Accueil Société Au lendemain de l’Aïd El Idha : Le rituel du sacrifice résistera-t-il à la modernité

Au lendemain de l’Aïd El Idha : Le rituel du sacrifice résistera-t-il à la modernité


Demain, car on n’arrête pas le progrès, on vous fournira le mouton sacré en pièces, côtelettes, gigot et foie en petits paquets.


On aurait pu croire à une bonne blague, une fake news bien troussée, un canular de potache. Non, paraît-il, c’est vrai et bien vrai. Ne voilà-t-il pas que l’on remet en question des siècles de fêtes joyeuses, d’attentes impatientes, de concurrences plus ou moins loyales, de rivalités voisines éternelles. Voilà que l’on veut, désormais, priver nos chères têtes brunes de la joie sans pareille de ce jour pour eux exceptionnel. Voilà que l’on jette aux orties un des cérémonials les plus sacrés de notre calendrier, celui seul qui excuse auprès de l’employeur le plus pointilleux une large semaine d’absence. Voilà que l’on veut, désormais, nous faire oublier nos longues quêtes à battre les campagnes, à sillonner les souks, à la recherche du meilleur produit pour le meilleur prix, nos longs et patients marchandages, nos hésitations existentielles «avec ou sans lyia». Voilà que l’on veut nous priver, à l’avenir, de nos siestes bêlantes, de nos nuits bruyantes, de nos petits matins ensommeillés. En un mot, voilà que l’on annonce que vous pourrez désormais acheter votre mouton de l’aïd… on line.
Le seul fait de l’écrire appelle au sacrilège. Comment ? Acheter un mouton sans le tâter là où il faut, sans décider s’il doit être cornu ou tendre agneau, sans évaluer la douceur de sa chair, la taille de sa daouara, la qualité de sa toison. Mais oui, nous dit-on. Un catalogue détaillé et précis vous est offert. Les moutons y posent comme des super mannequins, dans un shooting sophistiqué qui les présente sous leur meilleur jour, inconscients du sort qui les attend. Une fiche technique les accompagne, détaillant poids, mesures, taille des cornes, et peut-être, mais nous n’en sommes pas sûrs, nous n’y sommes probablement pas encore parvenus, leur traçabilité. Mieux encore, si on ne vous propose pas aujourd’hui de vous le débiter, on vous le livre à domicile.
Demain, car on n’arrête pas le progrès, on vous fournira le mouton sacré en pièces, côtelettes, gigot et foie en petits paquets. Alors disparaîtra totalement ce rite ancestral qui vous réveille à l’aube au cri du «zazar» ambulant, qui réunit les enfants surexcités autour du kanoun pour les premières grillades, et les familles autour de la klaïa traditionnelle. Qui confine les femmes  à la cuisine pour préparer les merguez et osbans, et décore nos terrasses de guirlandes de kadid. Qui parfume toutes les maisons des mêmes senteurs d’épices, d’herbes et de charbon de bois. Et qui fait la manne des marchands de « satours » et de «machouas»
Demain, l’aïd el kebir ne sera plus qu’une date sur un calendrier.
Alors non. Malgré tout mon respect et ma reconnaissance au système de vente online, au nom de tous les aïd-addicts, je pousse un Bêêê de protestation.

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2 Commentaires

  1. Ben Salah

    15 août 2019 à 12:11

    J’espère que l’auteur est payé au nombre de mots et pas à la qualité. Notre société peut évoluer, elle le doit même. La population augmente, le modèle d’habitation devient de plus en plus vertical, donc le nombre d’agneaux de l’aïd au mètre carré devient de plus en plus important. Il devient impératif de contrôler le côté sanitaire de cet acte religieux. L’acte devra avoir lieu dans un abattoir, et ainsi il sera en plus possible de valoriser la totalité des déchets.
    C’est comme cela que l’on deviendra une société moderne respectueuse de ses traditions.

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    • Naamoun

      15 août 2019 à 16:00

      Tout à fait d’accord

      Répondre

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