«Nommé début juin à la tête de Nottingham Forest, Sabri Lamouchi a fait le deuil de son divorce difficile avec le Stade Rennais. Avant la reprise de la Championship, il a accepté de se livrer à FF.
Sabri, comment vous sentez-vous à l’aube de découvrir la Championship ?
Excité de découvrir ce nouveau Championnat, peut-être le plus difficile et le plus long. Anxieux, forcément, car mon staff et moi sommes arrivés en cours de préparation avec quelques chamboulements. Même si la préparation et les matches amicaux se sont bien déroulés, la vérité, c’est samedi soir (contre West Bromwich Albion, ndlr). Avec ces deux sentiments, on essaiera de prendre du plaisir quoi qu’il arrive.
L’homme est heureux dans sa nouvelle vie anglaise ?
Tout est nouveau. La conduite à gauche, les méthodes de travail, la culture… Beaucoup de choses sont différentes, mais je me sens très bien ici. Il y a eu d’agréables surprises depuis notre arrivée. Désormais, on a la volonté de bien démarrer notre saison en contextualisant, en prenant vite note du championnat dans lequel on est.
La Côte d’Ivoire, El Jaish (au Qatar, ndlr), Rennes et maintenant Nottingham, votre parcours est plutôt atypique…
J’avais eu des premiers contacts extrêmement positifs avec Nottingham en décembre, mais le timing n’était pas favorable selon moi. A l’intersaison, j’ai reçu d’autres propositions, en France et à l’étranger. Là non plus, je n’ai pas donné suite, parce que je pensais qu’un projet plus ambitieux allait se présenter à moi. Puis Nottingham est revenu avec un projet totalement différent. C’est un club mythique, un énorme challenge. On a l’impression que le temps s’est arrêté il y a quarante ans. Le club a plus de 20 000 abonnés, a gagné deux Coupes d’Europe des clubs champions, une histoire extraordinaire, des installations plus que satisfaisantes pour un club de Championship et des joueurs de grande qualité. Cela fait vingt-et-un ans qu’il n’a pas joué en Premier League, c’est un immense défi à relever.
On vous sent plein de confiance pour cette nouvelle aventure…
J’aurai le mérite d’essayer, tout comme ceux qui sont passés avant moi. La difficulté va exister, c’est certain. On ne changerait pas autant de propriétaires et d’entraîneurs en si peu de temps si tout allait bien. Au haut niveau, la stabilité, la relation avec les dirigeants et les joueurs sont des choses importantes. Le métier qui est le mien a évolué, et on se doit de s’adapter.
Votre départ de Rennes a été pour le moins difficile à vivre, est-ce-que ça a motivé votre choix de quitter la France ?
Quand on s’aperçoit que ce n’est pas pour des raisons professionnelles et encore moins des qualités d’entraîneur que les choses ne se font plus, on se repose la question de ce qu’est un entraîneur ou un manager… Ce n’est pas parce qu’on travaille bien et qu’on a des résultats que l’on a la garantie de rester en place. J’ai pu me rendre compte que même dans des endroits très calmes, très sages, votre place de coach est remise en question en permanence. Alors, autant vibrer, avoir des émotions et tenter un challenge risqué. Ça a été très difficile mais j’ai la chance d’être de nouveau sur un banc, et quel banc !
Même avec du recul, on perçoit un petit peu d’amertume…
Pourquoi un petit peu ? Je le vis comme une injustice, tout simplement. Même s’il y a des choses bien plus graves dans la vie. Une seule personne a décidé que je devais arrêter de travailler à Rennes (Olivier Létang, ndlr) et les choses se sont arrêtées. J’ai été ravi de connaître Rennes et ses environs. C’est un endroit où j’aurais pu rester très longtemps, avec aucune autre ambition que celle de grandir avec le club. C’est le même sentiment que je retrouve ici. C’est comme ça, mon métier a ses hauts et ses bas. Quand je vois le nombre d’entraîneurs remerciés après ce qu’ils ont réalisé, Mourinho à Chelsea et Manchester, Ranieri… Le métier change et on doit s’adapter aux directions et à la nouvelle génération à travers un discours clair, cohérent et ambitieux. Ce n’est pas simple.
Dans un championnat comme celui-là, vous ambitionnez d’installer un jeu fidèle à ce que vous êtes, porté sur le jeu de passes notamment ?
A une différence près, c’est qu’ici, le jeu est plus direct. On voit beaucoup de duels aériens, de longs ballons, de buts sur coups de pied arrêtés…On va essayer de construire mais surtout d’obtenir un équilibre et de faire en sorte que l’équipe se coupe le moins ou le plus tard possible en deux, comme c’est souvent le cas dans ce championnat. Ce qu’on souhaite mettre en place, c’est une équipe disciplinée qui prend plaisir à jouer ensemble.
Concilier jeu et résultats est plus compliqué qu’ailleurs ?
Le résultat passe par le jeu. J’ai le souvenir d’un Norwich-Nottingham l’an passé, où Nottingham mène 3-0 à dix minutes de la fin. A la fin il y a 3-3. S’il y avait eu 5-3 il n’y aurait rien eu à dire ! La Championship, ce sont des rushes en début de match et des rushes en fin de match. Quand vous avez des joueurs avec de la personnalité et une maîtrise collective qui permet de faire tourner le ballon, ça peut aider. On compte là-dessus. On veut faire en sorte, individuellement, de sortir vainqueur des duels et, collectivement, d’avoir une maîtrise supérieure par la rigueur et la discipline.
D’après France football