Accueil Société «Villes tunisiennes résilientes» : Vers des plans climat territoriaux

«Villes tunisiennes résilientes» : Vers des plans climat territoriaux

 

Ce projet avance à grands pas, tandis que la campagne de sensibilisation gagne du terrain. Son maître d’œuvre et l’équipe dirigeante ont fini par élaborer un policy brief, mettant en avant l’utilité d’une planification climatique locale à l’échelle du pays.

Vagues de chaleur extrêmes, épisodes de sécheresse et feux de forêts tout au long de l’été, ce sont bien les prémices d’un réchauffement climatique qui commençe déjà à nous montrer ses griffes. Et ça va chauffer encore plus ! D’où il urge, dès lors, d’agir à l’unisson, non pas pour stopper ses effets, mais du moins s’y adapter. Afin d’y arriver, il faudrait tout planifier.

Dix localités retenues

Ainsi, faut-il se rendre à l’évidence qu’en dehors d’une stratégie de lutte réfléchie visionnaire et pragmatique, on n’aura pas d’autres choix face aux aléas du climat. Penser global, agir local, c’est bien le mot d’ordre universel. En d’autres termes, un vrai plan climat local (PCL) qui s’applique à grande échelle. Ceci a dû trouver sa pleine signification dans le projet «Villes tunisiennes résilientes », lancé fin 2021 et qui s’étendra jusqu’à novembre prochain et piloté par « Tunisian Youth Impact (TYI)», une jeune association créée il y a à peine 5 ans. Depuis, elle s’invite à ce grand débat sur le climat. Mais elle a, aussi, fait du terrain, tâté le pouls, sondé les opinions et sensibilisé sur la portée d’une planification climatique locale dans les régions. Elle est au même niveau que tout plan d’aménagement du territoire et d’urbanisation.

A quoi s’en tient, d’ailleurs, ledit projet qui a déjà opté pour dix localités dans cinq gouvernorats du pays : Radès et Mhamdia à Ben Arous, Maâgoula et Zahrat Madiane à Béja, Jendouba et Tabarka relevant de Jendouba, Le Kef et Nebeur au Kef, ainsi que Machrak Echams et Télepte à Kasserine qui ont été retenues comme zones d‘intervention pilotes. Soit un terrain d’essai, où le plan climat local peut être transposable, à quelques différences près. Ceci est vrai dans la mesure où toute région ou localité se dote des conditions climatiques intrinsèques. Touchant à sa fin, ce projet « Villes tunisiennes durables » a pu faire un carton. « Il a abouti à la réalisation, d’une manière participative, de dix plans climat locaux dans les cinq gouvernorats précités », nous indique, fière, sa cheffe Khouloud Hamrouni. Et là, l’appui de l’ONG hollandaise « Hivos », dans toutes les phases d’exécution, n’est plus à démontrer.

Pour une loi climat locale

Ainsi, bien soutenue, Mme Hamrouni s’est livrée à des initiatives de plaidoyer en faveur des localités, mobilisant leurs habitants autour d’un nouveau défi du développement nommé climat. Avec, en toile de fond, l’ancrage de la justice climatique dans nos villes et cités les plus vulnérables, où toute la communauté et les acteurs clés sont appelés à  mettre du leur. Atténuation et adaptation aux caprices du climat sont les deux maîtres-mots, rimant avec tout plan d’action résistant. Voire la clé de voûte de notre CDN, Contribution déterminée nationale, perçue comme une feuille de route servant à réduire les émissions de gaz à effet de serre et maintenir les températures à des degrés inférieurs. D’autant plus que l’objectif du plaidoyer concerné puise dans les mêmes recommandations de la CDN tunisienne : «Promouvoir un pays résilient censé atténuer les vulnérabilités et renforcer les capacités d’adaptation de ses écosystèmes, de sa population, de son économie, de ses territoires, à même d’assurer un modèle de développement socioéconomique inclusif et durable ». C’est dans cette logique que s’inscrit le plan climat local, largement défendu par l’association TYI.

En avançant, ce projet a fait son chemin et la campagne de sensibilisation gagne encore du terrain. Son maître d’œuvre, Mme Hamrouni, et l’équipe dirigeante ont fini par élaborer un policy brief, y mettant en avant l’utilité d’une planification climatique locale à l’échelle du pays. Pourquoi un plan climat local ? Ceci étant, pour plusieurs raisons : mieux s’adapter aux impacts du changement climatique, réduire les risques de catastrophes y liés et les émissions de gaz à effet de serre et permettre aux communes de bien gérer leurs ressources locales. Il va sans dire que tout doit se faire dans la dentelle, avec une participation citoyenne active et concertée. Ainsi, habitants et acteurs sociaux sont associés à la prise de décision dans la bonne gestion de l’environnement local. De ce fait, « ces plans climat locaux tiennent compte des contextes locaux, des ressources et priorités uniques de chaque région, à même d’apporter des solutions adaptées à la localité », argue ce policy brief, présenté en guise d’un document d’orientation politique. Ce qui aidera nos décideurs à faire évoluer l’idée. Surtout, juge-t-on, que la Tunisie dispose d’un cadre juridique et institutionnel favorable à l’élaboration d’une loi climat locale.

Que recommande l’association ?

Outre la constitution, la CDN, le code des collectivités locales, le tout récent code de l’environnement, le fameux accord de Paris, adopté en 2015 et ratifié par la Tunisie, deux ans après, rentre dans le cadre des engagements internationaux qu’on doit dûment honorer. A cela s’ajoute la stratégie nationale de développement neutre en carbone et résilient aux changements climatiques à l’horizon 2050. Alors, planifier ainsi son plan climat local, c’est de bonne guerre.

Et nullement une exception. La France, les Etats-Unis, le Canada, le Royaume-Uni et l’Allemagne, pour ne citer que ces pays, avaient déjà leurs propres PCL. Ils ont eu à planifier les soubassements des villes résilientes aux impacts climatiques.

Que recommande l’association « TYI »? Une loi sur la planification climatique locale en Tunisie s’avère de mise. En se référant aux mécanismes juridiques en place, et face aux menaces pesant sur notre mode de vie et de survie, les municipalités vont se trouver dans l’obligation de se soumettre aux diktats du climat. Parlons-en ainsi, l’appel fut, du moins, lancé à dix localités, lesquelles ont dû planifier leurs plans climat locaux. Et pour mener à bien son plaidoyer, la cheffe du projet, qui œuvre à reconstruire des villes résilientes et durables, n’a pas hésité à s’adresser à un nombre de nos députés représentant certaines localités-sites dudit projet, en l’occurrence celles de Radès et de Béja. Elle a sollicité leur appui pour accélérer l’adoption d’une loi climat locale. Voilà, l’essence d’un plaidoyer associatif visant à attirer l’attention de nos politiques sur la portée des villes beaucoup plus résistantes à ce perpétuel changement du climat.

Du reste, selon le rapport de la Banque mondiale, la Tunisie est fortement vulnérable au changement climatique. Elle pourrait subir les effets néfastes de l’augmentation des températures, de l’aggravation de l’aridité, du recul des précipitations et de l’élévation du niveau de la mer. Sans pour autant négliger les contrecoups sur la dégradation de ses écosystèmes et la pression exercée sur son agriculture.

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