L’Indice de perception de la corruption (IPC) a été établi, pour la première fois, en 1995 par Transparency international en tant qu’indicateur composite utilisé pour apprécier les perceptions de la corruption dans le secteur public dans 180 pays et territoires.
Le rapport sur la corruption pour l’année 2019 étant publié le 23 janvier 2020 par Transparency international. Une note synthétique a été publiée par l’Institut tunisien de la compétitivité et des études quantitatives (Itceq), élaborée par Mme Hajer Mehouachi, focalisée sur l’analyse des indicateurs dans les pays arabes et maghrébins, et notamment en Tunisie.
«En Tunisie, le manque d’application des lois et règlements est un défi majeur. Sans mécanismes de mise en œuvre appropriés et décrets administratifs, les lois resteront sans effet», note Transparency international.
«Courbe ascendante»
D’après les résultats enregistrés pour l’année 2019, et en perdant un rang par rapport à 2018, la Tunisie arrive à la 74e place sur 180 pays. En Afrique, elle est devancée par 9 pays. Au niveau des pays arabes, elle occupe la 6e place (contre 7e en 2018) devancée, notamment, par les Emirats-arabes unis, le Qatar, l’Arabie saoudite, Oman et la Jordanie.
D’après Mme Mehouachi, «la Tunisie est sur une courbe ascendante depuis 2016, date à partir de laquelle elle a adopté un certain nombre de lois anti-corruption (loi sur l’accès à l’information, loi sur la protection des dénonciateurs et loi sur l’enrichissement illicite). Le score enregistré durant les 4 dernières années n’a pas considérablement évolué, et ce, malgré les progrès enregistrés dans la législation de la lutte contre la corruption à travers les lois récentes pour protéger les dénonciateurs et améliorer l’accès à l’information, associés à un renforcement de la responsabilité sociale de la société civile».
Et d’ajouter : «La guerre annoncée contre la corruption a permis à la Tunisie d’améliorer son classement et lui a attribué beaucoup d’acquis, mais elle a, toutefois, généré un manque de confiance des citoyens envers le gouvernement, d’une part, et entre acteurs politiques, d’autre part».
Facteurs
Le rapport indique que plusieurs facteurs se sont réunis pour développer le fléau de la corruption et donner lieu au contournement de la loi. Ainsi, «dans le domaine légal,beaucoup de lois sont obsolètes et d’autres sont inefficaces ou mêmes inexistantes. A titre d’exemple, les lois organisant l’économie sont trop complexes et souvent d’un temps révolu, ce qui pousse les acteurs économiques à les détourner». Le rapport cite, également, les multiples et complexes barrières, ayant encouragé l’évasion et le contournement de la loi et les autorisations d’importations requises par le ministère du Commerce.
Au niveau législatif, l’application continue de certains textes de loi qui datent de la période post indépendance ou, même, de la période coloniale est sujet de polémique. «Ces lois, qui gèrent certains secteurs, sont dépassées et favorisent la mauvaise gestion des fonds et des ressources publiques, ce qui peut être identifié de corruption légalisée. Le décret de 1948 qui autorise l’exploitation des sites pétroliers découverts sans licence supplémentaire et le décret de 1949 permettant d’exploiter les domaines salins tunisiens contre le payement d’une redevance calculée au prix le plus bas du barème général pour l’exploitation des terres de l’Etat tunisien, en sont l’exemple». A ceux-ci s’ajoute la circulaire de la BCT du 30/7/2018 qui concerne les procédures et les conditions nécessaires d’obtention d’autorisation pour ouvrir un bureau de change. «Ce texte ne permet pas de contourner le phénomène de change dans le marché noir qui prolifère dans le pays, vu que les conditions requises ne peuvent pas être acceptées et respectées, surtout dans les régions où les bureaux de change clandestins sont très nombreux». Faut-il rappeler que le volume de devises circulant dans l’informel dépasse les 3 milliards de dinars. De ce fait, «autoriser les Tunisiens à ouvrir des comptes bancaires en devises peut contribuer à résoudre ce problème, surtout que cette interdiction ne peut que favoriser le contournement de la loi, vu que les demandes de transfert des devises pour les hommes d’affaires par exemple peuvent aller jusqu’à 6 mois», précise Mme Mehouachi. Pour conclure, l’experte appelle la Tunisie, à fournir davantage d’effort en matière de lutte contre ce fléau, en mettant toutes ses ressources à la disposition des organes de contrôle et d’institutions démocratiques afin d’améliorer son classement et, par la même, son image dans le monde.