Journée internationale des Casques bleus de l’ONU: Sous le signe de la paix et du partenariat 

Un rôle précieux pour la femme tunisienne dans le cadre des missions de maintien de la paix et un professionnalisme avéré.


Célébrée le 29 mai, la Journée internationale des Casques bleus de l’ONU porte cette année sur le thème «Ensemble pour la paix: le partenariat, clé du progrès». Dans son message adressé à cette occasion à la communauté internationale, le secrétaire général de l’ONU a déclaré ce qui suit: «Aujourd’hui, nous honorons les plus d’un million de femmes et d’hommes qui ont servi dans les rangs des Casques bleus des Nations unies depuis 1948. Nous rendons hommage à près de 4.200 héros et héroïnes qui ont sacrifié leur vie pour défendre la paix».

Parmi eux, 20 Tunisiens sont passés de vie à trépas en servant sous le drapeau des Nations unies. Une minute de silence a été observée en leur mémoire lors de la célébration de cette journée par l’Association tunisienne pour les Nations unies en présence du Coordonnateur résident des Nations unies en Tunisie, Arnaud Peral, de représentants des ministères des Affaires étrangères et de la Femme, de la Défense nationale et de l’Intérieur, ainsi que d’anciens militaires et diplomates.

Au siège de l’ONU à Tunis, dans la Salle qui porte le nom de l’illustre Mongi Slim, grand militant et illustre diplomate qui avait présidé en 1954 la délégation tunisienne aux pourparlers de Paris ayant par la suite conduit à la signature du Protocole accordant l’autonomie à la Tunisie, le temps fut au recueillement en hommage à une vingtaine de Tunisiens morts pour la bonne cause sous le drapeau de l’ONU dans les missions de maintien de la paix,  mais qui demeurent malheureusement  inconnus du grand public. Peu d’encre a coulé autour de ces martyrs de la paix et il est grand temps de penser à ériger une statue dans la capitale ou à proximité du siège de l’ONU sur les berges du lac à leur effigie en guise d’hommage et de reconnaissance.

Le message du SG de l’ONU

Lors de cette célébration, le message du SG de l’ONU a été repris par le Coordonnateur résident des Nations unies en Tunisie qui a tenu à remercier  notre pays pour ses efforts visant la consolidation du système onusien inhérent aux opérations de maintien de la paix. «Nous nous remémorons cette vérité séculaire : la paix ne peut jamais être tenue pour acquise. Elle est l’objectif ultime. Nous sommes profondément reconnaissants aux 87.000 membres du personnel civil, militaire et de police qui, sous la bannière de l’ONU, œuvrent aujourd’hui à asseoir la paix dans le monde. Ils font face à des défis colossaux. La multiplication des violences à leur égard a rendu leur travail encore plus dangereux. Les restrictions dues à la pandémie l’ont rendu plus difficile. Mais les Casques bleus continuent d’endosser avec honneur leur rôle de partenaires pour la paix», a-t-il déclaré.

«Cette année, nous mettons l’accent sur le pouvoir extraordinaire des partenariats. Nous le savons : la paix s’obtient lorsque les gouvernements et les sociétés unissent leurs forces pour régler les différends par le dialogue, instaurer une culture de la non-violence et protéger les plus vulnérables. Partout dans le monde, les Casques bleus travaillent main dans la main avec les Etats membres, la société civile, le personnel humanitaire, les médias, les populations qu’ils servent et bien d’autres, pour promouvoir la paix, protéger les civils, défendre les droits humains et l’Etat de droit et améliorer la vie de millions de personnes».

«Aujourd’hui et chaque jour, nous saluons le dévouement avec lequel ils aident les sociétés à se détourner des conflits et à s’engager sur la voie d’un avenir plus pacifique et prospère, pour tous et toutes. Nous leur sommes à jamais redevables», conclut le SG, António Guterres.

La célébration de cette journée représente une occasion de rendre hommage au personnel civil, policier et militaire pour sa contribution inestimable aux efforts de l’ONU. Elle permet également d’honorer la mémoire d’environ 4.200 Casques bleus qui ont perdu la vie en servant sous le drapeau des Nations unies depuis 1948, dont 135 hommes et femmes l’année dernière.

La Tunisie: 24 missions depuis 1960

La Tunisie ne cesse d’affirmer sa détermination à renforcer sa présence aux missions de maintien de la paix, reflétant ainsi son engagement au service de la paix et de la sécurité dans le monde entier, fait savoir le représentant du ministère de la Défense, le commandant Oussama Saïed.

A cet effet, il ajoute que les unités de l’armée tunisienne ont participé à 24 missions de maintien de la paix en Haïti (1990-1994), au Sahara Occidental (1991-1997), Côte d’Ivoire (2003-2017), Burundi (1993-2009) , Sud Afrique (1994-1995) République Centrafricaine (2010-2011) République démocratique du Congo, Rwanda, Mali (depuis mars 2018), Albanie, les Iles Comores, Cambodge, Sénégal, Somalie, Sud-Soudan (depuis 2009), dévoile la même source. Des missions couronnées toutes de succès et de réussite et un taux de participation bien élevé de la femme estimé à 32,5%.

En général, les Casques bleus tunisiens jouissent d’une excellente réputation là où ils sont appelés à préserver la paix, protéger les populations lors des conflits et contribuer à apporter la stabilité, explique plus loin le représentant de la Défense nationale.

Nos valeureux militaires n’ont pas seulement appris à faire la guerre mais aussi à construire la paix. 

Pourquoi l’ONU fait-elle appel à la Tunisie pour assurer ces missions de paix? La réponse nous vient de Mahmoud Mezoughi, président de l’Association  des anciens officiers de l’armée nationale. L’ONU fait appel à notre pays pour sa disponibilité, sa crédibilité, son impartialité, son expérience et la capacité d’adaptation de ses militaires.

Casques bleus, la femme tunisienne prend les commandes 

Les témoignages de Mme Nebiha Kadaachi, colonel majeur et conseillère genre Minusca (par vidéoconférence) et de la Commissaire générale Imen Selmi sont venus confirmer  que les femmes peuvent assumer le même rôle que la gent masculine en matière de maintien de la paix. Affectée dans un poste avancé de la République centrafricaine depuis septembre 2021, Nebiha Kadaachi sert de «point focal» pour l’égalité des genres dans le cadre de la mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en République centrafricaine (Minusca) qui a été créée par la résolution 2149 (2104) du Conseil de sécurité. Selon son témoignage, elle ne s’est pas arrêtée à ce stade, car elle a pu s’adonner à plusieurs activités sous forme de campagne de sensibilisation autour de la délinquance juvénile au profit des jeunes, la scolarisation des filles et la violence basée sur le genre au profit des associations féminines. Conseiller les leaderships sur les questions genre, assurer de meilleures conditions de travail pour les femmes officiers de police et appuyer leur travail sur la thématique genre.

«Faire partie des Casques bleus en tant que cheffe d’unité d’évaluation interne et d’audit et conseillère en genre est une fierté, une richesse de plus», souligne pour sa part la représentante du ministère de l’Intérieur, relevant de la Police judiciaire. Ayant servi dans plusieurs missions onusiennes, elle évoque l’impact disproportionné des conflits sur les populations vulnérables et notamment sur les femmes susceptibles de renforcer les inégalités de genre. Son rôle consistait à travailler en étroite collaboration avec les forces de sécurité intérieure pour assurer la protection des civils, lutter contre les violences basées sur le genre, renforcer les capacités des FSI et autonomiser les femmes (missions à Mali et Congo). 

Dans tous les domaines du maintien de la paix, les femmes Casques bleus ont prouvé qu’elles peuvent jouer les mêmes rôles, selon les mêmes normes et dans les mêmes conditions difficiles que leurs homologues masculins. C’est un impératif opérationnel que de recruter et de conserver des femmes casques bleus, a déclaré lors de la célébration de cette journée Azouz Ennifar, ancien ambassadeur et ancien Représentant spécial du secrétaire général des Nations unies.

Selon des statistiques émanant des instances onusiennes, en 1993, les femmes représentaient 1% du personnel en uniforme déployé. En 2019, sur environ 95.000 soldats de la paix, les femmes représentent 4,7% du personnel militaire et 10,8 % du personnel de police dans les missions de l’ONU du maintien de la paix. Là division de police des Nations unies a lancé «l’effort mondial» pour recruter davantage de femmes dans les services de police nationaux et dans les opérations de police des Nations unies du monde entier. L’objectif pour 2028 est de 15% pour les femmes servant dans les contingents militaires et de 25% pour les observateurs militaires et les officiers d’état-major.

Casques bleus, intérêts et enjeux 

Les intérêts de notre pays sont d’ordre politique, militaire et financier aussi bien pour l’Etat que pour les militaires, tient à éclairer Mezoughi. Il s’agit de gagner l‘estime et le soutien de l’ONU sans compter le rayonnement sur le plan diplomatique. L’expérience du terrain, l’amélioration de la capacité de planification opérationnelle et l’interopérabilité avec les autres nations sont assurées sur le plan militaire. 

La célébration de la «Journée internationale des Casques bleus de l’ONU» Tunis reflète «la longue et fière histoire que la Tunisie entretient avec la question du maintien de la paix», insiste à rappeler l’ancien ambassadeur Représentant spécial du SG des NU, M. Azouz Ennifar, soulignant au passage «les avantages comparatifs de la Tunisie et les grandes opportunités qui s’offrent à notre pays pour continuer à contribuer à la paix dans certaines des zones de conflit, notamment sur notre continent, et de jouer un rôle accru dans ce que l’on appelle aujourd’hui la diplomatie militaire».

Un exposé a été consacré à la résolution 1325 du Conseil de sécurité, adoptée en octobre 2000. Mme Dejla Guetari, représentante du ministère de la Famille, de la Femme, de l’Enfance et des Personnes âgées, a mis en exergue le plan d’action national pour la mise en œuvre de cette résolution qui a formellement reconnu l’importance de l’impact des conflits armés sur les femmes et les filles et  garanti la protection et la pleine participation de celles-ci aux accords de paix. Des ateliers de sensibilisation et de vulgarisation ont été organisés dans ce cadre. L’objectif de ce plan est de «renforcer le rôle des femmes pour le maintien de la sécurité et de la paix en Tunisie en intentionnalisant la société tunisienne en termes de droits de l’homme, notamment l’égalité et la non-discrimination, et en renforçant le cadre national pour l’élimination de la discrimination basée sur le genre». Parmi les objectifs spécifiques dudit plan, «la contribution effective des femmes et des filles dans le maintien de la paix, la résolution des conflits et la lutte contre le terrorisme».

D’anciens officiers de l’armée nationale qui ont servi dans diverses missions de maintien de la paix ont apporté leur témoignage à l’occasion de la célébration de cette journée clôturée par la remise de diplômes à ces valeureux soldats de la paix par l’association tunisienne pour les Nations unies présidée par l’ancien ambassadeur et ancien représentant permanent de la Tunisie auprès de l’ONU à New York,  Moncef Baati. Une bien louable initiative qui insiste sur l’importance de la diplomatie militaire via les missions de maintien de la paix  des Casques bleus. «Les opérations de maintien de la paix  sont aujourd’hui les actions les plus connues et les plus visibles des Nations unies et sont un acteur essentiel pour la résolution pacifique des conflits à travers le monde», selon Azouz Ennifar.

L’augmentation du nombre d’opérations de maintien de la paix, leur complexité et leur durée croissante ont eu pour conséquence une augmentation soutenue de leur budget. Le budget total de l’ensemble des OMP a ainsi plus que triplé entre l’exercice 2001-2002 et la période 2014-2015 passant de moins de 3 à plus de 8 milliards de dollars.

Depuis cinq ans, les efforts de rationalisation budgétaire conduits par le Secrétariat et l’évolution du périmètre des OMP ont permis de réduire ce budget à 6,52 Md USD pour la période 2019-2020. Pour la période 2020-2021, le budget total des opérations de maintien de la paix s’élève à 6,777 Md USD. Il y a aujourd’hui 12 opérations de maintien de la paix dont 6 en Afrique et les plus importantes sont au Soudan du Sud et au Congo. Les effectifs des 12 missions sont d’environ 90.000 hommes et femmes. Au total, il y a eu 71 missions depuis 1948 indique la même source.

Laisser un commentaire