Sa pratique artistique, Lisa la définit comme une errance picturale avec l’usage de matériaux et autres pigments qui racontent sa terre natale, le déracinement et l’exil à l’instar de ces bouts de sacs Tati qu’on retrouve dans son œuvre «Oceano nox» qui renvoient aux départs rapides.
Avec son exposition «Sud-nord», abritée par la galerie Alain-Nadaud, Lisa Seror signe son grand retour artistique en Tunisie. Elle nous y présente une œuvre cathartique qui vient raconter ses réminiscences et sa nostalgie du pays. Nous l’avons rencontrée pour vous.
Un sourire qui raconte l’amour de la vie, des yeux très expressifs, Lisa nous parle avec un ton doux-amer de son œuvre intimement liée à son pays natal : la Tunisie. Après une enfance heureuse passée à El Hafsia jusqu’à ses 12 ans, elle a dû s’exiler en France avec sa famille.
Un déchirement qu’elle a pu, avec le temps, dépasser, à coups de pinceaux et de couleurs. «Avec cette rupture brutale, j’ai rencontré l’art», nous dit-elle. Un sentiment qu’elle exprime dans ses toiles entre autres questionnements, selon ses termes, liés à la place de l’humain dans notre monde, l’héritage d’exode et d’exil qui n’en finit pas. Tout cela revient dans son œuvre. «Cette rupture m’avait, ainsi que mon père, beaucoup affectée et avec elle j’ai rencontré le grand amour, celui qui vient comme ça et que l’on ne rencontre qu’une seule fois dans la vie», poursuit-elle et d’ajouter: «Cet amour c’est celui de ma terre natale».
Parmi les œuvres qui nous ont le plus marqués figure la série des chaises. Filiformes pour ne garder des fois qu’une fine ossature, une sorte de traces d’une présence, parfois écorchées ou encore mises sous grillage, elles finissent, petit à petit et au gré des toiles exposées, par s’estomper. Ce travail sur les chaises elle l’a mené pendant 15 ans, nous précise-t-elle. «Ces chaises racontent l’absence. Elles représentent toutes ces personnes que j’ai laissées à mon départ et qui à mon retour, après 20 ans, avaient disparu».
Sa pratique artistique, Lisa la définit comme une errance picturale avec l’usage de matériaux et autres pigments qui racontent sa terre natale, le déracinement et l’exil à l’instar de ces bouts de sacs Tati qu’on retrouve dans son œuvre «Oceano nox» qui renvoient aux départs rapides. Pour ce qui est de ses années d’absence artistique en Tunisie (sa dernière exposition en Tunisie date de 2004), Lisa explique cela par l’avènement de la révolution qu’elle dit avoir suivie de loin avec de l’angoisse quant à un futur inconnu et le besoin de laisser mûrir sa matière et donner du temps pour la genèse d’un nouveau travail. «Je n’ai pas de références picturales, la peinture je l’ai rencontrée avec la rupture. J’étais jeune et très touchée affectivement quand on m’a donné, pour la première fois, un pinceau…Cela a été thérapeutique pour moi et depuis, je n’ai pas arrêté de peindre…» L’exposition se poursuit jusqu’au 20 juillet 2019.
Vidéo réalisé par : Belhassen Lassoued
Crédit photo: © Belhassen Lassoued