L’Europe, qui mise beaucoup sur l’hydrogène vert en tant que vecteur d’énergie propre, vise à en importer 10 millions de tonnes d’ici 2030 et 40 millions de tonnes d’ici 2050. Pour la Tunisie, le potentiel d’exportation dans cette filière naissante est à soupeser.
L’hydrogène vert est une filière émergente qui suscite, aujourd’hui, beaucoup de réflexions dans plusieurs pays, surtout en Europe. Connu pour être un vecteur d’énergie propre, l’hydrogène vert peut être utilisé dans plusieurs secteurs, notamment l’industrie (par exemple, dans la production de l’ammoniaque), le transport (comme une source d’énergie pour les avions et navires à hydrogène) et l’énergie (pour augmenter la flexibilité du système électrique via le stockage). La filière est aujourd’hui au centre des débats sur l’environnement, parce qu’elle est considérée comme une solution alternative permettant de contribuer à la réduction des émissions des gaz à effet de serre et d’atteindre la neutralité carbone. Ainsi, dans ce contexte mondial où la demande en hydrogène devrait croître dans les prochaines années, la Tunisie s’est penchée sur une stratégie de développement de la filière.
Quel est le potentiel de la Tunisie en matière d’hydrogène vert ? Quelles sont les perspectives liées à cette filière ? Quels sont les marchés porteurs et cibles ? Dans l’optique d’apporter des éléments de réponse à ces questions, l’Institut arabe des chefs d’entreprise (Iace) a consacré tout un débat sur la thématique qui a été organisé, en partenariat avec la Fondation Friedrich Naumann, à l’occasion de la tenue de ses rencontres mensuelles.
La proximité avec l’Europe, principal atout
Évoquant les atouts de la Tunisie en tant que producteur potentiel d’hydrogène vert, Amel Miled, ingénieur docteur en génie énergétique à l’Anme, a, en somme, fait savoir que la Tunisie peut se positionner sur ce marché et être un des principaux fournisseurs de l’Europe. Selon les données mentionnées par la panéliste, l’hydrogène vert représentera, d’ici 2050, 18% des besoins globaux en énergie dans le monde. Même si le marché de l’hydrogène et ses dérivés demeure, à ce jour, infiniment réduit, la demande de ce type d’énergie va connaître une croissance continuelle, au cours des prochaines décennies.
L’Europe, à elle seule, vise à importer 10 millions de tonnes d’hydrogène vert d’ici 2030 et 40 millions de tonnes d’ici 2050. Il s’agit d’un des principaux marchés porteurs que la Tunisie peut cibler en tant que pays exportateur. A titre d’exemple, la stratégie de l’Allemagne qui vise à atteindre une capacité de production d’hydrogène de 5 GW, d’ici 2040, est largement fondée sur le développement de la production d’hydrogène à l’extérieur du pays. En ce sens, la production d’hydrogène vert en Tunisie tient son importance du potentiel d’exportation dans cette filière naissante.
En effet, outre la proximité avec l’Europe, la Tunisie dispose d’un autre atout, celui des énergies renouvelables. Avec un objectif de 35% d’énergies renouvelables dans le mix énergétique d’ici 2030, la Tunisie peut se positionner sur cette chaîne de valeur. La rentabilité de l’hydrogène vert devrait s’améliorer, à mesure que le pays avance vers cet objectif et peut même dépasser celle du gaz naturel avec 2 ou 3 euros par kilogramme à l’horizon 2035. De plus, le transport de l’hydrogène vert vers l’Europe peut être facilité grâce aux gazoducs connectés à l’Italie.
«Il faut noter que le prix de l’hydrogène dépend des énergies renouvelables à partir desquelles il est produit mais aussi des zones où il est fabriqué. Par exemple, l’hydrogène produit à partir du photovoltaïque est moins cher que celui généré par l’éolien. Aussi, selon certaines études, le prix de l’hydrogène va diminuer à partir de 2025», a-t-elle précisé dans une déclaration accordée à La Presse.
Les énergies renouvelables avant !
Slim Zeghal, membre du bureau directeur de l’Iace, porte un autre regard sur la question. Il estime que, de nos jours, la priorité absolue doit être accordée à la production des énergies renouvelables, avant d’entamer des réflexions sur le développement de la filière hydrogène vert en Tunisie. «Je pense que ce qui est prioritaire dans l’hydrogène vert c’est le mot vert parce qu’aujourd’hui nous ne produisons pas suffisamment d’énergies renouvelables. Notre production d’électricité verte ne dépasse pas 3% alors que nous nous sommes engagés à atteindre 30% d’énergies propres dans le mix énergétique à horizon 2030. Aujourd’hui, il y a donc un effort important à réaliser en termes d’investissements pour produire des énergies de sources renouvelables», a-t-il poursuivi.
Il a ajouté que l’hydrogène vert, étant un moyen de stockage, de transport ou un élément utilisable dans des procédés chimiques, comme pour la production de l’ammoniaque ou du méthanol, n’est pas de l’énergie verte à proprement parler. « C’est une étape supplémentaire qui pourrait être utile pour l’exportation. Il est vrai que l’hydrogène peut être exporté vers l’Europe, à travers un câble sous-marin ou en l’injectant dans le pipeline existant. Cela peut être un moyen de stockage mais, là aussi, il faut comparer l’économie d’un stockage hydrogène avec un stockage par batterie ou des stockages hydrauliques. Tout cela s’étudie, il y a des opportunités, sans doute, de la demande aussi, mais il faut prendre en considération que le coût de production de l’hydrogène vert reste élevé et l’électrolyse nécessite aussi de l’eau potable qu’il va falloir produire par dessalement de l’eau de mer », a-t-il indiqué.
Anne Gestin
25 mai 2023 à 19:05
Soyez sérieux et arrêtez de rêver : il n’y a pas d’eau en quantité suffisante pour satisfaire les besoins de la population, alors pour produire de l’hydrogène….Si on ajoute un investissement de 25 milliards de dollars autant dire que cet article est risible!