Accueil A la une Des écoles privées d’eau et d’électricité dans les zones rurales : La souffrance au quotidien !

Des écoles privées d’eau et d’électricité dans les zones rurales : La souffrance au quotidien !

Les échecs de l’école publique sont exacerbés et approfondis dans les zones rurales où le calvaire des élèves, privés d’eau et d’électricité, se poursuit. D’où l’urgence pour le pays de remplir ses obligations envers les enfants et de répondre efficacement à leurs besoins, y compris leur droit à l’éducation et à la santé. 

La dernière partie du rapport mensuel des Mouvements Sociaux mars 2022, réalisé par l’Observatoire social tunisien (OST), relevant du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (Ftdes), retrace la souffrance des enfants ruraux dans certaines régions et établissements d’enseignement sans eau ni électricité depuis des années. Prenant l’exemple de Sagdoud, une zone rurale à Redeyef qui abrite environ 2.000 habitants, le document indique que la pénurie d’eau augmente les difficultés rencontrées par les habitants de cette région où des dizaines de personnes sont privées d’eau potable depuis des années consécutives. Le pire pour les enfants de ces régions est que l’Etat continue de les ignorer à chaque occasion, ce qui constitue une grave menace à la jouissance des droits humains et des enfants en particulier.

Une coupure depuis 10 ans !

En effet, les enfants qui étudient sont particulièrement touchés par cette situation, parce qu’ils sont les plus vulnérables face aux risques physiques, psychologiques et épidémiologiques du fait de l’interruption de l’approvisionnement en eau et en électricité dans leurs écoles primaires. Cette situation affecte profondément le bon fonctionnement du processus éducatif en raison de la grave pénurie de fournitures, de bancs d’école, de salles de classe, de manque d’entretien des sanitaires et d’autres fournitures. Dans la région de Sagdoud, les habitants sont privés d’eau depuis presque 10 ans, la plus longue coupure d’eau dans le gouvernorat. Cela a laissé peu d’options à la population et les écoles primaires de la région ont recours à des alternatives, telles que la conservation de l’eau des puits à l’intérieur de tracteurs sans garantie de qualité ou de sécurité. De telles pratiques accroissent les préoccupations concernant les risques de maladies véhiculées par l’eau chez les enfants, ainsi que la marginalisation de leurs droits les plus fondamentaux, à savoir leur droit à l’éducation et à la santé, sans oublier l’impact psychologique de cette situation qui doit être traitée d’urgence et portée à l’attention des responsables.

Un mépris flagrant des droits des élèves

Alors que les efforts des nations se poursuivent dans le monde entier pour promouvoir davantage les droits de l’enfant et donner effet aux lois contenues dans les traités et conventions universels qui protègent les droits de l’enfant, ce problème en Tunisie, en particulier dans certaines régions où il y a une marginalisation sociale et économique, reste un sujet de préoccupation pour les gouvernements et a été isolé des progrès réalisés par le monde dans le domaine des droits de l’enfant. Cela rend ce groupe social vulnérable et il souffre de la détérioration des services, y compris l’éducation, qui est le facteur clé et le plus important dans la construction et la formation de l’enfant pour jouer un rôle actif de développement dans la société. Un mépris flagrant des droits des élèves et une lacune importante dans le questionnement des responsables face aux graves violations des droits de ces enfants en leur refusant leur droit à une éducation de qualité. Cette situation se poursuit depuis plus de trente ans après que les dirigeants mondiaux ont déclaré leur engagement historique envers les enfants et adopté la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant depuis 1989 et l’ont intégrée à l’accord international par lequel la Tunisie comme d’autres Etats ont pris l’engagement de protéger les droits fondamentaux des enfants.

Atteinte aussi au droit à la santé

desMalheureusement, le parcours éducatif des écoliers ruraux est plein de pièges logistiques, sociaux et économiques qui minent leur expérience scolaire. A titre d’exemple, les enfants qui fréquentent l’école primaire Sagdoud 01 sont obligés de boire de l’eau qui n’est pas de qualité et de sécurité, en raison de l’adoption par la délégation régionale de l’éducation à Gafsa de la technique de stockage de l’eau des puits adjacents à l’école dans des tracteurs en fer en l’absence d’un rein à contrôler la qualité de cette eau et assurer la sécurité des élèves. C’est un signe grave de violation des droits des élèves et contraire à l’article 38 de la Constitution, qui prévoit le droit à la santé pour tous et qui, à son tour, chevauche de nombreux autres droits, y compris le droit à l’éducation et à la non-discrimination.

« Des droits qui ont été quelque peu amputés et n’ont pas été pleinement reconnus, mais ont souvent été accompagnés d’une marginalisation de leurs éléments essentiels. La mise à disposition de l’école et de l’eau ne signifie pas nécessairement l’obligation de garantir les droits des enfants à la santé et à l’éducation, puisque cet espace éducatif ne joue pas le rôle souhaité. Les éléments fondamentaux de ces droits sont totalement absents en raison de l’absence de principes de disponibilité, d’adéquation et d’accès des élèves à leurs pleins droits… La pénurie d’enseignants, l’insuffisance du matériel pédagogique, l’introduction d’un système d’enseignement en équipe (deux années d’intégration au sein d’une même section) et les mauvaises conditions d’hygiène rendent également l’éducation difficile pour eux. Cela a de graves conséquences, avec un maximum de 10 élèves par an, reflétant un faible taux de scolarisation, ainsi qu’un faible score de 14 élèves sur 20 par certificat d’enseignant », souligne le document.

Un espace de non-équivalence et d’inégalité sociale

D’un point de vue sociologique, la sociologue Rahma Ben Slimen souligne l’échec de l’école tunisienne à accompagner tous les changements structurels de la société. En effet, les inégalités sociales et la perte de ressources éducatives, telles que l’eau et l’électricité et tout ce qui concerne l’environnement dans les zones rurales, empêchent les écoles de remplir leur rôle éducatif et  contribuer à approfondir ce que le sociologue français, François Duby, a appelé ‘’la crise scolaire’’. De plus, l’absence des installations susmentionnées a entraîné l’émergence de problèmes touchant la psychologie de l’enfant à l’école.

Le Dr. Ben Slimen a évoqué aussi la question de l’intégration en tant que fonction de l’école, puisque le rôle de cet établissement est de réduire la taille de l’inégalité sociale qui conduit à la fragilité sociale. Mais l’absence des principales installations suscitées à l’école Sagdoud 01 renvoie aux études sociologiques qui ont traité des rôles de l’école dans le processus de transfert des inégalités sociales car ces distinctions, inégalités sociales et inégalités des chances se sont établies, affectant négativement la psychologie de l’enfant qui se retrouve dans un environnement éducatif qui ne répond pas à ses besoins pour recevoir la réussite scolaire au niveau requis.

Face à cette situation et aux déficiences structurelles et à la pauvreté pédagogique auxquelles ce secteur est aujourd’hui confronté, le moment est venu de le réformer, non seulement comme un projet éducatif, mais comme un projet de société qui incarne la volonté collective d’un changement approprié, en phase avec les défis et conforme aux grandes aspirations du pays. « Le rôle de l’éducation en Tunisie dans la réalisation du progrès et du développement de la société, notamment en milieu rural, est absent en raison de l’inexistence d’un projet de société global faisant du secteur de l’éducation un pilier de la réalisation du progrès. Ce secteur, qui a été soumis à de violentes secousses, a fait l’objet de nombreuses interrogations sur sa capacité à remplir effectivement son rôle cognitif et social, ou s’il patauge encore dans les tentatives de réformes qui se sont révélées vaines, puisqu’il s’est également caractérisé par la superficialité dans le traitement des problèmes majeurs dont il souffre », précise le document, tout en ajoutant que cette situation et l’échec de l’école publique reflètent l’urgence pour le pays de remplir, aujourd’hui, ses obligations envers les enfants et de répondre efficacement à leurs besoins, y compris leur droit à l’éducation et à la santé. A cet égard, les gouvernements doivent tenir leur promesse d’intégrer, de protéger et d’éduquer chaque enfant, en s’obligeant de mettre fin à toutes les formes de discrimination, en renforçant ses politiques éducatives, en prenant des mesures urgentes et en investissant les fonds nécessaires pour garantir que les écoles soient sûres, inclusives et répondent aux besoins éducatifs des enfants.

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