BCT, gouvernement et interférences…

Editorial La Presse

LA BCT, en tant que premier responsable de la politique monétaire et du contrôle des flux monétaires qui circulent dans l’économie, est, ces jours-ci, pointée du doigt pour avoir augmenté le taux d’intérêt directeur de 0.75 point. Une décision qui n’a pas plu à plusieurs, allant même à accuser la BCT de manœuvrer contre le gouvernement et de fragiliser davantage le pouvoir d’achat des Tunisiens contraints à payer plus pour s’endetter tout comme les PME et les investisseurs en général.

Cette lecture paraît très simpliste : l’intervention de la BCT, en tant qu’agent économique autonome qui agit selon les fluctuations de la sphère monétaire (qui se trouve en pleine corrélation avec la sphère réelle des échanges économique), est, économiquement parlant, inévitable pour absorber un tant soit peu le rythme fou de l’inflation. Qu’elle soit importée  essentiellement à cause de l’invasion russe en Ukraine, ou interne avec des spéculations, une demande folle et une baisse des indicateurs liées à la productivité, l’inflation tend  vers 10%, et ceci est un énorme danger. Il fallait à court terme absorber cette masse monétaire gonflée et cet argent liquide qui circule d’une manière légale ou illégale. C’est un réflexe macroéconomique que toute banque centrale ferait sans hésiter. Le problème est que certains veulent que la BCT, qui a acquis une autonomie qui lui permet d’esquiver les ratages et les manœuvres de n’importe quel gouvernement, soit un outil dépendant entièrement du gouvernement et du décideur économique. Cela aura une conséquence directe : il n’y aura plus de garde-fou ou d’ « amortisseur » pour un mauvais choix gouvernemental. L’autonomie de la BCT est un must pour réguler le système monétaire et à travers lui le système économique réel avec les échanges et les prix.

Toutefois, ce qu’on remarque jusqu’à aujourd’hui, c’est que la BCT n’est pas toujours en harmonie totale avec le gouvernement. Parfois, il ne s’agit pas de réguler, mais de favoriser le secteur bancaire, le plus grand bénéficiaire de tout ce qui se passe sur notre économie depuis longtemps. La peur, c’est d’avoir un gouvernement qui, en partie, applique ses politiques, et qui se trouve freiné par une action de la BCT qui , elle, veille aux équilibres monétaires et indirectement macroéconomiques. Une BCT autonome, voire cassante, qui n’obéit pas aux intentions gouvernementales pour une meilleure régulation, ou une BCT intégrée à l’action gouvernementale et qui peut justifier des politiques parfois erronées ? Le débat est aussi controversé qu’élitiste de fait. En tout cas, la BCT a un poids considérable aujourd’hui, toute interférence avec le gouvernement est néfaste, mais entériner une relation antagonique avec le gouvernement peut aussi coûter très cher. Cela peut déstabiliser et contraindre tous les acteurs de notre économie déjà en pleine difficulté.

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