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Femmes en prison : Une législation à  revoir


C’est dans le cadre de la campagne internationale placée sous le thème «16 jours d’activisme pour mettre fin aux violences faites aux femmes» que le Centre de recherches, d’études, de documentation et d’information sur la femme (Credif), relevant du ministère de la Femme, de la famille et de l’enfance et des séniors, a organisé une rencontre autour du thème : «Femmes Prisonnières» à son siège à Tunis.


Rares sont les débats et les rencontres organisés autour des femmes prisonnières en Tunisie. Peu d’études et de statistiques qui filtrent sur la situation de ces femmes dans l’univers carcéral aux portes étonnamment hermétiques. Quelques visites sont autorisées pour les médias et les ONG mais elles se font le plus souvent  sous haute surveillance et ne  peuvent nullement dévoiler les carences et certains droits bafoués. Il y a toujours un sourire trompeur qui tente vainement de dissimuler les souffrances d’une femme qui s’est trouvée pour une raison ou une autre derrière les barreaux, loin de sa maison, de ses enfants parfois, et de sa famille.

Un livre offre un moment de liberté
C’est dans le cadre de la campagne internationale placée sous le thème «16 jours d’activisme pour mettre fin aux violences faites aux femmes » que le Centre de recherches, d’études, de documentation et d’information sur la femme (Credif), relevant du ministère de la Femme, de la famille et de l’enfance et des séniors, a organisé une rencontre autour du thème : «Femmes Prisonnières» ce mercredi à son siège à Tunis.

Ce thème revêt une grande importance mais malheureusement on s’y attarde peu, révèle l’activiste et fille d’un ancien prisonnier politique, Lina Ben Mhenni, appelée  à cette occasion à dévoiler, un tant soit peu, la situation des femmes dans le milieu carcéral à travers ses rares visites effectuées aux prisons soit dans le cadre de la collecte des livres qu’elle a entamée depuis 2016 avec son père  et  le concours de l’Omct ou de la projection de films au profit des prisonniers à l’occasion des JCC aux côtés de l’actrice Hend Sabri.
Le livre est une porte de secours pour la femme prisonnière et lui permet donc de se libérer, pour un moment, de l’emprise étouffante de la prison. On a tablé sur 3.000 livres mais on a pu collecter plus de 45 mille. Certaines femmes prisonnières ont demandé plus de livres lors de l’une de mes visites effectuées à la prison de Messaidine (Sousse), explique Lina qui ajoute que le taux des femmes prisonnières est faible et ne dépasse pas les 3%.

Qu’en est-il du respect des droits des femmes prisonnières? L’activiste Lina se pose cette pertinente question d’autant plus qu’en Tunisie en raison notamment de la problématique soulevée le plus souvent sur l’application de la loi dans ces « milieux impénétrables » et à l’abri du regard de la société civile et qui manquent d’équipements et sont dépourvues d’espaces d’animation et de rééducation d’une manière générale.

Quels droits pour la femme prisonnière ?
À cet effet, l’activiste Lina  a rappelé l’importance des règles des Nations unies concernant le traitement des détenues et l’imposition des mesures non privatives de liberté aux délinquantes (Règles de Bangkok) se rapportant à des principes fondamentaux comme la prise en compte des besoins particuliers des détenues dans un souci d’égalité des sexes et à l’admission, et l’hygiène personnelle ainsi que les services médicaux, les contacts avec le monde extérieur, le traitement spécial qui doit être réservé aux femmes enceintes, aux mères allaitantes et mères séjournant avec leurs enfants en prison .
L’oratrice a soulevé, à cet effet, plusieurs carences lors des ses visites à certains milieux carcéraux dans le cadre susmentionné comme l’exiguïté de la salle d’accueil aménagée aux visiteurs des détenues, rendant le contact plus difficile entre ces derniers et leurs parents à la prison civile des femmes à la Manouba, le manque d’infrastructures et d’effectif médical et paramédical.Certes, des visites qui ne peuvent refléter la réelle situation de la femme prisonnière, évoque Lina. «Je n’ai pas eu de contacts directs durant ces visites avec les prisonnières», souligne-t-elle.

Prison de La Manouba , éclaircie dans la grisaille
Selon des visites effectuées par des membres de l’Instance nationale pour la prévention de la torture, toutes les prisons sont surpeuplées hormis celle de La Manouba où le nombre des prisonnières est inférieur au taux de capacité d’accueil mais qui ne manque pas, elle aussi, de carences, à l’instar d’un jardin délaissé, l’absence d’un programme et de cadres éducatifs qualifiés capables de préparer l’enfant à se séparer progressivement de sa mère à l’âge de deux ans quand il quittera le milieu carcéral. Mais on peut dire que c’est la «meilleure» prison pour les femmes.
On est aujourd’hui appelé à se pencher sur des réflexions qui doivent s’inscrire dans le cadre de la réforme de certains textes de la loi pénitentiaire.

Malheureusement, on s’oriente beaucoup plus en Tunisie  vers la privation de la liberté avec les incidences négatives qu’on connaît quand c’est une mère de famille ou une mère qui allaite son enfant et qui se retrouve, des fois,  derrière les barreaux pour des chèques sans provision ou un accident de circulation .La prison devra avoir comme rôle principal la rééducation, et non la punition, fait remarquer Lina Ben Mhenni.

S’instaurant dans le cadre de la campagne «16 jours et tous les jours pour mettre fin aux violences faites aux femmes», cette rencontre-débat autour des femmes prisonnières servira de déclic pour des études plus approfondies sur cette question avec le concours de plusieurs parties issues du gouvernement ou de la société civile, a souligné de son côté la directrice générale du Credif, Najla Allani. Ce seront des études empiriques exploratoires sur la question des femmes prisonnières, qui seront suivies de campagnes de sensibilisation et de plans d’actions en matière de leur réinsertion dans la société.

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