Dans la foulée des tractations, des négociations, des déclarations-pressions et des  communiqués contradictoires publiés quotidiennement accompagnant le processus de formation du gouvernement depuis la désignation d’Elyes  Fakhfakh à sa tête par le  Président de la  République Kaïs Saïed, les Tunisiens ont compris que, cette fois, la formation du gouvernement n’obéira pas au principe des  quotas dans  le sens que chaque parti qui acceptera de prendre part à la future équipe ministérielle aura un nombre de  ministres ou de  secrétaires d’Etat conformément à sa représentativité au sein du Parlement (nombre de députés) et  aussi à son  poids réel sur la scène  politique nationale.

Rompre définitivement avec  la «logique du partage du pouvoir-butin», choisir les ministres sur la base de leur compétence, de  leur intégrité  et  du projet qu’ils  peuvent présenter pour la promotion du ministère auquel ils aspirent et constituer,  enfin, l’équipe gouvernementale sur la base d’un programme commun ayant pour but la concrétisation des objectifs et  des idéaux de la révolution, n’est-ce pas l’essentiel des promesses développées par l’ensemble des partis politiques lors de la campagne électorale en prévision des législatives du 6 octobre 2019 ?

Malheureusement, ces promesses n’ont valu, encore une fois, que pour ceux qui les ont crues et s’attendaient à vivre un nouveau processus de formation d’un gouvernement fondé sur un projet national unificateur ou au moins consensuel, un projet dont la concrétisation sera confiée aux personnalités les plus compétentes et les plus rayonnantes, loin de toute considération politique ou agenda partisan.

Les observateurs, les analystes et le citoyen lambda suivant toujours ce que les politiciens post-révolution font de la Tunisie se trouvent aujourd’hui obligés de reconnaître que rien n’a changé, que les vieux démons se sont réveillés et que l’appétit des partis politiques (même ceux qui ne disposent que de trois ou quatre députés) est devenu de plus en plus insatiable.

Pis encore et face à cette atmosphère où l’objectif principal de tout un chacun s’est transformé en une quête permanente d’obtention du maximum en matière «de butin de guerre», le chef du gouvernement désigné,  Elyes Fakhfakh, s’est trouvé lui aussi dans la position inconfortable de répondre par l’affirmative aux exigences des uns (des ministères auxquels on tient à tout prix) et à satisfaire les caprices des autres (à l’instar de la condition d’exclure tel ou tel parti de la formation du gouvernement), au point de compromettre la  survie du gouvernement qu’il annonce avoir réussi à former, avant même que le président de la République ne prenne connaissance de la liste des ministres qui le composent.

Et reste posée la question suivante : y a-t-il une chance ou une opportunité réelle de voir les Tunisiens assister à l’émergence d’une équipe ministérielle qui échappe à «la logique irréversible» des quotas partisans et «du partage incontournable du butin» ?

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