Coût des lignes D et E : 1.200 milliards de millimes.
30% des retards seraient dus aux lenteurs administratives.
Le Conseil municipal du Bardo somme la société du RFR d’arrêter les travaux.
Doublement des équipes et des travaux pour accélérer la cadence.
La qualité du transport collectif se dégrade à vue d’œil. L’offre est loin de répondre à une demande en constante progression. Les solutions ne sont envisagées, malheureusement, qu’après coup. Mais pour une fois qu’il y a un grand projet (le plus important en valeur puisqu’il serait le premier en Tunisie et le cinquième au niveau de l’Afrique), d’immenses obstacles ont jalonné et jalonnent encore le parcours de sa réalisation.
Nous avons évoqué à plusieurs reprises ces difficultés incessantes qui surgissent à chaque étape de ce vaste programme qu’est le Réseau ferroviaire rapide (RFR). Actuellement, les efforts se concentrent sur la ligne E qui relie la Place Barcelone à Gobâa. Ce tronçon est long de 6,3 km. Il dessert des zones à très forte densité démographique telles que Bougatfa, Ennajah, Ettayarane, Zouhour 1 et 2, Hrairia et Sidi Hassine. Toutefois, la polémique ne cesse d’augmenter quant à sa mise en service. Attendue depuis des mois, la date de mise en exploitation de cette ligne n’a pas, encore, été fixée de façon précise.
Un entretien à bâtons rompus avec M.Lotfi Chouba, P.-D.G. de la société du RFR, nous a permis de voir un peu plus clair et de comprendre encore mieux les réticences et les obstructions qui se dressent devant la réalisation de ce projet.
Parmi les obstacles, on peut mentionner les lenteurs administratives qui entrent à hauteur de 30% dans les retards occasionnés. Environ 30%, également, sont dus à la multiplication des intervenants dans les travaux. Toujours est-il que l’avancée au niveau des équipements techniques aurait atteint environ 40% ainsi que 80% au niveau de la construction des stations. Les diverses entreprises chargées de mener cette tâche auraient, parfois, des difficultés à coordonner leurs actions. La défaillance d’une des parties se répercute, automatiquement, sur les autres, entraînant l’arrêt, pur et simple, des travaux.
Des «élus» locaux s’opposent au passage du RFR dans leur ville
Sur ce point, il faut noter, aussi, qu’on peut considérer comme une erreur stratégique le fait d’avoir désigné deux entités pour gérer ce réseau. D’un côté, il y a la Sncft qui a été chargée d’être à la tête de la gestion de l’infrastructure et, de l’autre, la société du RFR. C’est ce qui ajoute encore plus de dispersion dans les efforts et un manque de coordination.
S’agissant, par exemple, des obstacles fonciers, il n’y aurait plus que près de 3% de ces problèmes. Tout le reste a été résolu. Malgré tout, de nombreux freins persistent. C’est le cas des mauvaises surprises qui surviennent au fur et à mesure que l’on progresse. Des dégâts sont occasionnés au niveau des réseaux (électricité, Onas, Sonede, etc.) faute de cartes de ces ouvrages. Du coup, la société est obligée de les réparer ou de les dévier, souvent à ses frais.
Le volet social, lui aussi, est présent avec force. Plusieurs projets qui, normalement, ne relèvent pas des prérogatives de cette société sont effectués à l’instar des travaux d’embellissement des zones environnantes ou des aides à des associations, etc. Actuellement, le RFR paie les loyers de plusieurs habitants parce que les travaux leur occasionneraient des «nuisances». Les dédommagements, eux aussi, ont alourdi la facture et entraîné des retards énormes en raison des procédures judiciaires engagées.
Comme si cela ne suffisait pas, des «élus» locaux s’opposent au passage du RFR dans leur ville. Le nouveau Conseil municipal du Bardo, justement, vient d’envoyer, récemment, à la société du RFR une demande dans laquelle il exige l’arrêt des travaux du tronçon qui traverse la ville !
Pourtant, les deux parties s’étaient déjà mises d’accord (avec l’ancien conseil municipal) pour travailler ensemble à la recherche du meilleur moyen pour s’entendre. La société attend des propositions concrètes de la part des édiles pour faciliter la bonne marche du projet et répondre aux exigences des habitants de la cité. Cette attitude du conseil municipal est en contradiction totale avec les efforts qui sont entrepris en concertation avec près de 70 associations de la société civile de la ville du Bardo.
Aussi, peut-on se demander s’il est possible de revenir en arrière et tout stopper pour des raisons qui n’auraient aucune logique. Le budget dépensé jusqu’ici dans le projet de la ligne qui traverse cette ville ne doit pas être considéré comme de l’argent jeté par les fenêtres. Quelles que soient les considérations des uns et des autres, il faut trouver une issue qui prenne en compte les intérêts de milliers de futurs usagers de la banlieue nord-ouest. Il est impossible de changer l’itinéraire et les opposants le savent très bien.
Le RFR a sa page facebook
C’est pourquoi il serait bon d’adopter une politique de communication permanente avec les différents partenaires y compris avec les riverains. C’est, précisément, ce qui est en train de se dessiner, aujourd’hui, grâce à des opérations de sensibilisation et de prises de contact. Le site Facebook du RFR est, déjà, une plateforme qui permet d’établir ce contact. Mais il faudrait, aussi, être plus à l’écoute des habitants des zones traversées par les lignes du RFR.
C’est en les impliquant davantage et en leur expliquant les difficultés rencontrées qu’on peut les acquérir à la cause. Car il est, vraiment, incompréhensible qu’un tel ouvrage soulève autant de rejet par la population à laquelle il est dédié.
Les avantages attendus ne peuvent que nous inciter à attendre avec impatience la mise en service des lignes escomptées. Le confort prévu, les fréquences, la vitesse, la durée des trajets, la technologie à utiliser à bord des rames et dans les stations… tout milite pour que le réseau atteigne ses objectifs.
En cas de réalisation d’un tel projet, c’est une capacité élevée de voyageurs, une amélioration de la fluidité du trafic, la création de trois pôles d’échange et 16 stations de rabattement. Le voyageur ne mettrait plus que 7 mn pour rallier la station Barcelone et le Bardo, 13 mn pour Gobâa et 10 mn Sidi Hassine.
Le réaménagement de la Place Barcelone ajouterait beaucoup plus d’avantages dans les prochaines années.
En tout cas, ce n’est que lorsque la première ligne serait exploitée que les détracteurs pourront juger de l’impératif qu’il y a à accorder la priorité absolue à la concrétisation de ce vaste projet. Déjà on envisage de commencer les premiers tests techniques des nouvelles voitures acquises avec un coût de 500 milliards de millimes au cours des prochains jours. Quant au délai de lancement de la ligne E, on maintient la fin du premier semestre 2020. A cet effet, on se dirige vers le doublement des équipes et des travaux pour accélérer la cadence et faire de nouvelles avancées.