«Ce qui est encore plus grave c’est le fait qu’une collectivité locale légifère dans le domaine religieux», souligne Fadhel Mahfoudh, ancien bâtonnier et ex-ministre auprès du chef du gouvernement chargé des Relations avec les instances constitutionnelles.
Ce n’est pas la décision prise par le maire de la ville du Kram, tête de liste du parti Ennahdha dans les élections municipales de 2018, de créer le fonds pour la zakat qui surprend, c’est surtout le silence du pouvoir central et notamment du ministère des Collectivités locales et du gouverneur de la ville de Tunis à cet égard. Ballon d’essai ou coup de force, après le refus du projet de loi relatif à la création d’un fonds pour la Zakat proposé par le parti Ennahdha à l’ARP? L’initiative risque tout de même de faire des émules et de se généraliser dans les jours qui suivent.
Le ministère des collectivités locales garde le silence
Aucune réaction de la part du ministère des Collectivités locales n’est venue perturber la quiétude de ce maire qui n’en est pas à sa première. Fethi Laâyouni, qui réclame toujours son indépendance de tout parti politique, n’a pas hésité, à peine installé dans ses nouvelles fonctions, à déclarer qu’il ne procédera pas, en tant que maire, au mariage civil entre Tunisiennes et non-musulmans. Il fut très vite rappelé à l’ordre à l’époque par l’ancien ministre, Mokhtar Hammami, qui a menacé de dissoudre le conseil municipal au cas où le maire mettrait à exécution ses intentions. A titre de rappel, le parti Ennahdha s’est clairement démarqué de la position du maire à cette époque.
Mais dans cette commune marquée par la marginalisation, l’augmentation de la délinquance et du chômage, une frange de citoyens évoque ironiquement l’avènement d’un «émirat islamique» au Kram depuis la mise en place du conseil municipal actuel et commence à se poser une multitude de questions autour de l’avenir de la commune d’autant plus que depuis la mise en place du nouveau conseil les projets de développement durable ont cédé la place à une gestion cafouilleuse et à des calculs partisans.
Le fonds pour la zakat sera inauguré aujourd’hui, mardi 19 mai, selon le maire en question. «La loi organique n° 2018-29 du 9 mai 2018, relative au Code des collectivités locales, permet aux municipalités de créer des fonds spécifiques pour assurer des services publics aux citoyens. Mon initiative est légitime et constitutionnelle. En effet, l’article 17 stipule que «Les collectivités locales gèrent les fonds qui leur sont alloués au titre du transfert des compétences conformément au principe de la libre administration», rassure pour sa part le maire en question.
Une décision anticonstitutionnelle
«Il s’agit d’un précédent très grave qui risque de faire des émules au niveau d’autres communes et chambarder de fond en comble l’ordre qui régit le pouvoir local et sa relation avec le pouvoir central », soulignent certains observateurs. La Ligue tunisienne des droits de l’homme s’est insurgée contre cette décision qui «s’apparente à une rébellion contre les institutions de l’Etat et une tentative d’introduire certains préceptes de l’Etat religieux». La ligue a appelé les hautes autorités à mettre fin à de telles pratiques.
De son côté, l’Observatoire national pour la défense de la civilité de l’Etat a vivement condamné cette décision qu’il a qualifiée de «grave violation à la constitution».
D’après Mohamed Fadhel Mahfoudh, ancien bâtonnier et ex-ministre auprès du chef du gouvernement chargé des Relations avec les instances constitutionnelles, la décision de créer un fonds pour la Zakat constitue une violation de l’article 6 de la Constitution qui stipule que «l’État protège la religion, garantit la liberté de croyance, de conscience et de l’exercice des cultes. Il assure la neutralité des mosquées et des lieux de culte de l’exploitation partisane. L’État s’engage à diffuser les valeurs de modération et de tolérance et à protéger le sacré et empêcher qu’on y porte atteinte. Il s’engage également à prohiber et empêcher les accusations d’apostasie, ainsi que l’incitation à la haine et à la violence et à les juguler»
«Ce qui est encore plus grave c’est le fait qu’une collectivité locale légifère dans le domaine religieux», explique-t-il.
Du côté des représentants des partis politiques, le ministre de la Sant, Abdellatif Mekki, s’est mezza voce prononcé en faveur du maire indépendant et tête de liste du parti Ennahdha aux élections municipales. «Ceux qui sont d’avis différent peuvent déposer plainte auprès du Tribunal administratif», a-t-il expliqué lors de son entretien diffusé sur une chaîne de télévision privée. Une position qui n’est pas partagée avec celle du parti d’Abir Moussi. Le Parti Destourien Libre a en effet dénoncé dans un communiqué publié le 17 mai la décision prise par le maire du Kram et sa violation de la Constitution du pays, appelant le gouverneur de Tunis à tenir une réunion urgente du conseil régional en vue d’annuler cette décision.
Il est à souligner que c’est le parti Nida Tounes qui a devancé la liste du parti Ennahdha lors des élections municipales en 2018 mais la présidence du conseil municipal est revenue en fin de compte à Fethi Layouni qui ne cesse de défrayer la chronique et fait plonger aujourd’hui dans le doute le principe de la démocratique participative.
THOMAS BAILLY
20 mai 2020 à 20:44
Pourquoi est ce que créer un bar pour se souler et se déshabiller devant le public dans un théâtre fait partie des libertés alors que faire un fond pour aider les citoyens pauvres et necéssiteux est hors la loi, cessez votre terrorisme inttelectuel et arrêtez d’être dogmatique et stalinien.