Comme tous les secteurs d’activité, celui de l’artisanat souffre depuis des années déjà de problèmes épineux qui menacent son existence. Avec le Covid-19, la situation a empiré, dans la mesure où les ventes ont connu une baisse sans précédent.
Les effets du Covid-19 ont pesé de tout leur poids sur un secteur vulnérable, à savoir celui de l’artisanat qui est fortement lié au secteur du tourisme. Suite au confinement général qui a nécessité la fermeture des frontières aériennes, terrestres et maritimes, la demande a connu une régression notable, ce qui a eu pour conséquence la chute vertigineuse des revenus des artisans. Le secteur fait travailler, pourtant, une main-d’œuvre nombreuse composée de jeunes apprentis et d’artisans formés pour effectuer quelques tâches à la main. Outre les bijoux divers, les artisans fabriquent aussi des chaussures, des selles, des objets de décoration et des bibelots. La visite des souks d’artisanat occupe une place de choix dans l’emploi du temps des touristes qui visitent notre pays.
Les produits d’artisanat sont fabriqués avec des matières premières du terroir comme le bois d’olivier qui est fourni par certains agriculteurs. Ce bois est obtenu après l’élagage des oliviers et sert à construire plusieurs objets utiles comme les ustensiles de cuisine, les chaises et les tables. C’est un travail minutieux qui nécessite des heures, voire des jours de travail. Ces objets font face, cependant, à une concurrence rude avec d’autres objets venus de pays étrangers et notamment asiatiques qui se sont mis à fabriquer des objets de décoration artisanaux qui rappellent la Tunisie, comme les dromadaires, le désert et les habitations rurales.
Assainir le secteur de l’artisanat
Plusieurs artisans ont appelé les pouvoirs publics à commencer à assainir le secteur de l’artisanat dans les plus brefs délais en interdisant, par exemple, l’importation de ces articles venus de l’extérieur et dont le prix est relativement à la portée. En achetant ces produits, le touriste croit avoir emporté un souvenir de Tunisie, ce qui n’est pas le cas. Certains articles ne sont pas très prisés par les Tunisiens comme les chéchias qui ont fait l’objet de modifications pour inciter les jeunes à les porter. Malheureusement, les achats sont rares et les artisans ne sont pas en mesure de rentrer dans leurs frais. C’est aussi le cas des articles vestimentaires comme les djebbas, les burnous et autres robes traditionnelles.
C’est pour cela que certaines activités artisanales sont de plus en plus délaissées au risque de disparaître totalement. Les Tunisiens ne semblent plus très intéressés par l’artisanat et préfèrent plutôt acheter des articles modernes selon la nouvelle tendance de la mode. Même les tapis kairouanais n’ont plus la cote sur le marché vu leur prix relativement élevé, ce qui ne permet pas au consommateur local dont le pouvoir d’achat ne cesse de régresser de se procurer un tel produit même s’il en a besoin. C’est dire que le secteur de l’artisanat vit au jour le jour et l’artisan ne sait pas quel est l’avenir de son activité au cours des années à venir.
Spécificités régionales à valoriser
L’avantage du secteur de l’artisanat est qu’il est réparti dans presque toutes les régions de Tunisie. Chaque région a ses spécificités et ses spécialités et ses produits d’artisanat s’inspirent des us et coutumes. Souvent, le métier est hérité de père en fils et malgré la crise qui frappe de plein fouet le secteur du tourisme, ces artisans continuent de travailler faisant bon cœur contre mauvaise fortune. Les potiers de Nabeul, par exemple, continuent à fabriquer des pots, des vases pour les exposer aux touristes locaux et étrangers. C’est le cas aussi des artisans de Kairouan qui inventent chaque jour de nouveaux dessins pour orner leurs tapis fabriqués manuellement. Les régions du Nord-Ouest s’intéressent quant à elles à la confection des djebbas et des burnous qui sont vendus sur place ou à Tunis et dans les grandes villes.
La main-d’œuvre constitue aussi un problème grave pour ce secteur dans la mesure où plusieurs jeunes ne veulent plus s’adonner à l’artisanat vu ses revenus modiques. Certains fils d’artisans ont fermé la boutique de leur père pour la transformer en local de vente des produits hight tech. D’autres se sont orientés vers d’autres spécialités modernes comme l’informatique et le commerce d’articles de prêt-à-porter. Même les centres de formation professionnelle dans les métiers de l’artisanat sont désertés par ces jeunes.
D’où la nécessité d’asseoir une stratégie à moyen et long terme pour promouvoir l’artisanat et aider les artisans à l’étranger du pays à commercialiser leurs produits à large échelle, en Tunisie et l’étranger. Il s’agit aussi de revoir les programmes de formation dans les métiers d’artisanat en incitant les jeunes à se former grâce à une prime mensuelle et la gratuité du transport, et ce, pour les motiver à se former avant de lancer leur propre projet.