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Savoir récompenser le sacrifice

Comme chaque année, la Tunisie célèbre l’anniversaire de la création des forces de sécurité. Certes, à cause de la pandémie de coronavirus, la célébration n’a pas été faite en grande pompe. Mais cet événement,  censé être un moment solennel, a non seulement été terni par le suicide d’un agent de police, mais aussi par le prélèvement d’une journée de travail sur les émoluments des policiers au profit du budget de l’Etat à l’instar des autres salariés. C’est ce qui a poussé le syndicat des fonctionnaires de la direction générale de la sécurité publique à saisir le Tribunal administratif pour annuler cette mesure qui ne fait que saper le moral des troupes en ces temps déjà très durs pour les agents de la paix. En effet, au lieu d’encourager les différents corps sécuritaires à fournir davantage d’effort en ces circonstances dans lesquelles vit le pays, les autorités ont préféré imposer des prélèvements aux forces de sécurité.

Pourtant, l’institution sécuritaire a toujours été aux premiers rangs dans la lutte contre les crimes et, aujourd’hui, elle se trouve au front de la lutte contre le coronavirus malgré le manque d’équipements de prévention.

Si l’on sait les sacrifices consentis et le nombre de martyrs tombés au champ d’honneur pour préserver notre sécurité, l’on ne peut que s’interroger sur la stigmatisation dont fait l’objet encore, et depuis une dizaine d’année, ce corps à qui incombe la difficile mission d’instaurer la paix et de rétablir l’autorité de l’Etat sur le terrain.

Même ce moment de fête ne doit pas occulter la vérité sur ces forces en butte au rejet, à la violence, la misère sociale et la détresse psychologique. Au contraire, il faut saisir l’occasion pour souligner aussi l’absence cruelle de médiation avec les éléments qui composent un corps qui remplit avec discrétion ses fonctions malgré son souci d’améliorer les conditions de travail des agents confrontés quotidiennement à la dangerosité particulière que présente une population de délinquants en surnombre et dont la gravité des délits est multiple. Outre son combat sans relâche contre les terroristes.

En effet, il est temps d’engager un vrai débat sur les moyens à même de permettre aux forces de police de disposer des outils qui leur garantissent au mieux la possibilité de participer pleinement à l’œuvre de justice. Car il est difficile de faire appliquer la loi indispensable au maintien d’un État de droit, d’exiger des agents d’être exemplaires et de faire régner dans les rues avec fermeté les règles du droit, si leur métier est en lui-même une zone de non-droit. Le moment est venu pour revoir la carrière des policiers et de la considérer à la mesure de l’importance de son rôle pour la société. En effet, la reconnaissance pour ceux qui sont engagés dans le service d’ordre et l’estime pour le travail courageux et extrêmement difficile qui est le leur passent par des mesures immédiates à la hauteur du métier.

Ces mesures doivent non seulement améliorer les conditions d’exercice, la modernisation des moyens de surveillance mais aussi permettre une meilleure équité entre ce corps de métier et celui des autres forces de sécurité, que ce soit en termes d’évolution dans les grades ou des avantages socio-professionnels.

Il faut reconnaître aussi qu’à ce jour, les postures politiciennes ne sont pas à la hauteur de la situation. La preuve vient de l’hémicycle du Bardo où quelques députés à la voix éraillée préfèrent faire l’apologie des terroristes et tirer par leurs formules assassines sur les policiers. En pareils moments, c’est bien d’assurer aux forces de l’ordre notre soutien, notre confiance et notre reconnaissance mais le plus important est de poser les questions qui les taraudent sans tabou, sans excès, sans stigmatisation et sans amalgame non plus mais aussi sans faiblesse. On ne doit pas récompenser le sacrifice par l’ingratitude.

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