Yazid Safir, Directeur de l’agence française de développement en Tunisie à La Presse : «La Tunisie est un partenaire privilégié du groupe AFD»

Bras financier de l’aide au développement de la France, l’AFD est présente en Tunisie depuis 30 ans. Au cours de cette période, l’AFD a financé plus de 200 projets pour un engagement financier total de 4 milliards d’euros. Entre l’appui aux projets structurants et le soutien fourni au secteur privé, le groupe AFD n’a pas lésiné sur les moyens pour contribuer au développement économique et social du pays. D’ailleurs, l’AFD se vante d’être « le bailleur du social », comme l’a souligné son directeur en Tunisie, Yazid Safir. « Nos projets ont pour objectif principal de contribuer au développement économique et social du pays et à l’amélioration des conditions de vie des Tunisiennes et des Tunisiens », a-t-il affirmé. Dans cet entretien, Yazid Safir revient sur les différentes actions menées par l’AFD en Tunisie au cours de ces trente dernières années. Il ésquisse, également, les grandes lignes de la nouvelle stratégie du groupe pour la Tunisie, qui sera annoncée au cours du dernier trimestre de cette année. Néanmoins, le directeur de l’AFD en Tunisie appelle de ses vœux une accélération des délais d’exécution des projets financés par les bailleurs de fonds, afin d’éviter les coûts d’opportunités pour le pays.

Comment évaluez-vous le partenariat entre la Tunisie et l’AFD au cours de ces trente dernières années ?

Il faut être clair sur le fait que la Tunisie est un partenaire privilégié du groupe AFD. Le groupe AFD (c’est-à-dire l’Agence française de développement qui est en charge du financement du secteur public et des organisations non gouvernementales, Proparco qui est notre filiale dédiée au financement du secteur privé et puis, depuis le 1er janvier 2020, nous avons une nouvelle filiale qui s’appelle Expertise France, qui est une agence de coopération technique internationale pour, notamment, apporter l’expertise et, dans certains cas, mettre en œuvre les projets) est présent depuis 30 ans en Tunisie, où il accompagne le pays en adéquation avec les priorités nationales, dans sa transition politique, économique et sociale. En 30 ans, nous avons financé un peu plus de 200 projets pour un engagement financier total de 4 milliards d’euros. C’est un chiffre qui place la Tunisie parmi les principaux pays d’intervention de l’AFD dans le monde. Ce qu’il faut savoir, c’est que, lors de cette période, il y a eu deux phases différentes : une première s’est étalée de 1992 à 2010, et puis une seconde phase qui a été entamée depuis 2011. Depuis cette date, il y a eu une accélération des engagements de l’AFD en Tunisie, puisque finalement sur les 4 milliards d’euros mobilisés en 30 ans, plus de 2,2 milliards d’euros ont été mobilisés pour financer quasiment 130 projets sur cette seconde phase (2012-2021). Cela est lié à une volonté politique de l’Etat français d’accélérer les projets de coopération et de développement en Tunisie. Cela a été reflété par des engagements présidentiels français : un premier engagement en 2016 et un second, renforcé par le président Macron lors de sa visite d’Etat en début de 2018, et au cours de laquelle le président s’est engagé sur un niveau de 250 millions d’euros par an, et ce, entre 2017 et 2022. Ce que je peux vous dire, c’est que si notre programme d’activités pour l’année 2022 est concrétisé, nous allons tenir ces engagements présidentiels et nous allons même un tout petit peu les dépasser. Historiquement, les financements de l’AFD se sont concentrés autour de quelques secteurs stratégiques, comme la formation professionnelle, l’emploi et le soutien au développement des PME. Cela était un marqueur très fort de notre action dans les années 90 et 2000 et ça continue de l’être. Un autre axe stratégique : le développement urbain durable et les transports sobres en carbone. Il y a également, une priorité stratégique qui se poursuit autour de la gestion intégrée des ressources en eau. La quatrième priorité stratégique était celle du soutien de la mise en œuvre du nouvel agenda agricole et de protection des écosystèmes sensibles. Depuis la seconde phase, en soutien au plan quinquennal de développement de 2016-2020, l’Etat français a élargi le mandat d’intervention de l’AFD en Tunisie à plusieurs secteurs. Je prendrais, à titre d’exemple, la gouvernance, les énergies renouvelables, la santé, la protection sociale et le numérique. Aujourd’hui, l’AFD intervient sur la quasi-totalité des secteurs d’intervention du groupe dans le monde. Sur les 30 dernières années, et sur les 4 milliards d’euros d’engagements, 700 millions d’euros sont allés au secteur privé (soit à peu près 17%), 655 millions d’euros sur l’eau et l’assainissement, 636 millions d’euros sur le développement urbain, 505 millions d’euros sur l’appui à une meilleure gouvernance, 341 millions d’euros sur l’éducation et la formation professionnelle… Cela traduit l’importance de ces secteurs dans notre action tout au long de cette période.

Si on compare les actions de soutien menées par le reste des agences de coopération et les institutions financières aux actions de votre agence, quelles sont vos spécificités ?

D’abord, nous sommes un bailleur bilatéral, c’est-à-dire que notre action s’inscrit vraiment dans les priorités définies par le gouvernement français et le gouvernement tunisien en matière de coopération.

Une de nos spécificités, également, est que nous faisons beaucoup d’appel à de l’expertise française pour accompagner les projets que nous finançons. Ensuite, et c’est un peu ce qui nous rend fiers ici en Tunisie avec des équipes de l’AFD, de Proparco et d’Expertise France, on nous dit souvent que nous sommes le bailleur du social, c’est-à-dire que nos projets ont pour objectif principal de contribuer au développement économique et social du pays et à l’amélioration des conditions de vie des Tunisiennes et des Tunisiens. C’est pour cela que l’eau, l’assainissement et le développement urbain (la réhabilitation des quartiers populaires par exemple) sont nos priorités et sont deux des secteurs sur lesquels nous sommes le plus intervenus au cours des 30 dernières années.

Je peux vous donner des chiffres qui illustrent cela. En 30 ans, les projets financés par l’AFD ont permis de réhabiliter 1.130 quartiers populaires. Il y a plus de 25 % de la population tunisienne (plus de 3 millions d’habitants) qui ont bénéficié de l’appui de l’AFD à la politique de rénovation urbaine. C’est pour moi un vrai marqueur de l’AFD en Tunisie, et une réelle fierté pour les collègues et les équipes. Et nos partenaires, l’Onas, la Sonede, l’Arru, la Cpscl, nous le rappellent toujours et c’est ce qui fait la spécificité de l’AFD. En 2020, le taux d’accès à l’eau potable dans les zones rurales en Tunisie est de 95%. 40 ans en arrière, en 1984, il était de 24,3%. L’AFD a été un contributeur majeur dans les programmes d’alimentation en eau potable dans les zones rurales, qui ont permis de faire passer l’accès de 24% en 84 à 95% en 2020. C’est vraiment ça la spécificité de l’AFD. Cela ne veut pas dire que nous ne travaillons pas sur les questions du climat, d’environnement et de biodiversité, puisque nous avons mis près de 200 millions d’euros en 30 ans sur ces thématiques. Cela ne veut pas dire, également, que nous ne travaillons pas sur la question de l’énergie, puisque nous avons mis 272 millions d’euros en 30 ans sur l’énergie. Néanmoins, la spécificité de l’AFD, c’est vraiment ce travail de bailleur social pour l’amélioration de la qualité de la vie du citoyen tunisien. Et puis, le dernier marqueur de l’AFD, c’est notre appui à la jeunesse et à l’entrepreneuriat.

La multitude de crises, celle de la crise Covid-19 ou encore la crise des finances publiques, que connaît la Tunisie, a-t-elle influencé les priorités et les orientations de l’AFD?

Rappelons, d’abord, qu’en réponse à la crise du coronavirus et à ses impacts économiques et sociaux en Tunisie, l’Etat français a très rapidement demandé à l’AFD de se mobiliser. Et nous avons répondu à la demande de l’Etat tunisien dès 2020, en accélérant des versements sur nos projets et en redéployant des fonds pour un total de 100 millions d’euros, principalement en faveur du budget de l’Etat. Ce qui a permis à l’AFD, avec d’autres bailleurs de fonds également qui ont eu la même démarche, de soutenir le budget de l’Etat tunisien face aux conséquences de cette crise. S’agissant de la crise des finances publiques, il est clair qu’elle a un impact sur les engagements actuels de l’AFD. La crise des finances publiques n’ a pas changé nos priorités stratégiques et nos axes thématiques que j’ai rappelés tout à l’heure. Mais ça a modifié un petit peu nos outils d’intervention. C’est-à-dire que l’AFD, en tant que banque publique de développement, a pour vocation principale de financer des projets de développement économique, social et environnemental.

Quand notre partenaire, la Tunisie, se retrouve dans un contexte de finances publiques dégradées, les autorités nous ont demandé de contribuer de manière plus importante qu’historiquement, directement au budget de l’Etat. Et donc, au cours des deux dernières années, nous avons concentré nos engagements sur des appuis budgétaires. Le président Macron, lors de la visite du président Kaïs Saïed en juin 2020, s’était engagé à ce que la France, via l’AFD, apporte un appui budgétaire de 350 millions d’euros sur trois ans (entre 2020 et 2022). Très rapidement, dès le mois d’octobre 2020, lors d’une visite du ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, l’AFD a signé déjà un premier prêt budgétaire de 150 millions d’euros. Aujourd’hui, pour tenir l’engagement présidentiel, nous sommes dans une phase de structuration d’un nouvel appui budgétaire, qui pourra permettre de tenir cet engagement. On n’a pas changé nos priorités stratégiques ou thématiques, mais c’est vrai que quand l’Etat traverse une crise de finances publiques, il préfère s’endetter pour son budget, plutôt que pour les projets de développement. Et nous espérons que cette situation ne durera pas, car notre vocation première n’est pas de financer le budget de l’Etat, mais de financer des projets de développement.

L’écosystème des start-up tunisien est en pleine ébullition et a besoin de davantage de financement. Est-ce que l’appui aux start-up fait partie de l’action de l’AFD ?

Je peux vous dire que je suis totalement aligné avec vous sur le fait que c’est un écosystème très dynamique. A mon sens, c’est l’écosystème le plus dynamique de la région du Maghreb. Mon précédent poste était au Maroc et j’y ai passé quatre années de 2016 à 2020 où j’étais directeur régional de Proparco, qui est la filiale de l’AFD, mais j’étais aussi directeur pour la Tunisie et, donc, je venais souvent ici. Sur la période 2016-2020, je peux vous assurer que l’écosystème tunisien était plus dynamique que celui du Maroc. Et depuis mon arrivée ici, en tant que directeur à l’été 2020, j’ai vu que cette dynamique s’est même accentuée et accélérée. Il est tout à fait naturel et même stratégique pour nous d’accompagner cette dynamique, puisque c’est un réel axe de développement pour la Tunisie. Et le groupe AFD souhaite y prendre toute sa part, parce que c’est également le souhait de la France et de notre partenaire l’Etat tunisien. En ce sens, nous avons fait beaucoup de choses. Ce qu’il faut savoir, c’est que l’AFD est le bailleur qui a financé les études techniques et de faisabilité qui ont permis le lancement du fonds des fonds Anava. Cet accompagnement technique est encore aujourd’hui mené par la BPI et c’est l’AFD qui a financé tout le travail de la BPI, qui a permis aujourd’hui que le fonds des fonds Anava voit le jour et démarre. Il est également important de rappeler que l’AFD a noué un partenariat privilégié avec la CDC, spécifiquement sur cet axe d’accompagnement des start-up.

En 2018, lorsque le président Macron est venu en Tunisie, il a annoncé une initiative de 50 millions d’euros en faveur de la jeunesse, de l’entrepreneuriat et du numérique en Tunisie. C’est dans le cadre de cette initiative que l’AFD a mobilisé 10 millions d’euros de dons de l’Etat français pour accompagner l’écosystème des start-up avec deux projets. Un premier projet qui s’appelle «Enlien» et qui est quasiment achevé. Il a été réalisé avec la CDC, moyennant une subvention de 5 millions d’euros et a permis d’accompagner plusieurs incubateurs, accélérateurs et, donc, de financer directement des start-up. L’année dernière, dans la continuité d’Enlien (qui a très bien fonctionné), nous avons décidé de poursuivre cette initiative avec un programme qui s’appelle «Fast». C’est un programme d’accompagnement et de financement de l’écosystème, mais avec une spécificité, puisqu’il a pour objectif principal de favoriser les initiatives entrepreneuriales portées par des femmes et en régions. Ce projet est doté d’une enveloppe de 5,5 millions d’euros. Les trois appels à projet viennent de sortir et nous aurons, bientôt, l’occasion d’annoncer les lauréats des deuxième et troisième appels à projet, puisque les lauréats du 1er appel à projet ont été annoncés, il y a quelques jours.

Le gouvernement est actuellement en train de préparer le plan de développement 2023-2025, et la Tunisie mise d’une manière générale sur la transition digitale, écologique… Est-ce qu’il y a des projets qui visent à appuyer la Tunisie dans ces transitions économiques ?

L’AFD a toujours souhaité se mettre sur les mêmes pas de ton que les plans de développement de la Tunisie. Lorsque la Tunisie a adopté le plan quinquennal 2016-2020, l’AFD a adopté son cadre d’intervention pays, c’est-à-dire sa stratégie pour la Tunisie pour la période 2016-2020, avec des priorités qui étaient convergentes. Le plan triennal est en cours d’élaboration, les autorités tunisiennes l’annoncent pour cet été. Sachez que l’AFD est également en train de préparer une nouvelle stratégie Tunisie, qui sera annoncée au cours du dernier trimestre de cette année. Nous sommes en contact régulier avec les autorités tunisiennes pour nous assurer que la stratégie que nous préparons est en réponse aux attentes tunisiennes, c’est-à-dire en cohérence avec les priorités stratégiques de l’Etat tunisien, mais, aussi, là où nous sommes attendus par les autorités en matière de financement de projets. Evidemment, la stratégie de l’AFD en Tunisie découle du cadre stratégique du groupe AFD, notamment de notre stratégie pour l’Afrique du Nord, qui a été adoptée en 2020. Sans dire exactement ce que sera notre stratégie, puisqu’elle n’est pas adoptée, nous savons qu’il y a des attentes fortes de la part des autorités tunisiennes pour que l’AFD travaille sur les questions du développement du capital humain, de l’employabilité et de l’entrepreneuriat. Il y a, également, des attentes fortes de l’Etat tunisien pour que l’AFD travaille sur des projets d’amélioration de la qualité de la vie et du renforcement du lien social. Il y a, ensuite, à mon sens, deux autres axes stratégiques sur lesquels il va falloir que l’AFD continue de s’ investir en Tunisie, à savoir l’amélioration de l’efficacité de l’action publique et celle des acteurs économiques et financiers. Et puis, un dernier axe, qui devient un enjeu au niveau global, mais dans lequel les autorités tunisiennes nous disent souhaiter s’investir davantage, c’est celui de l’atténuation du changement climatique et l’adaptation à ces effets.

Je pense évidemment que nous avons des projets sur ces sujets. Je ne souhaite pas vraiment être spécifique là-dessus, parce que ce sont des projets qui sont en cours de construction avec nos partenaires tunisiens et sur lesquels nous allons aboutir dans les prochains mois, en fonction des demandes des autorités tunisiennes. Il faut savoir que nous ne finançons que des projets sur lesquels il y a une demande spécifique et formelle de la part des autorités. Nous recevons des requêtes de financement et, donc, nous sommes en discussion avec les autorités sur ces requêtes et nous commençons à avoir un petit peu de visibilité.

Je peux vous dire, par exemple, que l’un des projets qui nous tient vraiment à cœur est un projet de résilience des écosystèmes agropastoraux face au changement climatique dans les gouvernorats du sud de la Tunisie. C’est un projet qu’on prépare depuis plusieurs mois et pour lequel il y a un réel intérêt de la part des autorités tunisiennes et j’espère qu’il pourra être engagé dans les prochains mois.

Où en est-on par rapport au projet de modélisation des conséquences économiques du changement climatique sur lequel s’est penchée l’AFD avec ses partenaires tunisiens ?

Effectivement, ce projet s’inscrit dans le cadre d’un mémorandum de dialogue stratégique qui a été conclu entre l’Etat tunisien et l’AFD. Un des trois axes de ce mémorandum de dialogue stratégique était celui de l’analyse économique de l’impact du changement climatique. C’est un modèle qui a été élaboré par un ancien collègue de l’AFD et qui s’appelle «Modèle Gemmes». Nous avons mené avec l’Institut tunisien de la compétitivité et des études quantitatives (Itceq) tout un travail pour arriver aux conclusions qui seront dévoilées, lors d’un événement qui se tiendra le 28 juin à la Cité des sciences, et qui est un événement de célébration du 30e anniversaire de l’AFD en Tunisie. Une des sessions de cette conférence va être dédiée à la discussion et à la présentation des résultats de ce modèle. Nous sommes dans la finalisation des travaux et les jours qui restent pour arriver à ces données sont importants. Je n’ai pas, à ce stade, les conclusions définitives de ce travail de modélisation. Néanmoins, le ministre de l’Economie et de la Planification a montré énormément d’intérêt pour ces travaux, et notre objectif n’est pas de s’arrêter au stade de l’étude et de l’analyse, mais d’accompagner, ensuite, les autorités tunisiennes dans leur volonté d’utiliser ces résultats pour avoir des actions concrètes permettant de mitiger l’impact de ce changement climatique sur, notamment, la perte au niveau de la production agricole en Tunisie.

On aimerait avoir plus de détails sur les projets phares structurants qui sont, actuellement, en cours de réalisation…

Les projets structurants, c’est un petit peu de ce que j’ai énuméré tout à l’heure. Si on réfléchit de façon sectorielle, l’AFD appuie beaucoup sur les projets d’eau et d’assainissement. Dans ce cadre, l’un de nos projets phares est le financement du 5e Programme national d’assainissement des quartiers populaires mis en œuvre par l’Onas. Nous avons également, un projet très important avec la Sonede qui est celui de la construction de la station de Béjaoua pour améliorer l’accès à l’eau potable dans le Grand-Tunis. Vous le savez, la Tunisie est un pays qui souffre d’un stress hydrique important, et si nous souhaitons éviter les pénuries d’eau en Tunisie, dans quelques années, il est très important que nous travaillons sur l’accès à l’eau potable et, donc, la construction d’infrastructures, comme la station de Béjaoua. Nous avons également un projet très important, qui est la construction du campus de l’Ecole nationale des ingénieurs de Bizerte. Nous espérons que les étudiants pourront, dès la rentrée 2022, être dans ce campus magnifique. Moi, je m’y suis rendu pour aller superviser les travaux récemment, et c’est un très beau campus qui offrira un cadre d’étude exceptionnel pour les futurs ingénieurs tunisiens.

Nous avons également signé, tout récemment, une convention de dons de 4,5 millions d’euros, en faveur du ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle pour la création de deux écoles de la nouvelle chance pour les décrocheurs âgés entre 18 et 30 ans. Le projet va démarrer avant la fin de l’année 2022 et sera mis en œuvre par une organisation de la société civile qui s’appelle «Iecd». Nous avons aussi des projets structurants phares dans le domaine des transports urbains durables du Grand-Tunis. Il s’agit d’un projet connu de tous qui s’appelle le RFR qui, nous l’espérons, sera mis en service commercial dans les prochains mois. Aujourd’hui, les travaux sont quasiment finalisés. J’ai eu l’occasion, la semaine dernière, en présence de notre directeur exécutif, de tester la rame et l’intégralité du parcours de la ligne «E» du RFR. Il ne reste, aujourd’hui, que peu d’étapes à finaliser avant la mise en service de cette ligne qui va permettre à des populations, dans des zones moins privilégiées du Grand-Tunis, d’accéder plus facilement aux opportunités économiques du cœur de la capitale. Et puis, dans un avenir un peu éloigné, nous espérons que la ligne «D» du RFR entrera, également, en service.

Nous travaillons, également, sur des projets de développement urbain, notre partenaire, l’Arru, est en train d’exécuter le 2e Programme de réhabilitation des quartiers d’habitation populaires, à savoir le projet Proville 2 qui va permettre d’améliorer les conditions de vie de plusieurs centaines de milliers d’habitants qui vivent dans ces quartiers. J’ai parlé des projets «Fast» et «Enlien» en faveur de l’entrepreneuriat et de l’écosystème. Ce sont aussi des projets phares dans l’action de l’AFD.

Il y a, par ailleurs, un projet très important qui est celui de l’accompagnement des réformes du gouvernement tunisien. L’AFD est plus spécifiquement engagée, aux côtés du gouvernement, dans la réforme de la gouvernance des entreprises publiques. A ce titre, nous finançons l’assistance technique pour aider les autorités à changer le cadre réglementaire de la gouvernance des entreprises publiques. Ce qui permettra, nous l’espérons, d’améliorer leur efficacité, la santé financière ainsi que la qualité des services qu’elles apportent aux citoyens. Tout cela en pesant un peu moins qu’aujourd’hui sur les finances publiques. Un texte de loi est en préparation. Il devrait être publié dans les semaines à venir pour amender ce qu’on appelle la loi 80-9-9.

Sur quoi misera l’AFD en Tunisie?

D’abord, nous misons sur la Tunisie. C’est un pays privilégié, en termes de partenariat avec l’AFD, en raison tout simplement du partenariat privilégié entre la France et la Tunisie. A partir de là, il est clair qu’elle restera un pays très important pour l’AFD en matière d’engagement. Nous misons également sur les Tunisiennes et les Tunisiens. C’est un pays avec énormément d’atouts et d’avantages qui sont régulièrement rappelés, et il est inutile de refaire toute la liste des avantages, que ce soit géographique ou en termes de capital humain…, mais le plus important pour nous, c’est de miser sur les Tunisiennes et les Tunisiens, et puis finalement nous misons sur nos partenaires.

L’AFD construit des projets avec des partenaires qui les mettent ensuite en œuvre. Et donc, nous misons sur nos partenaires. C’est-à-dire en premier lieu, le ministère de l’Economie et de la Planification, mais également toutes les entreprises publiques, tous les ministères, toutes les institutions avec lesquelles nous travaillons en Tunisie. Ce sont vraiment nos partenaires privilégiés. Ce sont leurs projets que nous finançons, que nous appuyons, que nous soutenons.

Le mot de la fin ?

Mes premières pensées vont à nos équipes et à nos partenaires. Nous sommes quasiment une centaine de personnes qui travaillons en Tunsie, entre l’agence, Expertise France (70 personnes) et Proparco. Ce sont des équipes extraordinaires, très engagées au quotidien, au plus près de nos partenaires tunisiens pour avoir des impacts positifs sur le développement économique, social et environnemental du pays.

Ensuite, j’ai envie de dire que l’AFD continuera à œuvrer au renforcement de la stabilité du pays, et va s’engager très fortement pour soutenir la mise en place des conditions de la reprise économique dans la période à venir, parce que c’est la volonté de nos partenaires tunisiens, et parce que c’est la volonté de l’Etat français qui nous demande de le faire. Mon mot de la fin, c’est l’espoir que les projets financés par les bailleurs de fonds de façon générale puissent être exécutés de manière plus rapide. Nous avons, depuis quelques années, observé des délais plus importants que ce qui est normal, en matière d’exécution de projets. Lorsque nous anticipons qu’un projet va être exécuté sur cinq ans, il l’est sur sept ou huit ans. Et cela représente un coût d’opportunité très important pour la Tunisie parce que c’est un coût financier et c’est un coût d’opportunité. Lorsque les projets prennent plus de temps, c’est moins d’emplois qui sont créés rapidement, moins d’impact sur la croissance et sur le développement. Donc, nous espérons vraiment que les autorités, qui ont dit souhaiter s’engager dans cette voie, puissent mettre en œuvre l’ensemble des mesures nécessaires pour que des projets financés par les bailleurs de fonds soient exécutés plus rapidement. Il en va de la crédibilité de notre action et de l’Impact sur les Tunisiennes et les Tunisiens.

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