Un constat amer qui appelle à des mesures énergiques de la part des autorités pour éviter le mécontentement des consommateurs.
Depuis une semaine, les craintes suscitées de toutes parts par une nouvelle pénurie de lait s’avèrent aujourd’hui bien fondées. Les prémices de la crise sont là et bien là. Deux syndicats agricoles ont donné l’alerte : l’Utap clamait que « la crise est inévitable » et le Synagri « met en garde contre une pénurie de lait ». Un petit tour dans les supermarchés et vous comprendrez que vous n’aurez droit qu’à deux petits paquets de lait demi-écrémé en caisse. Le rationnement est de retour. La surconsommation et la vente conditionnée refont surface. Le lait qui n’était déjà pas présent en abondance sur les étalages des grandes surfaces ces derniers temps fait de nouveau des siennes.
Il recommence à manquer terriblement surtout dans les petites surfaces et les épiceries.
Il y a fort à parier qu’on n’en trouvera tout bonnement pas dans ce contexte de pénurie. Certains se procurent quelques paquets de lait demi-écrémé à l’aube du matin avant que le stock ne s’épuise, pour le reste « circulez, il n’y a rien à voir ».
Une pénurie cyclique ?
Depuis quelques années, le consommateur tunisien s’est habitué à composer avec la pénurie de lait au point qu’il lui fallait consentir à acheter du lait belge ou espagnol ou d’accepter de réduire sa consommation de lait. Les industriels, de leur côté, ont dû retirer l’ouverture ou « bouchon blanc » du paquet pour réduire les coûts de production.
D’autres professionnels de la filière laitière ont proposé le retour progressif à un emballage moins « design » avec le sachet ou la bouteille plastique.
Malgré tout cela, entre ce qui a été fait et ce qui n’a pas été encore fait, on se retrouve au point de départ. Les problèmes sous-jacents dans la filière laitière remontent à quelques années auparavant et continuent d’avoir cours. Si on connaît les difficultés de certains groupes industriels qui ont dû mettre la clé sous le paillasson à cause de la concurrence et de la crise dans la production laitière, ce sont inévitablement les éleveurs qui sont le maillon faible et qui pâtissent le plus de la situation de crise du secteur.
Les éleveurs les plus touchés par la crise
Ils vendent le lait à perte et ne margent pas pour un sou. Le prix du lait demi-écrémé fait encore jaser dans toutes les sphères, de la production à la consommation. Les éleveurs qui vendent à petit prix leur production à la limite du bradage vivotent. Ce sont comme toujours les trois, quatre ou cinq groupes d’intermédiaires du circuit de distribution qui se remplissent les poches. En attendant la nouvelle crise brandie par les syndicats, même si on peut admettre qu’on est en période de basse lactation, n’est pas à prendre à la légère et risque d’affecter sérieusement la consommation des ménages. De nombreuses voix appellent le gouvernement à revoir à la hausse le prix du lait et de trouver des solutions pour les éleveurs. Karim Daoud, président du Synagri, ne baisse pas le ton affirmant dans une déclaration à la TAP : « Une baisse des quantités de lait produites au cours de la prochaine période est prévue».
Le gouvernement va-t-il avoir de nouveau recours à l’importation comme durant l’année 2018 pour pallier les déséquilibres ? Ou bien va-t-il trouver des solutions radicales pour soigner les maux de la filière laitière qui agonise sur tous les plans ?
Rien qu’au cours des dernières années, la Tunisie a enregistré une baisse de 25% du cheptel de vaches laitières et un recul de 20% de la production nationale, selon le Synagri. Les attentes du syndicat agricole sont triples : augmentation du prix d’achat du litre de lait frais, subventions sur les fourrages et la mise en place d’une politique d’importation des génisses.