Le sélectionneur des «Super Eagles» apporte sa large expérience à ses joueurs
«J’espère être là encore la semaine prochaine», blague Gernot Rohr avec cette petite pointe d’accent qui lui sied bien. L’homme, qui maîtrise aussi bien la langue de Molière que celle de Goethe, termine cet entretien policé avec un large sourire. Attentionné, courtois, raffiné, il vous souhaite une bonne soirée et un bon appétit, un Ovni dans le monde du football.
Bordeaux, terre de réussite
Le Franco-Allemand a débarqué dans l’Hexagone en 1977 à l’âge de 24 ans et s’installe sur les bords de la Garonne. Et c’est aux Girondins qu’il va connaître ses heures de gloire avec notamment trois titres de champion de France (431 rencontres jouées). Il croise à l’époque Giresse, Tigana, Lacombe, Batiston, ou Trésor. Il intègre ensuite le staff technique des Girondins où il a, sous sa houlette, les futurs champions du monde 1998: Zidane, Lizarazu et Dugarry.
Gernot Rohr devient l’entraîneur de Nice et hisse le club au plus haut niveau. Un de ses plus beaux faits d’armes. «Le plus indiscipliné des Allemands et le plus discipliné des Français», selon une phrase de Bernard Lacombe, était arrivé sur la promenade des Anglais en janvier 2001.
Sa première expérience africaine, Gernot Rohr la vie en Tunisie, à l’Etoile du Sahel en 2008. À l’époque, celui qui a fait une finale de Coupe d’Europe avec Bordeaux comme entraîneur n’a pas de problème d’adaptation grâce à son épouse africaine. «C’était presque une suite logique (rires), je n’étais pas dépaysé avec la mentalité. Je n’ai pas regretté», dit-il. Ajoutant : «Et j’ai toujours été entouré de joueurs africains à Bordeaux».
Avec le Gabon en quarts de finale de la CAN
Gernot Rohr mène le Gabon en quarts de finale de la CAN 2012, avant de devenir le sélectionneur du Niger et du Burkina Faso. «Je garde un souvenir énorme de mon passage au Niger. Un pays d’une pauvreté absolue, mais une aventure humaine incroyable avec des gens extraordinaires. On a vécu une CAN ensemble, c’était un petit miracle».
«Ce n’est pas toujours facile au Nigeria », avance aujourd’hui Gernot Rohr qui a apporté une forme de « sérénité » aux Super Eagles qui avaient raté les CAN 2015 et 2017 pour cause de non-qualification. «J’ai sélectionné pas mal de jeunes joueurs qui venaient des moins de 17 et 20 ans. J’ai laissé de côté les caractères plutôt compliqués».
Le Nigeria, triple champions d’Afrique, sera-t-il l’aboutissement de sa carrière en Afrique? «On pourrait le dire. J’espère aller loin avec cette équipe», avance Gernot Rohr qui se dit fier d’avoir participé au Mondial 2018 en Russie avec les Super Eagles et qui donne le sentiment d’être épanoui ici en Égypte. Son objectif: terminer sur le podium.
Le respect de la hiérarchie
«Souvent, on dit : «Ce Franco-Allemand va apporter un peu derigueur», plaisante l’ancien défenseur, fils de footballeur, marié à une Malgache, qui s’est illustré de 1972 à 1974 au Bayern de Munich de Franz Beckenbauer. Mais Gernot Rohr avoue qu’avec ses facultés d’adaptation, et de compréhension, il a su aller facilement vers les autres et au-devant des problèmes. «Au Nigeria, ce n’est pas difficile d’entraîner. Mes joueurs sont respectueux. Il y a cette notion de hiérarchie qui entre en jeu», explique-t-il. Il a pourtant eu déjà droit à des menaces de grève avant le deuxième match des poules pour des raisons de primes. Sa force de persuasion a payé.
De toutes ses années africaines, Gernot Rohr garde en mémoire la qualification pour le Mondial 2018 en Russie après une victoire face à la Zambie. Pour terminer, on lui demande une anecdote vécue sur le continent africain. «Il va falloir que je prenne un peu de temps pour choisir la meilleure», lâche-t-il en souriant. Lors de notre prochaine rencontre, on ne manquera pas de le lui rappeler.
D’après RFI