Partout dans le monde, la question du rôle de l’Etat est posée en termes de rupture. Il est clair que l’Etat dans sa définition ancienne a atteint ses limites. Le modèle régalien qui renvoie à une organisation occidentale n’est pas en train de satisfaire le citoyen. Celui-ci ne trouve pas malheureusement auprès de l’Etat la satisfaction de ses besoins. Par ailleurs, il y a de nouveaux modèles aujourd’hui qui apparaissent par rapport à l’Occident : le modèle chinois basé sur une organisation qui n’est pas forcément démocratique, mais qui permet une croissance assez élevée, un enrichissement de la population, un modèle permettant à la classe moyenne de se développer et de s’enrichir davantage.
Donc, la question se pose : quel nouveau modèle pour organiser l’Etat ? Est-ce l’approche occidentale ou l’approche asiatique et en cela, la question se pose également en Tunisie parce qu’on a besoin, aujourd’hui, d’un État qui se reconfigure d’une manière différente pour coller davantage aux besoins de l’économie.
Les besoins sont devenus simples. Dans une économie de transition, l’Etat doit être un acteur fort, celui qui doit mobiliser des investissements dans l’infrastructure, dans tout ce qui touche l’amélioration de l’environnement de l’entreprise pour qu’elle puisse elle-même investir et créer de l’emploi. L’État doit jouer également un rôle essentiel de répartition des richesses, d’où la nécessité d’aborder des politiques fiscale, de change et monétaire différentes. Cela exige la nomination au sommet de l’Etat de vraies compétences, parce qu’il s’agit de concevoir des stratégies en association avec le privé, où s’impose le partenariat public-privé. Il faut aussi qu’on réhabilite un cadre spécial pour pouvoir conduire ces nouvelles politiques.
Le scénario grec a réussi parce qu’il y a eu une prise de conscience de la part de la gauche d’ailleurs, parce que ce sont eux qui ont engagé des réformes profondes, réduit les salaires des fonctionnaires et les pensions de retraite, privatisé les grandes parties des actifs pour pouvoir équilibrer le budget de l’Etat. Ce sont des ministres communistes qui ont pu le faire en recevant de l’UE des aides substantielles. La Grèce a la même population que la Tunisie en nombre d’habitants mais a reçu comme fonds monétaire 85 milliards d’euros comme subventions budgétaires. Par contre la Tunisie n’a même pas obtenu 5 milliards d’euros, donc, nous pouvons appliquer le schéma grec mais à condition d’avoir un soutien financier important comme celui accordé à la Grèce. Certes, on ne fait pas partie de l’Union européenne, mais on doit absolument compter sur nous-mêmes. On doit chercher, avec le rapport qu’on a avec l’Europe, d’autres continents comme la Chine qui est un acteur agissant ayant des programme importants de soutien.
Nous avons un grand déficit commercial que nous devons équilibrer. Essayons donc de compenser ce déficit par d’autres actions, dont l’investissement dans l’énergie solaire, dont peut bénéficier la Chine en tant que partenaire. A partir de là, nous pouvons combler notre déficit énergétique qui pèse trop lourd dans la balance commerciale tunisienne.
De même, la Chine intègre le cercle des pays émetteurs de touristes. Pourquoi ne pas faire une stratégie d’ouverture du marché avec la Chine (développer la langue chinoise, des restaurants chinois,…). Il y a toujours des actions alternatives pour couvrir le déficit commercial. C’est une question de diversification des sources de coopération, parallèlement à l’Europe. La Chine n’est pas à éviter, on peut avoir largement des avantages comparatifs énormes.
En somme, tant qu’on n’a pas changé notre système de gouvernance, on ne peut pas évoluer malgré toutes les bonnes volontés. Nous avons un simple système de gouvernance qui ne peut pas s’adapter à un pays en développement et en transition, qui a besoin de décisions à la fois urgentes et courageuses.