Par Foued ALLANI
Coût faramineux pour des résultats piteux. Notre système d’éducation, de formation et d’enseignement, ou pour entrer de plain-pied dans le domaine des ressources humaines, de production des compétences, a, non seulement, fait faillite en terme d’efficacité et d’efficience, depuis plus de 30 ans, mais il a entraîné, dans son naufrage, des centaines de milliers de familles, soit presque la société entière.
S’étant transformé depuis plus d’une vingtaine d’années en un formidable marché où tout s’achète et se vend, ledit système a ainsi perdu son caractère noble et quelque peu sacré pour ressembler plutôt à une porcherie pour ne pas dire qu’il est devenu la personnification de la honte.
La grande majorité des familles tunisiennes se retrouvent, en effet, acculées, depuis à dépenser d’énormes sommes d’argent rien que pour tenter de remettre à niveau leurs rejetons afin d’espérer pour eux des diplômes supérieurs, gages de réussite sociale pour la famille.
Enormes sommes versées dans des conditions dignes d’une vente à la criée, en contrepartie d’interminables cours particuliers de rattrapage, pouvant commencer, chose incroyable dès la première année du primaire et ce, afin de pallier, tenez- vous bien, aux multiples défaillances entourant l’opération d’acquisition et d’assimilation des connaissances.
Cours assurés le plus souvent par les enseignants chargés officiellement de ladite opération. Entre autres résultats, une véritable mafia a amassé de vraies fortunes, sans contribution fiscale, grâce à cette faillite organisée, et qui n’est pas près de laisser quiconque remettre de l’ordre dans ce hideux capharnaüm.
Quant aux défaillances, elles s’étendent à tous les rouages du système et, depuis ces dernières années, elles découlent aussi d’un climat délétère au sein des établissements, surtout du secondaire, à cause des grèves répétitives des enseignants ayant touché même les examens et le désarroi dans lequel ces agissements laissent les élèves.
Entre autres résultats, une grande gêne financière pour les familles dont une bonne partie aura recours à un prêt bancaire pour faire face au coût exorbitant d’une année en terminale, qui pourrait se répéter, une fois au moins.
Avec l’instauration par le régime déchu du fameux ajout de 25% de la moyenne annuelle de la terminale dans le calcul de la moyenne du bac, mesure abrogée l’année dernière, un formidable marché des cours particuliers s’est érigé, avec la complicité des parents et la bénédiction des autorités, en véritable réseau de passeurs.
Pratiques frôlant la corruption qui se sont rapidement transformées en un hideux racket pratiqué par les enseignants à l’égard des élèves et de leurs parents. Solliciter l’enseignant pour des cours particuliers ou c’est l’enfer des mauvaises notes et de la torture morale. Difficile aujourd’hui d’arrêter cette machine infernale.
Obtenir son baccalauréat pour enfin accéder à l’enseignement supérieur et participer ainsi au progrès de notre pays est devenu un investissement lourd pour la plupart des familles appartenant à la classe dite moyenne et très lourd pour celles désirant de meilleurs choix d’orientation pour leurs enfants.
Il existe, en effet, toute une culture autour de ce «précieux» diplôme, culture qui s’est, petit à petit, transformé en une gigantesque obsession sociale aux dépens de la formation professionnelle et technique et qui a été un formidable comburant pour le système mafieux déjà cité.
Commenceront alors les interminables sacrifices pour assurer des études supérieures qui, pour bon nombre d’étudiants, mènent, comme déjà dit, tout droit au chômage. Les diplômes, dont certains ne sont que des leurres ou ne permettant l’accès à aucun emploi qui leur soit compatible, une fois obtenus, vont pousser les familles à supporter d’autres charges parfois lourdes, celles de jeunes livrés à un chômage qui peut durer dans le temps.
D’où le recours de plus en plus fréquent aux universités privées dont certaines offrent une qualité d’enseignement égale ou proche offerte par leurs homologues les plus prestigieuses dans le monde. Des avantages qui seront payés à prix fort.
De plus, bon nombre de familles ont, depuis ces dernières années, accepté de recourir à d’autres lourds sacrifices en choisissant d’offrir à leurs enfants des études à l’étranger. Dans ce dernier cas ce sont des sommes faramineuses en devises qui quittent chaque mois le pays et qui appauvrissent davantage lesdites familles, dont la plupart contractent des prêts bancaires à cet effet ou se voient obligées de vendre des biens.
Quant aux familles à revenu modeste ou faible et celles qui sont nécessiteuses, elles ne rêvent plus de diplômes du supérieur pour leurs enfants. Ces derniers iront augmenter le rang des chômeurs, des délinquants ou mèneront des activités marginales et parallèles pour finir parfois par devenir un vulgaire repas pour les poissons.
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