Banque Mondiale | Système des subventions énergétiques : Un processus incomplet…

 

Les gouvernements successifs ont tenté de réformer le système des subventions énergétiques, mais les réformes ont été incomplètes et les subventions sont persistantes jusqu’à présent. Par exemple, après la révolution de 2011, le gouvernement tunisien en place a suspendu son mécanisme d’ajustement automatique des carburants dans le but de freiner toute nouvelle hausse des prix des carburants. Par la suite, les prix des carburants n’ont été augmentés qu’occasionnellement jusqu’à ce qu’une nouvelle formule automatique des prix des carburants soit introduite en 2014. Cette formule n’a toutefois pas été pleinement mise en œuvre, et une autre formule a été établie en 2016 pour assurer des ajustements mensuels des prix, mais elle n’a jamais été systématiquement appliquée.

Même en 2022, une année marquée par de fortes hausses du prix du pétrole, le gouvernement n’a ajusté les prix des carburants que quatre fois, de sorte que le prix à la consommation a augmenté beaucoup moins que le prix international. Le gouvernement n’a pas mis en place de mécanisme d’ajustement automatique pour l’électricité et le gaz, sauf pour le secteur du ciment, dont les prix ne sont plus subventionnés depuis 2014.

Globalement, il y a eu de longues périodes sans ajustement des tarifs (par exemple, entre juin 2019 et mai 2022) malgré les augmentations des coûts. En 2022, le gouvernement a finalement augmenté les prix de l’électricité et du gaz pour les ménages les plus gourmands en consommation d’énergie (au-dessus de 200 kWh pour l’électricité et de 30 m3 pour le gaz). Ceux-ci couvrent environ 15% des ménages pour l’électricité et 33% pour le gaz. Pour les catégories à forte consommation, les subventions ont été considérablement réduites. Le gouvernement a également légèrement augmenté le prix du GPL, qui reste toutefois fortement subventionné.

Face à cette situation, le rapport estime que la réforme des subventions à l’énergie peut contribuer à résoudre la crise macro-budgétaire, à améliorer la viabilité financière des entreprises d’Etat et à stimuler la transition verte, mais la réforme doit minimiser les impacts sur les catégories vulnérables. En effet, la suppression progressive des subventions à l’énergie est nécessaire compte tenu des contraintes macroéconomiques strictes de l’économie. Il s’agit d’ailleurs d’une réforme centrale dans le programme que le gouvernement a négocié avec le FMI. La réforme doit cependant être conçue avec prudence car elle pourrait avoir un important impact négatif sur les ménages les plus pauvres.

Hormis les subventions aux carburants, qui profitent principalement aux ménages les plus aisés, les autres subventions à l’énergie profitent également aux ménages à faibles revenus. Après la réforme des prix de 2022, les subventions à l’électricité et au gaz profitent principalement aux 80% les plus pauvres de la population. Les subventions pour le GPL sont réparties de manière à peu près égale dans la distribution des revenus, bien qu’il y ait des fuites vers les utilisateurs commerciaux tels que les taxis et les restaurants. Pour minimiser l’impact de la réforme sur les catégories les plus vulnérables, une combinaison de hausse de tarifs et de distribution de transfert cash pourrait être envisagée. Plus précisément, pour le GPL, des transferts ciblés pourraient compenser les ménages les plus pauvres pour la perte des subventions et les aider à faire la transition vers un système différent—par exemple, le gaz naturel lorsqu’il est disponible. Pour l’électricité et le gaz, une option consiste à maintenir des tarifs plus bas pour les consommateurs les plus modestes (la «tranche sociale»), étant donné la relation étroite entre la consommation d’énergie et le revenu.

Accompagner les réformes des subventions de programmes visant à aider les entreprises et les ménages à investir dans l’efficacité énergétique et l’autoproduction peut contribuer à maîtriser la pression inflationniste, à maintenir la compétitivité des entreprises et à soutenir la transition verte. Les programmes gouvernementaux visant à stimuler l’autoproduction d’électricité par les ménages pourraient contribuer à absorber les effets de la suppression progressive des subventions à l’électricité. Parmi ces programmes, on peut citer le Prosol Elec (pour les ménages consommant plus de 1.800 kWh/an), le Prosol Elec économique (entre 1.200 et 1.800 kWh/ an) et social (moins de 1.200 kWh/an). De même, les mesures visant à encourager l’efficacité énergétique, telles que la certification des appareils ménagers, l’éclairage avec des lampes LED, l’isolation des toits des bâtiments, pourraient contribuer à absorber l’impact de l’augmentation des prix de l’énergie.

Au niveau des entreprises, diverses mesures pourraient contribuer à augmenter l’efficacité énergétique et l’autoproduction, telles que : offrir plus de flexibilité et de transparence aux entreprises pour vendre les «excédents d’électricité» au réseau ; simplifier les procédures et les processus d’autorisation pour l’autoproduction ; permettre la création de consortiums d’entreprises pour optimiser les projets d’autoproduction ; établir un régulateur d’électricité indépendant qui puisse jouer le rôle de superviseur (y compris sur la fixation des tarifs) et d’arbitre.

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