Accueil Magazine La Presse Alimentation de l’enfant : Gros problèmes et maigres solutions

Alimentation de l’enfant : Gros problèmes et maigres solutions

Les transformations rapides et quasi-incontrôlées des modes de vie et d’alimentation des Tunisiens, jugées pour la plupart d’entre elles néfastes pour la santé, trouvent leur expression la plus spectaculaire dans la progression de l’obésité chez l’enfant.

Sujette à une inquiétante dérive dont les conséquences pourraient s’avérer catastrophiques pour l’avenir du pays .Voilà comment l’ont pourrait qualifier, sans risquer de se tromper, la situation actuelle de l’alimentation de la plupart des enfants tunisiens.
Or l’alimentation de l’enfant est une activité aussi bien vitale pour l’enfant lui-même en tant qu’être humain en train de se développer, donc pour son avenir, que pour celui du pays, et ce, sur le double plan de la qualité de la population et des dépenses occasionnées par tout manque, constaté au niveau de cette donnée.
La qualité d’une population en termes de santé, physique et mentale et de vitalité est, en effet, un atout majeur pour son développement et son progrès. Pour donner un exemple a contrario, nous citerons la BAD (Banque africaine de développement) qui en 2016 avait déclaré que la malnutrition infantile faisait perdre au continent 11% de son PIB.
Nous sommes donc tous interpellés, autorités publiques en premier lieu, suite à ce triste constat, est appelés à agir afin de résoudre ce problème épineux qui est en train de rendre la situation sanitaire du pays encore plus préoccupante, surtout en ce qui concerne les maladies non transmissibles, celles qui sont évitables, en premier lieu.
Les transformations rapides et quasi-incontrôlées des modes de vie et d’alimentation des Tunisiens, jugées pour la plupart d’entre elles néfastes pour la santé, trouvent leur expression la plus spectaculaire dans la progression de l’obésité chez l’enfant.
Des transformations qui font que nous autres Tunisiens, mangeons plus, plus fréquemment, plus sucré, plus gras, plus salé, plus frit, plus transformé et industrialisé, plus sale, plus pollué, moins de fibres, avec en plus de tout cela, plus de tabac, plus de sédentarité, plus de stress, plus cher, etc. Cela sans oublier la forte pression publicitaire pour les produits impliqués dans cette dérive.
Bref, des habitudes alimentaires devenues à la fois très nocives, très coûteuses et conjugués à un environnement agressif sont en train de favoriser la prolifération de bon nombre d’allergies alimentaires, fléau qui commence réellement à devenir inquiétant.
Pour ce qui est du problème de l’obésité chez les enfants tunisiens, rappelons que pour ceux âgés de moins de cinq ans, le taux a grimpé de 6,3%, en 2006 à 9,5 en 2012. Ce qui a poussé les autorités publiques à lancer, en 2013 une stratégie nationale de lutte contre l’obésité de l’enfant.

Une vraie gabegie
Un ensemble de causes est derrière cette dérive. Celles-ci sont parfois concomitantes. Certaines d’entre elles commencent à agir dès la vie fœtale, d’autres au cours de la croissance pour parfois s’amplifier. Parmi elles nous citerons :
– Alimentation déséquilibrée de la mère et mode de vie stressant. Tabagisme rampant chez la gent féminine. Progression du surpoids et de l’obésité chez les femmes. Conception de l’enfant à un âge tardif
– Négligence de l’allaitement maternel durant au moins les six premiers mois de la vie de l’enfant.
– Absence d’allaitement maternel, problème très grave avec des conséquences nocives aussi bien sur la santé physique que mentale
– Mauvaise gestion du sevrage de l’enfant
– Introduction de boissons sucrées (une vraie calamité)
– Introduction précoce et massive de lait de vache, ce qui est très grave pour l’enfant aussi bien pour sa santé physique que mentale
-Introduction tardive des préparations cuisinées, et de goûts autres que le sucré
– Perte de l’habitude de la table familiale et de son rôle d’éducation à l’alimentation et pour la socialisation de l’enfant. L’enfant rate la phase de l’apprentissage et de l’adoption des habitudes alimentaires saines
– Alimentation pauvre en fibres
– Education sphinctérienne défaillante. L’enfant n’apprend pas à se contrôler et se laisse aller
– Mauvaise hygiène bucco-dentaire. Carries négligées
– Grignotage
– Exposition abusive aux écrans, avec ses quatre volets nocifs : stress, sédentarité, grignotage, publicité
– Alimentation hors du foyer, avec ses volets produits industrialisés, mauvaise qualité hygiénique des aliments.

Ce sont là les principales causes de la dérive déjà décrite qui englobe aussi d’autres problèmes cette fois-ci causés par diverses carences (protéïno-caloriques, en certaines vitamines, tendresse, etc.). Celles-ci ont fait l’objet d’intervention des autorités publiques mais restent tributaires du niveau de conscience des parents.
Ces derniers sont souvent bousculés par les contraintes quotidiennes et pèchent aussi par un manque flagrant de connaissances dans ce domaine. Carence due entre autres à la faiblesse de l’action d’éducation pour la santé et pour l’alimentation chez la plupart des Tunisiens.
Mais le problème le plus épineux et le plus délicat reste la publicité. En effet, et en l’absence de garde-fous, industriels et publicitaires ont trouvé la porte grande ouverte pour commettre tous les excès, y compris celui de transformer l’enfant lui-même, en agent prescripteur, c’est-à-dire à s’adresser dans la pub aux enfants pour les inciter à consommer tel ou tel produit.
Sans garde-fous, les industriels, soutenus par les publicitaires, ont donc plongé pieds et poings liés dans cette mine d’or qui, en fait mine la santé de nos enfants. Une action forte de ses stratégies marketing et ses redoutables outils publicitaires alors que la réponse sociale à ce raz-de-marée est quasi insignifiante (une charrette sur l’autoroute) pour ne pas dire nulle.
Un plan national devrait être établi afin de remédier à cette grave situation que nous venons de décrire succinctement. Un plan qui doit, à notre humble avis, mobiliser la population générale afin que tous les problèmes déjà cités trouvent solution et soient résolus.

Par Foued ALLANI

Charger plus d'articles
Charger plus par La Presse
Charger plus dans Magazine La Presse

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *