Fiction climatique : L’imaginaire africain au service de la lutte contre le changement climatique

 

La compétition se veut, d’après ses organisateurs, une réponse créative au changement climatique qui pourrait contribuer à une prise de conscience et faire progresser de manière significative l’objectif de développement durable 13.

Les formes de mobilisation des consciences face à la crise climatique dans le monde se multiplient, à la recherche toujours d’un effet plus percutant, à même de faire bouger davantage la situation sur le terrain.

Une mue s’opère vers la science-fiction et vers de nouveaux genres littéraires pour sensibiliser et alerter sur les changements climatiques qui ravagent des régions entières dans le monde. En Afrique, cette transition est lente, mais elle est déjà là. Le concours «Africa Climate Fiction Award» a été lancé dans cette optique. Ses prix ont été remis aux lauréats le 28 décembre dernier.

Lancé le 6 juillet 2022, par l’ONG Botswana Society for Human developement (Société botswanaise pour le développement humain), ce projet créé, au départ, en prévision de la COP 27, se veut une nouvelle manière d’impliquer la jeunesse de l’Afrique dans la question de lutte contre les changements climatiques.

L’Afrique est la région qui contribue le moins aux émissions de gaz à effet de serre (environ 4% des émissions globales), selon le récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec). Elle compte, cependant, parmi les régions les plus touchées par les impacts du dérèglement climatique.

«Nous voulions contribuer au dialogue de cette manière originale, car la fiction climatique est encore un nouveau genre. Je suppose que nous étions enthousiastes à l’idée que le Sommet mondial sur le climat «COP» se déroule en Afrique et nous voulions que l’Afrique raconte ses histoires. Grâce à notre collaboration avec des organisations internationales telles que Co-Futures, nous avons pensé à rendre le concours mondial à l’avenir», a déclaré à l’agence TAP la présidente de l’ONG, «Botswana Society For Human Development, (Société botswanaise pour le développement humain), Sharon Tshipa.

«Ce n’était pas facile d’obtenir du soutien pour un tel projet, nous avons beaucoup lutté. Le fait d’avoir des partenaires, tels que Publiko, Co-Futures, Poseidon et Sustain 267, nous a beaucoup soulagés», ajoute la responsable interrogée à distance.

Quand l’arbre contribue au débat…

D’après elle, il s’agit d’une compétition ‘’centrée sur le développement humain’’. «Lorsque nous avons envisagé ce projet, nous espérions que les histoires écrites inspireraient le dialogue sur le climat sur le continent, sensibiliseraient des publics d’une autre manière que d’autres formes de communication n’atteignent pas habituellement, donneraient aux écrivains sur le climat une chance d’envisager l’avenir, inspireraient, (nous l’espérons), un mouvement climatique sur le continent qui pourrait influencer les politiques et documenteraient nos propres histoires en tant qu’Afrique».

Tshipa, qui est également auteure de fictions, a déclaré avoir conscience du «pouvoir qu’ont les histoires pour changer les mentalités». «J’ai pensé que l’utilisation de récits de fiction serait une idée unique pour raconter l’histoire que nous voyons et entendons tous les jours dans les médias locaux et internationaux».

La compétition se veut, d’après ses organisateurs, une réponse créative au changement climatique qui pourrait contribuer à une prise de conscience et faire progresser de manière significative l’objectif de développement durable 13, lequel stipule le renforcement de la résilience et la capacité d’adaptation des pays face aux aléas et catastrophes climatiques.

Le premier prix de l’Africa Climate Fiction Award 2022 a été décerné à la Botswanaise Motswana Miranda qui a, fait parler un arbre pour raconter les atrocités que font subir les hommes à la nature. Son histoire «And Then The Humans Came» (Et ensuite les humains sont arrivés) est un fantastique récit raconté par un arbre pour répondre à la question «si les arbres parlent, qu’est-ce qu’ils diraient des humains?.

Le deuxième prix a été attribué à «River of death» (Rivière de la mort), fiction de Motswana Thuto Vanessa Seabe (Botswana) qui raconte la galère que vit une communauté voisine de la rivière Thamalakane à Maun au Botswana à cause de la sécheresse et la menace de faim, qui conduit jusqu’à l’abattage d’un éléphant pour consommer sa viande.

Le troisième à «The hummingbird» (Colibris) du Kenyan Alexander Nderitu et le quatrième prix a été attribué à la fiction, «When graves wail» (Quand les tombes parlent), du Zambien Kaluwe Haangala.

En effet, la fiction climatique, qui est un sous-genre de la science-fiction trace un lien direct entre les activités humaines et les changements climatiques, dans l’objectif de sensibiliser les humains à l’aide de récits généralement apocalyptiques, dénonçant la surexploitation de la nature et l’absence de réaction adaptée face aux changements climatiques.

Les changements climatiques inspirent aussi le cinéma

En Afrique, la question du changement climatique est encore peu abordée par les fictions cinématographiques mais très présente dans les documentaires alors qu’à l’échelle internationale, le climat est désormais omniprésent dans tous les débats qu’ils soient politique, économique, social ou culturel. Des producteurs, acteurs et réalisateurs de renommée internationale se forgent aujourd’hui une réputation de défenseurs et défenseuses de l’environnement à travers des œuvres qui anticipent le chaos à travers la science-fiction et attirent les cinéphiles.

Parmi les films de science-fiction qui ont averti au danger guettant l’humanité à cause des abus envers la nature, figure «Le Jour d’après», sorti en 2004, lequel raconte ce qui se passerait en cas d’arrêt du Gulf Stream : tempêtes, inondations, transformation de l’eau en banquise.

Il s’agit, également, de «Don’t Look Up» qui raconte l’histoire de deux astronomes en tournée médiatique pour prévenir l’humanité qu’une comète se dirige vers la Terre et s’apprête à la détruire.

«Waterworld» aussi plonge le spectateur dans un futur où de rares survivants vivent sur des atolls artificiels et rêvent d’une contrée mythique recouverte de vastes forêts et de profondes vallées, à la suite d’une catastrophe écologique faisant que la Terre soit recouverte par les océans.

Bien qu’elle se situe dans un futur lointain, la montée des eaux est un phénomène d’actualité. Selon le Giec, le niveau de la mer pourrait gagner jusqu’à un mètre d’ici 2100. A cet égard, des films tels que «Hell» avertissent sur la hausse des températures, ou encore le film «Mad Max: Fury Road», qui anticipe un futur post-apocalyptique et une pénurie d’eau donnant lieu à une violente guerre de gangs. Avec le concours «Africa Climate Fiction Award», des Africains empruntent le même chemin.

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