Il est devenu l’ennemi n° 1 de nos palmiers-dattiers, mettant en danger notre sécurité alimentaire. Il est difficile de capter l’insecte d’autant plus que sa propagation est très rapide, et peut s’effectuer à travers même des objets. Il s’agit du charançon rouge qui a fait son apparition dans notre pays en 2011 à Carthage et s’est propagé à la banlieue nord provoquant entre 4.000 et 5.000 contaminations.
Par Hafedh TRABELSI
Les chiffres de la Synagri font état d’un peu plus de 5.000 palmiers d’ornement affectés. Certes, il a touché jusque-là les palmiers ornementaux, mais le risque de voir nos palmiers-dattiers attaqués par cet insecte est une réalité avec laquelle il faut composer. Il est impératif de juste regarder le paysage urbain de Tunis et de sa banlieue pour mesurer l’ampleur de la dégradation. Les palmiers ravagés se tiennent comme des totems de la mauvaise gouvernance de notre espace urbain.
Avec une palmeraie s’étalant sur 2.500 ha et pointant au 4e rang des producteurs de dattes derrière Kébili, Tozeur et Gabès, Gafsa est sur le qui-vive pour parer au risque de voir ses palmiers contaminés. L’association pour la sauvegarde de la Médina Gafsa a déterré la hache de guerre, comme nous l’a rapporté Hatem Zitouni, son président : «Certes, nos palmiers sont sains mais comme les voies de contamination sont multiples, il faut être sur ses gardes pour anticiper la propagation de cet insecte, nous avons engagé un programme de sensibilisation et nos confrères à Tozeur (La Ruche de Tozeur) sont dans le même sillage.
La menace ne concerne pas uniquement les palmiers-dattiers mais c’est tout l’écosystème oasien qui risque de s’écrouler avec des conséquences fâcheuses inéluctables pour ne citer que la désertification et la contrainte à la migration des populations. Prévenir vaut mieux que guérir, mais dans le cas du charançon rouge, on ne peut parler de guérison .Ce sera la mort du palmier, et c’est là que réside la complexité de cet insecte ravageur qui tue en silence».
Une coalition citoyenne contre le charançon rouge (4C) a vu le jour, et ce, en coordination avec les membres de la société civile dans toute la Tunisie, des chercheurs, des syndicats, le secteur privé et des citoyens, ardents défenseurs de l’environnement pour sensibiliser la population et les autorités publiques. Ce qui est effrayant, c’est le silence assassin et l’immobilisme administratif face à cette grande menace qui se précise et prend corps. Ils se sont déplacés à Tunis le 15 juin pour la marche des palmiers pour tirer la sonnette d’alarme. Un communiqué qui comporte leurs revendications sera remis au chef du gouvernement.
L’ASM de Gafsa qui a adhéré à la 4C (coalition citoyenne contre le charançon rouge) est à pied d’œuvre à travers une action tous azimuts pour sensibiliser les citoyens de la palmeraie, comme nous l’a confirmé notre interlocuteur : «Le problème ne se pose pas avec la même acuité qu’ailleurs. On rappelle que l’insecte a affecté jusque-là les palmiers de Carthage, de l’avenue Mohamed V, le Belvédère et de certaines unités touristiques. Il s’agit de palmiers d’ornement, alors qu’à Gafsa, Tozeur, Gabès et Kébili, ce n’est pas la même chose mais l’attaque éventuelle pourrait être dévastatrice et c’est notre leitmotiv à travers cette action de sensibilisation qui cible les agriculteurs mais ce n’est guère une sinécure à cause surtout de la modestie des moyens».
Un constat qui dénote la difficulté de l‘entreprise engagée par l’ASM Gafsa : «Je considère qu’il faut mettre en quarantaine les palmiers affectés pour juguler le phénomène, s’ensuit le contrôle. Il y a aussi tout un protocole de surveillance qu’il faut mettre en marche. La problématique réside dans l’absence d’un réel traitement, ce qui condamne le palmier affecté. Le plus important serait d’impliquer les acteurs gouvernementaux puisqu’il s’agit d’une menace qui pèse sur notre sécurité alimentaire et c’est notre rôle. A Gafsa, les élus municipaux sont censés mettre la main à la pâte, mais empressons-nous de dire que les moyens logistiques manquent affreusement. Le Conseil municipal de Gafsa devrait se pencher sur les palmiers du périmètre communal. La spécificité de Gafsa, ville oasienne, appelle à une intervention à caractère urgent».
Pour Hatem Zitouni, à Gafsa, il n’y a pas le feu en la demeure, la bataille est engagée mais le chemin est encore long. A L’ASM de Gafsa, une feuille de route sera mise à exécution pour parer au risque de voir cet insecte élire domicile dans ces contrées, mais force est d’admettre que l’oasis de Gafsa impose une opération de lifting au vu des points noirs qui ont noirci le paysage sur fond d’un silence intrigant de la part du Conseil municipal vu que c’est un sujet brûlant sur lequel nous reviendrons dans une prochaine édition…