Un seul cas privera Nabil Karoui de se présenter au second tour, celui d’un jugement accompagné d’une déchéance de ses droits civiques et politiques. L’Isie affirme avoir traité le cas de Karoui sur un pied d’égalité avec tous les autres candidats. La mission de l’Instance s’achèvera après l’envoi des résultats du second tour à l’ARP. C’est à la justice de dire son mot dans cette affaire et non pas l’Isie. Et dans tous les cas de figure, il importe de respecter ses décisions.
Le candidat indépendant à la présidentielle Nabil Karoui se trouve toujours derrière les barreaux en dépit de son passage au second tour. La Tunisie post-révolution excelle en matière de démocratie avec ces premiers débats télévisés mettant à l’épreuve de vérité les candidats à cette échéance électorale. Des débats jamais réalisés dans le monde arabe. Mais la Tunisie inquiète aussi avec un candidat à qui on donne la parole pour tenter d’amadouer les électeurs et un second muselé qui se trouve toujours derrière les barreaux depuis le 23 août dernier après une arrestation «spectaculaire» en vertu d’un mandat de dépôt provisoire pour suspicion de blanchiment d’argent, fraude fiscale et escroquerie impliquant également son frère, Ghazi Karoui.
Imbroglio juridique
Une situation kafkaïenne qui embarrasse l’Isie et laisse planer le doute sur le principe d’égalité des chances entre les deux candidats. Même s’il avait été libéré hier, Karoui aurait été privé aussi de son droit le plus élémentaire, celui de faire des déclarations dans le cadre de sa campagne électorale. Une présidentielle à sens unique ou presque, favorisant l’un des candidats et bafouant les droits de l’autre, a acculé Baffoun à adresser, en vain, une demande au juge d’instruction en charge du dossier de Karoui pour lui donner la possibilité de mener sa campagne électorale pour le second tour.
On parle aujourd’hui d’une « impasse juridique » et de « lacunes » au niveau du code électoral qui a omis de faire référence à la situation d’un candidat en prison, comme le souligne le constitutionnaliste Iyadh Ben Achour. Oui mais que faire si le candidat Nabil Karoui, après avoir réussi l’épreuve du premier tour, accède à la magistrature suprême au second tour? Quels sont les scénarios possibles pour une démocratie qui titube encore.
Certes, le président de l’Isie n’a cessé de multiplier les déclarations concernant le droit de Karoui, même en prison, de donner des déclarations aux médias dans le cadre de la campagne électorale. Nabil Baffoun va encore plus loin en faisant savoir dans l’une de ses déclarations que même dans le cas où le candidat en question serait frappé d’une condamnation durant la période précédant le jour du vote, cela n’impactera nullement son droit à se présenter pour le second tour.
Des pressions de tous bords
Un seul cas privera Nabil Karoui de se présenter au second tour, celui d’un jugement accompagné d’une déchéance de ses droits civiques et politiques. L’Isie affirme avoir traité ce candidat sur un pied d’égalité avec tous les autres, et que la mission de cette instance électorale s’achèvera après l’envoi des résultats du scrutin du second tour à l’ARP. C’est à la justice de dire son mot dans cette affaire et non pas l’Isie.
Avant-hier, le conseil de l’Isie s’est entretenu avec Kaïes Saïed à propos de l’application des règles de la campagne électorale lors du second tour. Une situation loufoque en raison de la détention du second candidat. L’égalité des chances n’a pas été respectée et l’on se retrouve en fin de parcours face à un « candidat favorisé » et « une victime » qui a entamé une grève de la faim pour protester contre sa détention.
Les pressions ont fusé, paraît-il, de partout pour permettre à Nabil Karoui de recouvrer la liberté dans le dernier finish de la course au Palais de Carthage, et le président de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica), Samir Majoul, a rejoint les parties qui ont appelé à la libération de ce candidat dont le timing et la façon de son arrestation ont fait couler beaucoup d’encre. En vain.