« La direction générale de la Douane a été informée par un fax de la décision prise par le ministère des Finances », explique au journal La Presse le porte-parole de la Douane. S’apparentant à un limogeage pur et simple, la mise à la retraite forcée de 21 cadres n’a pas été commentée par le département en question et les explications tardent à venir. « La suspicion de corruption est présente », nous confirme une source sécuritaire et les cadres concernés risquent prochainement des poursuites judiciaires
Le ministre des Finances frappe du poing sur la table et met à la retraite forcée 21 officiers relevant de la direction générale des douanes impliqués dans diverses affaires de corruption. L’information a été confirmée au journal La Presse par le porte-parole de la Douane, Haithem Zenad. Ce dernier a profité de l’occasion pour nous expliquer que cette décision ne constitue pas une première puisque juste après la révolution, une vingtaine d’officiers et d’agents ont subi le même sort pour les mêmes raisons.
Selon Zenad, la direction générale de la Douane a été informée par fax par le ministère des Finances de la mise à la retraite forcée et prématurée de 21 cadres douaniers, soulignant à cet effet qu’elle n’a pas pris part à cette décision et qu’elle n’a pas été saisie de l’affaire dans ses différentes étapes. Il ne nous dira pas plus, mais nous conseille de contacter le porte-parole du ministère des Finances. D’emblée, que d’interrogations autour de la « mise à l’écart » de la direction générale de la Douane dans la décision prise !
Il s’agit de « décisions individuelles » qui ne concernent que ces 21 officiers, a précisé la TAP, ajoutant que le ministère des Finances a pris cette décision en tant que sanction administrative, d’après une source informée de la Douane tunisienne. Les cadres de la douane, dont les noms circulent déjà sur les réseaux sociaux, risquent des poursuites judiciaires en plus de cette mise à la retraite forcée, nous fait savoir une source sécuritaire qui ajoute qu’ils relèvent de différents services douaniers implantés sur tout le territoire tunisien.
La décision a donc pris de court la direction générale de la Douane. Elle a été prise par le ministère des Finances en coordination, vraisemblablement, avec le département de Mohamed Abbou qui se trouve en arrière-plan. Mais il va sans dire qu’elle est bien justifiée eu égard aux multiples affaires de suspicion de corruption qui ne cessent de coller à la peau de certains cadres et agents douaniers et qui ont toujours constitué, avec certains politiques et hommes d’affaires véreux, le maillon fort de la chaîne. Cela augure un changement radical dans la lutte anticorruption et une volonté affichée de briser l’omerta autour de la question. Mais le mystère reste total concernant cette affaire en raison d’une communication généralement déficiente des autorités de tutelle.
Le 30 avril dernier, un douanier, un chef de groupe, a écopé de deux ans de prison après avoir été filmé en flagrant délit de vol de vêtements d’un conteneur au port de Radès. Il a fallu la diffusion de la séquence vidéo sur les réseaux sociaux pour qu’une enquête soit ouverte par les services sécuritaires à Ben Arous. « Ces vols sont malheureusement courants face à l’impunité régnante et l’absence de mesures disciplinaires draconiennes », nous informe la même source sécuritaire. Le corporatisme syndical aidant dans la plupart des cas de vol enregistrés, on se trouve confronté à un phénomène qui a tendance à empirer.
Coup dur pour ce secteur et notamment pour l’administration de la Douane qui a été choisie comme la meilleure institution publique dans le domaine de la lutte contre la corruption par l’Instance nationale de lutte contre la corruption (Inlucc) le 18 juillet 2019. Un couronnement qui a suscité à cette époque plusieurs interrogations en raison des suspicions de corruption qui gangrènent le secteur en général.
Cette nouvelle affaire ne doit pas pour autant saper les efforts fournis dont la mise en place depuis 2018 d’îlots d’intégrité comportant le Bureau frontalier des douanes de Goulette-Nord, le bureau frontalier des douanes de Ras Jedir et la Direction des régimes douaniers (DRD) ainsi que bien d’autres mesures visant la lutte contre la corruption.