Il a joué durant la période d’or du football tunisien. Les moins de vingt ans ne connaissent pas Bassam Jridi, l’attaquant des années 1980, qui a fait les beaux jours de l’Espérance de Tunis et de l’équipe nationale. Avec lui, nous faisons
une rétro sur sa carrière avec ses périodes de gloire et ses moments de déception, notamment la fameuse finale du Championnat arabe perdue injustement devant l’équipe irakienne d’Al-Rachid.
Démarrage fulgurant, jeu de tête magistral, vitesse de pointe, coup de rein déboussolant et centrage millimétré : autant de qualités chez un même joueur. Nous avons nommé Bassam Jridi, un attaquant emblématique de l’Espérance Sportive de Tunis des années 1980 que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. Il a été un titulaire indiscutable dans la grande équipe de l’EST de Tarak Dhiab, Khaled Ben Yahia, Hassen Faddou, Mohamed Ben Mahmoud, Naceur Chouchène et Nabil Maâloul pour ne citer qu’eux…
Bassam Jridi a fait ses débuts avec les séniors de l’EST en 1980 : « Je suis un pur produit de l’école espérantiste. J’avais à peine 18 ans quand Mokhtar Tlili, alors entraîneur des séniors, m’a fait intégrer l’équipe première. C’était en 1980. Mais pendant quatre ans, je n’ai pas réussi à m’imposer comme un titulaire à part entière. Les recrues avaient la priorité pour jouer. J’ai su me montrer patient. », nous a confié Bassam Jridi.
Lemerre et Zouaoui, ses seconds mentors
Si Mokhtar Tlili a été son premier mentor en 1980, Roger Lemerre, alors entraîneur de l’EST, et Youssef Zouaoui, à la tête de la sélection nationale pour la première fois, ont été les seconds mentors de Bassam Jridi en 1984, l’année où la carrière de Bassam Jridi a réellement débuté : « En 1984, Roger Lemerre était mon entraîneur à l’EST. J’avais fait une bonne fin de saison 1983/1984. L’entame de l’exercice suivant a constitué le vrai démarrage de ma carrière. Le premier match que nous avons disputé à Sousse contre l’Etoile Sportive du Sahel restera à jamais gravé dans ma mémoire.
Certes, nous avons perdu par un but à zéro, mais j’ai sorti un grand match. Je me suis distingué au point que le lundi, au lendemain de la rencontre, j’ai reçu ma première convocation en équipe nationale, alors dirigée par Youssef Zouaoui. Ma première sortie en sélection était contre le Nigeria en match amical. Un test qui s’est soldé par une large victoire (5-0). Sur les cinq buts, j’en ai marqué trois. Comme on dit, l’appétit vient en mangeant. Toujours contre le même adversaire mais en match officiel comptant pour les qualifications à la Coupe du monde de 1986, nous avons perdu au match aller (1-0) à Lagos. Nous avons remporté le match retour sur le score de 2-0. C’est moi qui avais marqué les deux buts de la victoire», se souvient avec fierté l’ancienne gloire « sang et or ».
Enfant du club et formé entre autres par Ridha Akacha, Bassam Jridi a dû se montrer patient en acceptant de faire banquette avec les séniors de l’EST quatre ans durant jusqu’à ce que l’heure de gloire ait enfin sonné. Idem en Equipe nationale où il a gravé les échelons de la catégorie junior jusqu’au jour où Youssef Zouaoui lui a donné sa chance : « Il faut savoir se monter patient et ne pas perdre de vue son objectif. Il m’est arrivé des années durant de faire l’ascenseur entre les catégories junior et sénior. J’ai attendu mon heure à l’EST et elle est venue sous la houlette de Lemerre et Amarildo par la suite. Par ailleurs, mon premier match sous la férule de Roger Lemerre, je l’ai disputé contre la JSK. Je n’ai pas marqué, mais j’ai sorti un bon match. », nous a-t-il indiqué et de s’adresser aux footballeurs d’aujourd’hui : «Si j’ai un conseil à donner à la génération actuelle, c’est de savoir se monter patient. Il faut songer à faire une grande carrière, l’argent suivra. Sur le fond, le football n’a pas changé.
Sur la forme, par contre, les choses ont beaucoup changé. Beaucoup d’argent en jeu et une meilleure médiatisation. Si j’avais à choisir, j’aurais aimé faire carrière actuellement. Si les joueurs de ma génération et moi-même avions eu les privilèges qu’ont les joueurs d’aujourd’hui, nous aurions pu jouer dans de grands clubs européens».
Coupe arabe, l’injustice arbitrale
Sous les couleurs de l’Espérance, Bassam Jridi a remporté beaucoup de titres. Des souvenirs, il en a gardé, des bons et des mauvais : « Il y a d’abord le premier but que j’ai marqué avec les séniors de l’EST. C’était en 1980 contre l’Etoile Sportive du Sahel. Je me souviens aussi du joli but que j’ai marqué lors de la saison 1984-1985 contre la Jeunesse Sportive Kairouanaise. Nous avons battu la JSK par trois buts à un et, par là même, remporté le championnat. Mais le plus beau but de ma carrière, en tout cas celui resté gravé dans ma mémoire, est celui marqué contre l’Union Sportive Monastirienne au Stade d’El Menzah.
C’était en 1987, un but magistral : j’ai récupéré le ballon au centre du terrain, j’ai fait un contrôle orienté et j’ai poursuivi l’action jusqu’à mettre la balle dans les filets. Quant au plus mauvais souvenir de toute ma carrière, c’est sans aucun doute la finale de la Coupe arabe perdue contre l’équipe irakienne Al-Rachid en 1986. Au fait, une injustice arbitrale était la cause de notre défaite et cela m’est resté en travers de la gorge. En équipe nationale, mon plus mauvais souvenir est l’élimination devant l’Algérie en éliminatoires de la Coupe du monde de 1986».
Une carrière pleine, mais…
Quand on lui demande s’il est satisfait ou pas de sa carrière de footballeur et s’il estime qu’elle a été pleine, notre interlocuteur répond par l’affirmative : «Oui, sur l’ensemble, j’estime que j’ai fait une carrière pleine aussi bien à l’Espérance de Tunis qu’en équipe nationale. De mon temps, j’étais deuxième meilleur buteur de tous les temps de l’équipe nationale après Ezzedine Chakroun qui ne me devançait que d’un seul but».
Sauf que Bassam Jridi fait partie de cette génération d’or des footballeurs tunisiens des années 1980 qui n’ont pas eu la chance de se qualifier à la phase finale de la Coupe du monde : «Evidement que j’aurais aimé disputer la Coupe du monde. Une participation à la Coupe du monde aurait donné une autre dimension à ma carrière. Mais je ne suis pas le seul. Je fais partie de toute une génération qui n’a pas eu cette chance-là. Pourtant, dans les années 1980, il y avait une génération de footballeurs tunisiens qu’on ne fait plus.
Il y avait entre autres Abdelhamid Hergal, Khaled Ben Yahia, Abdelkader Rakbaoui, Lotfi Lahsoumi, Hamda Ben Doulet et la liste est longue. Mais vous savez, à l’époque, la concurrence était rude avec les grandes nations du football africain telles que le Cameroun, l’Egypte et le Nigeria. De plus, le quota de l’Afrique se limitait à deux places pour la Coupe du monde. Avec l’Espérance de Tunis, s’il y a un titre que je regrette de ne pas avoir remporté, c’est la Ligue des champions. Le match contre Gor Mahia en 1987 est, par ailleurs, l’un de mes plus mauvais souvenirs ».
Le football est ainsi fait. La carrière d’un footballeur est faite de bons et de mauvais souvenirs. Celle de Bassam Jridi ne déroge pas à la règle. Toutefois, ce genre d’attaquants, on aimerait que le football tunisien puisse en enfanter encore et encore.