
Dans un contexte mondial instable caractérisé par de multiples crises économiques et politiques, la Tunisie s’engage à préserver la sécurité alimentaire qui figure aujourd’hui parmi les priorités de l’exécutif. Sa réactivité est opportune lorsqu’on sait que, depuis le début de la guerre en Ukraine, les actions se multiplient pour stabiliser la situation du marché de l’alimentation et des approvisionnements ainsi que la disponibilité des matières stratégiques et les prévisions de production des matières agricoles essentielles , notamment les céréales, et ce, sur un arrière- fond de crise alimentaire mondiale qui se profile à courte échéance.
Sur ce point d’actualité qui fait écho, vient la décision du Président de la République, Kaïs Saïed, qui a donné récemment son accord pour un prêt finançant l’importation de céréales. Un décret présidentiel est paru, à cet effet, portant ratification de l’accord de garantie conclu le 11 août 2022 entre la République tunisienne et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd). Ce décret est relatif au prêt accordé à l’Office des céréales pour la contribution au financement du projet de la réponse à la résilience de la sécurité alimentaire. Le prêt est d’un montant de 150,5 millions d’euros qui sera accordé afin de financer les importations de blé tendre, de blé dur et d’orge, représentant jusqu’à 15% des besoins de consommation annuels de la Tunisie. L’institution financière internationale devait préciser, en effet, que « la guerre contre l’Ukraine a fortement réduit la capacité du pays à exporter des céréales et provoqué des ruptures d’approvisionnement en céréales dans le monde, ainsi que la flambée des cours mondiaux des produits de base, qui ont affecté directement les pays du sud et de l’est de la Méditerranée, dont certains comptent parmi les principaux importateurs mondiaux de céréales ». Une décision indispensable au regard du dernier rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) qui alerte sur la forte probabilité d’une aggravation d’ampleur inédite de la famine dans le monde. La FAO parle, en effet, de 8 à 13 millions de personnes supplémentaires qui pourraient souffrir de la faim dans le monde. L’organisation onusienne rapporte dans son étude que 26 pays seront directement impactés par la guerre en Ukraine, dont l’une des conséquences est le blocage de nombreux ports de ce pays. Les régions qui souffriront le plus d’un déficit de 50% de leur approvisionnement en céréales seront l’Asie-Pacifique, l’Afrique subsaharienne, le Proche-Orient et l’Afrique du Nord. C’est dire donc que la Tunisie, à l’instar des autres pays du monde, pourrait affronter le risque de pénurie de ces produits dans les mois à venir. Les alertes inquiétantes de la FAO sont visiblement prises au sérieux.
La sécurité alimentaire est le grand enjeu du moment. La crise ukrainienne a mis à nu les failles du système alimentaire à travers le monde. La situation que traverse actuellement le monde nous montre qu’il est nécessaire de changer notre politique envers la production nationale, faire face aux tensions sur les produits alimentaires de première nécessité pour couvrir les besoins alimentaires. Cela doit nous faire réfléchir sérieusement à l’avenir afin d’opter pour un nouveau paradigme qui nous mènera vers une nouvelle politique de production. Nous devons aussi nous appuyer sur nos ressources humaines et nos compétences pour assurer notre autosuffisance en produits agricoles.