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Focus : Les oasis tunisiennes face aux changements du climat

Dr Mohamed Ben Sakka, coordinateur central du projet Agire (Appui à la gestion intégrée des ressources en eau à GIZ Tunisie)

Véritable rempart contre la désertification, les oasis restent des lieux d’échange et de sédentarisation de la population. Ces écosystèmes riches en biodiversité végétale et animale offrent une panoplie de biens et services garantissant une relative stabilité socioéconomique et un développement de plusieurs activités telles qu’agricoles, pastorales, touristiques, artisanales et industrielles. Cette stabilité a été rendue possible, notamment grâce aux savoir-faire et aux pratiques développés par la population autochtone allant de la gestion des ressources en eau, aux systèmes de production, sans oublier les pratiques artisanales permettant de valoriser les produits oasiens qui offrent une panoplie de services écosystémiques nécessaires pour la sédentarisation des populations et leur bien-être. Bien que les oasis soient elles-mêmes une forme d’adaptation humaine au contexte déjà difficile d’aridité et d’hostilité des conditions climatiques, on constate que depuis quelques décennies, ces oasis subissent de plein fouet les effets inéluctables des changements climatiques et cela implique de force des politiques d’ajustement mettant en œuvre des stratégies d’atténuation et surtout d’adaptation pour leur durabilité. Ces stratégies doivent tenir compte du contexte particulier des oasis face aux mutations globales de ses écosystèmes, et incitent à suivre une démarche intégrée de développement territorial abordant à la fois les dimensions environnementale, économique, sociale et culturelle locale. Cette démarche de protection des écosystèmes et de la biodiversité oasiens impose des mécanismes de mobilisation et d’exploitation durable des ressources naturelles.
Malheureusement, ces oasis sont, aujourd’hui, soumises à une intensification de l’utilisation de l’eau et au pompage excessif à l’énergie solaire pour une irrigation fort supérieure aux besoins des cultures existantes menant à la surexploitation de nappes fossiles non renouvelables. Tout cela a pour conséquence la dégradation des sols déjà pauvres par lessivage entraînant leur salinisation et leurs érosions éolienne et hydrique. La surexploitation des nappes profondes qui font partie du Système aquifère du Sahara septentrional (SASS) partagé avec l’Algérie et la Libye s’est traduite par une régression des volumes exhaurés par artésianisme, la réduction des débits des forages et la baisse continue du niveau piézométrique.
La surexploitation irrationnelle des ressources en eau se traduit non seulement par la dégradation de la qualité des eaux surtout aux alentours du chott principal exutoire mais, aussi par le rehaussement des coûts de l’exhaure. Sur la base des rythmes de surexploitation observés, il est peu probable que ces nappes puissent dans l’avenir répondre à l’accroissement de la demande prévue pour les vingt prochaines années.
Les interactions entre un milieu déjà fragile, l’irrégularité des précipitations, la recrudescence des périodes de sècheresse, les oasis tunisiennes nécessitent une meilleure politique de préservation de leurs ressources naturelles.
Enfin, et dans un esprit de durabilité, la gestion de ces ressources naturelles et la conservation de la biodiversité végétale des écosystèmes oasiens doivent être appuyées par la recherche développement avec un accent particulier sur l’efficience et la valorisation de la ressource en eau, l’amélioration de la productivité agricole et la lutte contre les maladies et ravageurs.

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