Accueil Culture «La Chasse aux fantômes» de Raed Andoni dans le cadre du Cycle de films « Quand le cinéma dénonce la torture » à la Cinémathèque de Tunis : Le cinéma comme thérapie de groupe

«La Chasse aux fantômes» de Raed Andoni dans le cadre du Cycle de films « Quand le cinéma dénonce la torture » à la Cinémathèque de Tunis : Le cinéma comme thérapie de groupe

C’est avec le magnifique et largement primé «La Chasse aux fantômes» (2017) du Palestinien Raed Andoni, que s’est ouvert le cycle de films intitulé «Quand le cinéma dénonce la torture». Un programme organisé dans le cadre des célébrations de la Journée mondiale contre la torture par la Cinémathèque de Tunis et l’Institut Nebrass spécialisé dans la prise en charge psychologique des rescapés de la torture.
Un choix judicieux «La Chasse aux fantômes» pour inaugurer un programme dénonçant l’exercice de la torture, qui s’étendra jusqu’à dimanche avec la sélection de documentaires, de courts métrages et de films de fiction. Des productions, qui donneront en premier lieu la parole aux victimes : de «L’interrogatoire», de Ryszard Bugajski, à «La Mémoire Noire», de Hichem Ben Ammar, à « Yol », de Yilmaz Guney… Car les victimes ont été longtemps cantonnées aux seuls cris de souffrance. D’autre part, il reste toujours difficile d’avoir accès aux tortionnaires pour les charges criminelles qui pèsent sur eux et pour le sentiment d’impunité qui les anime. Un fait que les Tunisiens ont expérimenté lors des séances d’auditions publiques de l’IVD où seules les victimes se sont exprimées.
Or avec « La Chasse aux fantômes », grâce à une forme cinématographique qui sort des sentiers battus, mélangeant la fiction au documentaire et le film d’animation au reportage, Raed Andoni arrive à représenter et les victimes et leurs bourreaux. Lui-même ancien détenu au centre d’interrogatoire israélien d’Al Moscobiya, le réalisateur a réuni grâce à une annonce sur un journal d’anciens prisonniers ayant subi torture et humiliations diverses. Ils sont comédiens, artistes, architectes, ouvriers du bâtiment et vont construire ensemble le centre d’interrogatoire et les cellules, qui lui sont attenantes.

Ils vont aussi jouer et interpréter les rôles de tortionnaires, de victimes, de détenus et de gardiens de prison. Selon leurs récits et leurs souvenirs. Selon également leurs traumatismes et leurs larmes. Et c’est ce processus-là en évolution avec sa dynamique de groupe, ses jeux de rôle et sa thérapie d’ensemble que filme avec beaucoup d’émotion Raed Andoni. L’humour est cependant toujours présent : « Pour résister, on a beaucoup ri en prison », confesse l’un des intervenants dans le film.
Bien que sa démarche soit artistique et que son film soit une interprétation de la réalité, le souci du vrai est très présent dans « La Chasse aux fantômes ». Un témoin-clé qui a subi un pénible et très long interrogatoire musclé à Al Moscobiya est consulté à longueur du film, il intervient même pour corriger un geste ou ajouter une chanson à une scène de torture, telle qu’il l’a vécue.
Le film rend hommage aux 800.000 Palestiniens qui sont passés par le calvaire des prisons israéliennes, dont des milliers d’enfants et d’adolescents. Il a reçu le Prix du meilleur documentaire à Berlin en 2017 et a représenté la Palestine aux Oscars 2018.

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