Pour la première fois de son histoire, la Tunisie se retrouve sans ministre de la Culture qui est gérée par intérim. Cela ne passe pas inaperçu, certes, mais c’est surtout un énième message comme celui de la nomination de Walid Zidi pour ceux qui n’ont pas encore compris… Herman Goering, le ministre allemand sous le 3e Reich, disait : «Quand j’entends le mot culture, je sors mon revolver !»
Mardi dernier, les artistes tunisiens se sont rassemblés devant le ministère des Affaires culturelles à La Kasbah pour protester contre la marginalisation de la culture et pour faire valoir leur droit au travail et à une vie digne de leurs talents.
Il était temps, même si cette manifestation aurait pu avoir un peu plus tôt de manière à faire entendre leurs voix avant que le couperet ne tombe. De toutes les façons, un signe a été donné avec le nouveau gouvernement et c’est le Président de la République lui-même qui a carrément imposé un ministre de la Culture qui (aujourd’hui on peut l’affirmer) n’avait ni les compétences, ni la manière, ni le discours pour être à la tête de ce ministère. D’aucuns ont vu dans le fait qu’il soit malvoyant est quelque chose de très symbolique pour la culture. Moins de visibilité pour la culture ? Mettre la culture dans le noir ? Enfin, on peut y lire plusieurs signes, mais cette lecture est juste car voici le résultat : des artistes dans la précarité et tout le patrimoine culturel est en passe d’être dilué… Le champ est libre de toutes les façons… aucun politicien n’avait, depuis le 14 janvier 2011, un volet culturel dans son programme… Et rares parmi eux ont eu affaire au fait culturel dans leur vie. Et pourtant, ce n’est pas le talent ou le brio des politiciens qui véhicule l’image de la Tunisie à l’étranger, mais c’est plutôt son cinéma, son théâtre et sa musique, ses artistes talentueux qui sont partis de rien… Les régimes qui se sont succédé en Tunisie, malgré leur autoritarisme, ont su exploiter ce patrimoine culturel et le talent des artistes tunisiens. Aujourd’hui, les vents ont tourné… Et par le plus grand paradoxe du monde, les vents de la liberté d’expression et de la démocratie ont infirmé la culture…
Il faut laisser les artistes travailler et vivre dignes, certes, mais la question qui se pose aujourd’hui à chaud est : quel avenir pour la Culture en Tunisie ? Lors du dernier Conseil ministériel qui a pris les mesures de prévention, le ministère de la Culture n’a même pas été représenté. Il faut vous le dire comment…?