Augmentation des honoraires médicaux : Médecins et patients dans un cercle vicieux

Les assurés de la Cnam affiliés au régime de remboursement des soins médicaux  — qui représentent le cinquième du total des assurés sociaux et bénéficient généralement d’une assurance maladie complémentaire — sont les plus concernés par cette hausse. Si bien que les médecins de libre pratique accusent la Cnam de ne pas respecter ses engagements passés.

La récente augmentation des honoraires des médecins de libre pratique a défrayé la chronique sur les médias et les réseaux sociaux. Alternant révolte et sarcasme, les commentaires des internautes abondent. Cette majoration décidée par le corps de la profession a pesé lourd comme une chape de plomb sur le citoyen qui, emporté par la vague d’exaspération et d’essoufflement marquant la conjoncture actuelle, s’est livré à une critique anticorporatiste. En réalité, cette décision n’a fait que ressusciter le débat sur le secteur de la santé, en remettant à plat les enjeux de la sécurité sociale en Tunisie, notamment l’assurance maladie qui va de pair avec le droit à la santé. En effet, depuis l’ouverture totale de la sécurité sociale sur les filières médicales privées, le remboursement des frais de soins n’est plus l’apanage des autorités publiques. D’autres intervenants, notamment les assureurs privés, se sont, de facto, imposés en tant qu’acteurs fondamentaux de la couverture sociale en l’occurrence, à travers l’assurance maladie complémentaire. Ainsi, le régime de remboursement des soins attire de plus en plus les assurés qui ne cessent de bouder les filières publiques (les hôpitaux) en raison d’une dégradation au niveau de la qualité des services publics. Et c’est cette tranche d’affiliés de la Cnam — qui représente en termes de nombre le cinquième de l’ensemble des assurés sociaux — qui est la plus concernée par cette hausse.

Les honoraires des médecins ne constituent que 20% des dépenses réelles de santé

«En vertu de l’accord conclu en 2007 entre les diverses parties prenantes, à savoir la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), l’Ordre des médecins et le Syndicat tunisien des médecins libéraux dans l’objectif de structurer le secteur, il a été établi que la révision des honoraires médicaux s’effectuera régulièrement dans le cadre d’une fourchette fixée par le corps de métier tous les 3 ans. Le problème est que, depuis, la Caisse n’a pas révisé sa fourchette à elle, c’est-à-dire les plafonds de remboursement des soins», a expliqué le secrétaire général du Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom), Dr Nezih Zghal.  Il a souligné, à cet égard, que les honoraires des médecins ne constituent que 20% du total des dépenses réelles dans le secteur de la santé, ajoutant qu’à l’instar de tous les secteurs, les services médicaux ainsi que les médicaments sont touchés par l’inflation. Il a également fait savoir que 40% de ces dépenses sont complètement à la charge des citoyens. «Ce taux est énorme. Ça ne fait que traduire la crise qui sévit dans le secteur de la santé. Cette augmentation devrait, en effet, inciter les autorités de tutelle, en l’occurrence le ministère de la Santé, à améliorer les services de l’hôpital public. Il est à noter que le fléau de l’émigration des médecins ne concerne plus les jeunes mais il touche également les médecins chevronnés», déplore Zghal. Qu’en est-il du côté de la Cnam ? Les réactions de certains responsables de la Caisse nationale de l’assurance maladie, dont son porte-parole, recueillies par des médias n’augurent aucune issue pour le moment dans la mesure où le déficit structurel de la Caisse ne cesse de se creuser, et que par conséquent celle-ci n’est pas en mesure de réviser les plafonds de remboursement existants, du moins sur le court terme.

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