Accueil Economie Impact de la crise du Covid-19 sur les entreprises tunisiennes : Les PME tournent au ralenti

Impact de la crise du Covid-19 sur les entreprises tunisiennes : Les PME tournent au ralenti

Selon les résultats d’une enquête, les besoins de financement des entreprises sur 3 mois s’élèvent à plus de 554 MDT.

65% des entreprises affirment qu’elles ont besoin d’au moins 3 mois d’activité pour un retour à la normale de leur cycle d’exploitation. C’est l’une des données phares  révélées par une enquête réalisée par l’Association professionnelle tunisienne des banques et des établissements financiers (Aptbef) et Tunisia Jobs et dont l’objectif est de mesurer l’impact de la crise du Covid-19 sur les entreprises tunisiennes. Il s’agit d’un questionnaire qui a été diffusé par les banques et les établissements financiers auprès de 2.451 entreprises durant la période qui s’étalait de la mi-mai à fin juin. Outre l’évaluation des répercussions de la crise liée au coronavirus sur les PME tunisiennes, le questionnaire sert également de référence pour les banques en leur fournissant des data insights et des indicateurs-clés qui permettent  aux institutions financières d’optimiser le financement des entreprises en phase de crise et post-crise.

Une conférence de presse a été organisée, jeudi 9 juillet à Tunis, par les deux organisations, pour présenter les résultats de ladite enquête, et ce, en présence du gouverneur de la Banque centrale (BCT) Marouen El Abassi et du président de l’Aptbef, Habib Ben Hadj Kouider.

Dans son allocution d’ouverture, Ben Hadj Kouider a souligné que la crise du coronavirus a mis à nu l’ampleur de la pauvreté dans le monde, notamment en Tunisie. C’est dans ce contexte qu’il a mis en exergue l’impératif de renouer avec une croissance inclusive qui “met l’Homme au cœur de l’économie”. “Aujourd’hui, en l’absence de cette croissance inclusive, le pays devient pratiquement ingouvernable. En Europe, les Gilets jaunes sont la preuve que l’on n’a pas intégré l’homme au cœur de la croissance. Ce qui se passe maintenant aux Etats-Unis révèle que  toute une communauté de couleur n’est pas intégrée”, a-t-il noté.

Un soutien à tour de bras

Énumérant les principales circulaires publiées par la BCT, en guise d’accompagnement des mesures financières qui ont été décidées par le gouvernement, El Abassi a rappelé que la BCT “a recommandé au secteur financier tunisien d’apporter son appui réel au secteur afin de minimiser l’impact des effets de la crise sur les différents acteurs économiques”. A titre d’exemple, on cite principalement la circulaire n°2020-06 du 19 mars 2020 et qui consiste à reporter le paiement des échéances des crédits accordés aux entreprises et aux professionnels exigibles, en principal et intérêts, durant la période allant du 1er mars 2020 jusqu’à fin septembre 2020. Ce report, a-t-il noté, concerne les clients classés 0 et 1 à fin décembre 2020 et peut s’étendre à ceux classés 2 et 3 afin d’en faire profiter le maximum d’entreprises. Il a également évoqué, l’assouplissement qualitatif en matière de politique monétaire qui consiste  à élargir la gamme des collatéraux éligibles au refinancement à ces crédits exceptionnels pour les clients classés 1,2 et 3. Ces nouveaux financements peuvent être couverts par le mécanisme de garantie Sare géré par la Sotugar instauré dans le cadre des mesures gouvernementales visant à atténuer les répercussions de la propagation de la pandémie.

Concernant la bonification de 2 % dédiée au secteur touristique et qui  a été décidée par le gouvernement, le gouverneur de la BCT a affirmé qu’une circulaire est en cours d’élaboration, à cet effet.

Par ailleurs, le gouverneur de la BCT a souligné que la crise  du Covid-19 a été “un vrai catalyseur pour développer la digitalisation des services financiers et notamment les services de paiement mobile”.  Il a cité, à cet égard,  la circulaire n°2020-11 publiée le 18 mai 2020 portant sur les conditions de fourniture des services de paiement mobile domestique et dont l’objectif est de promouvoir un écosystème “propice au développement de ce mode de paiement digital”. “La mise en place de ce cadre réglementaire a permis aux banques de fournir des services bancaires de proximité et de développer des solutions financières numériques”, a-t-il précisé. Et d’ajouter : “consciente de l’importance de l’innovation pour favoriser le développement du secteur financier, la Banque centrale de Tunisie a lancé officiellement la Sandbox réglementaire, définie comme étant un environnement de test qui permet de surveiller l’expérimentation de solutions innovantes proposées par des Fintech à petite échelle et avec des clients volontaires. L’objectif étant de garantir l’inclusion et l’innovation financière et changer le modèle bancaire en allant vers la restructuration et la digitalisation des banques”.

Des résultats mi-figue mi-raisin

Pour planter le décor, il est à préciser que l’enquête a été menée auprès de 3.000 entreprises de tailles différentes et  opérant dans des secteurs d’activité diversifiés, dont 2.451 ont répondu au questionnaire. Il s’agit d’un échantillon représentatif des secteurs économiques. 26% des sociétés concernées par l’enquête font des chiffres d’affaires inférieurs à 250 mille dinars et 32% font des chiffres d’affaires compris entre 250 mille et 1 million de dinars. Seulement 14% d’entre elles enregistrent des CA supérieurs à 5 millions de dinars. 59% d’entre elles emploient moins de 10 salariés.

S’agissant des répercussions financières, notamment au niveau de l’évolution des chiffres d’affaires durant la crise, l’étude a révélé que le tourisme, voyages et loisirs est le secteur le plus touché  avec une baisse du CA de l’ensemble des entreprises du secteur supérieure à 80%, suivi par le secteur de la  communication et les médias à près de 60%. 54% des entreprises dont les bénéfices ont baissé de plus de 50% sont des sociétés de BTP et de l’immobilier. Par contre, les secteurs où  les entreprises ont accusé un  recul  de moins de  10% de leurs bénéfices sont l’agriculture avec 21% des sondés, le secteur études et conseil avec 16% et l’ICT (informatique et télécommunication) avec 9%.

En termes de capacité de financement, l’enquête a démontré que  46% des entreprises ont une capacité d’autofinancement en mois d’activité qui ne dépasse pas 1 ou 2 mois. Ce taux atteint  55% dans le secteur de l’agroalimentaire.

Toujours en termes de financement, les besoins de financement des entreprises sur 3 mois, selon l’enquête, sont de l’ordre de plus de 554 MDT. Les secteurs d’activité ayant le plus de ressources financières sont le commerce et la distribution (plus de 145 MDT) et l’industrie manufacturière (plus de 112,5 MDT).

Par ailleurs, l’étude a mis à nu la dépendance des entreprises de l’import. En effet,  11% des entreprises sondées sont dépendantes de l’export tandis que  la moitié des entreprises dépendent fortement de l’import.

En ce qui concerne la reprise des activités et le retour à la normale du cycle d’exploitation, l’étude dévoile une sorte d’optimisme des entreprises. En effet, 73% des entreprises auront repris leur activité avant fin juillet dont 42% ont retrouvé leur cycle complet d’exploitation avant fin septembre. 11% d’entre elles  ne reprendront leur activité qu’à partir d’octobre 2020 avec un retour à la normale du cycle d’exploitation attendu à partir de janvier 2021. 65% des sociétés ont besoin d’au moins 3 mois d’activité pour un retour à la normale de leur cycle d’exploitation. Sur le plan risque-crédit, une mise en corrélation du score risque crédit avec le score impact crise du Covid-19, a démontré qu’une grande part des  PME présente un risque de défaut de paiement étant donné qu’elles sont  à la fois  fortement impactées par la crise et qu’elles n’ont pas une solidité suffisante en matière de risque-crédit.

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