Accueil A la une Covid-19 | Artisanat : Plus de 50% des métiers menacés de disparition

Covid-19 | Artisanat : Plus de 50% des métiers menacés de disparition

Jour après jour, les effets concrets de la crise sanitaire du coronavirus se font sentir, mais personne n’est capable de mesurer son impact réel qui dépendra de la durée de la pandémie et d’une éventuelle seconde vague. L’artisanat ne fait pas exception à cette règle : le secteur est actuellement à l’arrêt total et les artisans font face au danger immédiat de voir leurs moyens de subsistance détruits par l’impact économique du Covid-19.

Depuis le déclenchement de la pandémie et la prescription des premières mesures gouvernementales destinées à en réduire l’impact et à aider les entreprises durant la crise liée au coronavirus, les artisans ne cessent de tirer la sonnette d’alarme quant à la survie du secteur.

Arrêt total de l’activité

D’après Salah Amamou, président de la Fédération nationale de l’artisanat (Fena), d’habitude, plus de 90% des produits artisanaux sont vendus dans des salons, expositions ou foires, dans les lieux touristiques et sur les marchés d’exportation. Mais après la propagation du coronavirus, les secteurs de l’événementiel, des foires et salons ont connu des annulations massives et les reports continuent de pleuvoir dans ce contexte de pandémie. Idem pour les sites touristiques qui restent encore fermés. Ce qui fait que l’impact sur le secteur de l’artisanat se fait sentir dès le premier jour et sera énorme. « Commandes annulées, accumulation du stock invendu chez les artisans, annulation de plus de 50 salons entre les mois de mars et d’avril, arrêt total de l’activité… Multiples sont les difficultés rencontrées par les artisans en ces temps de confinement », précise Amamou, dans une déclaration accordée au journal La Presse.

Il ajoute que suite à toutes ces annulations, le stock invendu chez les artisans est estimé à 40 millions de dinars pendant ces deux mois, un chiffre qui risque d’augmenter face à un virus dont on sait encore très peu et à une pandémie dont on apprend tous les jours. « Il en sera de même pour les mois de juin, juillet et août…Les artisans, dont l’avenir est incertain, sont malheureusement impuissants et incapables de combattre cet ennemi invisible, puisque leurs moyens de subsistance se retrouvent menacés et les rendent d’autant plus vulnérables aux crises à venir… Il faut le dire et le redire, les artisans sont confrontés à une situation plus difficile car selon les prévisions, plus de 50% des métiers pourraient disparaître définitivement si on continue sur cette voie. D’où l’urgence de mettre en place une stratégie de relance pour aider l’artisanat, un secteur qui cherche encore à sortir des sentiers battus », explique Amamou.

Des demi-mesures !

Amamou indique que le secteur de l’artisanat tunisien regroupe plusieurs catégories. Il existe les entreprises structurées (sociétés anonymes, Sarl, Suarl) qui représentent un pourcentage minime. Cette catégorie peut bénéficier de l’appui financier estimé à 500 millions de dinars et mis en place par le ministère de tutelle au profit du secteur du tourisme et de l’artisanat. Il y a aussi les artisans soumis au régime forfaitaire qui représentent un pourcentage considérable. Pour cette catégorie, le ministère a annoncé la mise en place d’une ligne de crédit de 10 millions de dinars pour fournir la liquidité aux artisans en leur permettant de payer les salaires au cours de la période mars 2020 – mars 2021. S’agissant des artisans travaillant à la pièce, ils auront le droit à la subvention de 200 dinars au titre du chômage technique. « Jusque-là, on ne peut que saluer une telle initiative. Mais ce qui nous a surpris, c’est qu’on a constaté un blocage incompréhensible au niveau du décaissement de la subvention de 200 dinars. A ma connaissance, sur les 180 mille artisans inscrits à l’Office national de l’artisanat tunisien (Onat), aucun d’entre eux n’a profité de cette subvention, bien que toutes les procédures aient déjà été effectuées », regrette-t-il.

Pour sauver les 8.000 entreprises artisanales qui opèrent actuellement, Salah Amamou indique que la solution la plus adéquate réside dans la commercialisation des produits artisanaux locaux en activant un ancien décret-loi qui date de 2010 et qui incite les entreprises publiques à s’engager dans l’achat des produits artisanaux pour leurs équipements généraux qui regroupent tous les matériaux, mobiliers, fournitures, accessoires… « Selon ledit décret, 20% des équipements généraux des entreprises publiques (bureaux, tableaux, accessoires, tapis…) devrait être des produits artisanaux locaux, alors que sur le terrain, ce n’est plus le cas puisque les équipements des entreprises publiques sont 100% des produits industriels…A vrai dire, ce taux de 20% est capable de sauver le secteur de l’artisanat tunisien d’un grand danger et d’un futur voué à la faillite. Mais malheureusement, l’artisanat est le grand oublié de cette crise sans précédent. Si le gouvernement ne change pas de posture et de stratégie, l’artisanat n’aura pas de place dans le paysage économique tunisien », regrette Amamou.

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