises, qu’il n’y a aucune raison de fermer les écoles. Tout en mettant en garde contre les effets néfastes que pourrait avoir l’arrêt des cours sur les enfants. Pas plus tard qu’avant-hier, elle avait indiqué, dans une déclaration sur les ondes d’une radio privée, qu’on aurait pu éviter la propagation du virus en milieu scolaire si les enseignants s’étaient fait vacciner. Surtout que le risque de contagion est plus élevé chez les adultes. D’ailleurs, l’on recense, chiffres du ministère de l’Education à l’appui, quelque 13 mille enseignants et cadres éducatifs jusque-là non vaccinés. Ils le refusent, tout bonnement, au moment où la vaccination des cinq ans et plus – déjà autorisée par ledit Comité– n’a toujours pas commencé. Et la spécialiste de rassurer que le nouveau variant Omicron est moins dangereux que les précédents, expliquant que le SARS-Cov-2 est en train de s’adapter à l’organisme humain pour assurer sa survie. Cela étant, même si ce virus sévit à grande vitesse, ses symptômes sont de plus en plus légers. Sauf qu’on doit, tout de même, rester vigilant. Ce message de précaution, adressé notamment aux plus âgés, intervient au moment où le pays a enregistré plus de 7 mille nouveaux cas, soit un taux de contamination hissé à environ 30%. Avec un bilan de décès qui s’alourdit progressivement. Et pourtant, la proposition de fermeture des écoles demeure encore rejetée. Hier, sur Mosaïque FM, Dr Mohamed Douagi, médecin et président de la Société tunisienne de pédiatrie (STP), n’a pas mâché ses mots sur cette question : « Les écoles ne doivent pas être fermées à cause du Covid-19. Et les cours aussi ». Et de s’exprimer crûment que la situation épidémiologique dans nos écoles n’est pas aussi catastrophique qu’on le croit. Et qu’il ne sert à rien de la dramatiser ainsi. Et d’ajouter, « fermer les écoles alors que nous n’avons même pas atteint le pic de la vague épidémique n’a aucun sens ! Cela aura des répercussions sur la psychologie de nos enfants ». Par contre, l’homme s’en tient beaucoup à la vaccination des enseignants. «Alors, si vous avez peur des enfants, faites-vous vacciner ! », s’adresse-t-il, en ces termes, au corps enseignant.
Etait aussi de cet avis, le virologue et membre du Comité scientifique de lutte contre le coronavirus, Dr Mahjoub Aouni. Selon lui, la plupart des infections qui touchent les élèves sont légères et ne présentent aucun danger. Et de rassurer que cette vague que traverse la Tunisie sera de courte durée et ne représentera pas une menace imminente pour la santé des citoyens. Hechmi Louzir, directeur de l’Institut Pasteur et président, également, de la commission de vaccination nationale était, on ne peut plus, clair et précis : « Les cas déjà observés sont majoritairement asymptomatiques. De plus, aucun cas grave n’a été enregistré, à l’heure actuelle, chez les enfants ». Mais cette forte propagation en milieu scolaire est due, à ses dires, au faible taux de vaccination chez les 12-15 ans. Soit seulement 52 mille enfants vaccinés, enregistrant ainsi un taux de 60%.
Yaâkoubi fait cavalier seul
Cependant, cette position unanime n’a pas, semble-t-il, convaincu la Fédération générale de l’enseignement secondaire. Que faire ? Si réfractaire soit-il, son secrétaire général, Lassâad Yaâkoubi, tient à faire cavalier seul, souhaitant fermer les écoles. Pour lui, cela relève de l’urgence. Dans une déclaration faite à la Tap, il a jugé sans effet la politique du ministère face à l’évolution de la situation épidémiologique en milieu scolaire. Et si le ministère, estime-t-il, continuait sur cette lancée, pour une semaine de plus, l’impact serait encore plus catastrophique. Dès le début d’Omicron, Yaâkoubi n’a cessé de critiquer les recommandations du comité scientifique. Toutes les mesures de prévention prises à cet effet ne lui ont jamais plu. Il a aussi remis en question l’indécision du ministère de l’Education, lui imputant la responsabilité de n’avoir pas agi à temps, afin de briser la chaine de contaminations en milieu scolaire. Face à tous les deux, l’homme n’a pas hésité à tirer à boulets rouges.
Dans la foulée, le syndicaliste a infligé un démenti : « La Fédération n’a jamais suggéré la suspension des cours, mais elle a plutôt recommandé de rééchelonner les vacances scolaires à la lumière de la hausse des contaminations parmi les élèves et le corps enseignant ». Il a appelé ses adhérents à se faire vacciner, indiquant que cela ne devrait pas être utilisé comme prétexte contre eux. Sans pour autant oublier d’insister sur l’intérêt qu’il y a de fermer les écoles. Une suggestion qui ne serait pas prise au sérieux. Et qu’une telle décision revient uniquement au comité scientifique de lutte anti-Covid. Car, de l’avis du ministre de l’Education, ni la suspension des cours ni le fait d’avancer les vacances scolaires du mois de février ne peuvent freiner la propagation d’Omicron.