La grande Nâama s’en est allée, dimanche, après une longue maladie et le poids des années. Pour lui rendre un ultime hommage, la Cité de la culture fut sa dernière escale avant qu’elle ne rejoigne sa terre natale, le petit village d’Azmour.
A 10h00, la dépouille de Nâama était là, venue tout droit de l’hôpital militaire, où elle a rendu son dernier souffle. Et ils étaient peu nombreux à venir lui faire leurs adieux, ses collègues, ceux qui l’aimaient, ceux pour qui elle résumait une longue et riche page de l’histoire de la chanson tunisienne. Parmi les présents, nous avons pu rencontrer Lotfi Bouchnaq, Najet Attia, Mohsen Raïes, Nour Chiba, Soulef, Nawel Ghachem, Saber Rebaï, Hichem Nagati et d’autres qui se sont retrouvés dans ce froid et impersonnel hall de la Cité de la culture. Absence de repères, absence de cérémonial, ces artistes ne savaient pas où se mettre. Le cercueil contenant la dépouille de celle qui, par son charme, a envoûté les âmes de plus de cinq générations, se trouvait au centre du hall sur une simple estrade, une gerbe de fleurs et son portrait tout sourire sur un chevalet. Tout autour, protocole, sécurité et presse s’agitaient, on essaye de se placer au bon endroit et se préparer à l’arrivée du chef du gouvernement, Hichem Méchichi, attendu pour lui rendre un dernier hommage au nom de la Tunisie.
La dépouille reste là, du Coran se faisait entendre de loin, comme un bruit de fond. Le brouhaha est pesant. Elle, Nâama, au milieu de ce monde agité, tel un accessoire ou un décor et en attendant l’arrivée des officiels, on apporte les derniers ajustements au pupitre et au micro. Les minutes passent lourdes, la gêne se fait sentir, l’attente sème un malaise…pas de chaises prévues pour ces artistes âgés venus, défiant le coronavirus, dire adieu à la belle Naâma, certains se sont adossés contre le mur, d’autres ont quitté les lieux après un dernier recueillement et une lecture de La Fatiha… après tout, ils sont venus pour elle et rien de plus.
L’arrivée du chef du gouvernement, une heure après, apporte un semblant d’ordre, on s’attroupe autour de lui pour suivre son discours. Un discours distant et impersonnel. Il énumère ses collaborateurs, relate le riche répertoire de la défunte, loue ses qualités artistiques et humaines. Quelques minutes après, la dépouille d’un symbole de la Tunisie, belle, libre et festive quitte les lieux pour sa dernière demeure.
Elle méritait mieux notre Naâma nationale, ses collègues espéraient lui dire adieu chez elle, à la Rachidia, qu’ils lui disent à quel point elle compte pour eux…pour nous ….
Nous quittons à notre tour la Cité de la culture, en nous disant qu’après tout, Nâama est immortelle, que son image est éternelle, que ses paroles et ses chansons résonneront pour toujours…que nous retiendrons les multiples hommages qu’elle a reçus de son vivant avec ses chansons dans nos radios, les émissions qui lui ont été consacrées qui perpétueront sa mémoire pour les générations futures.
Adieu Nâama ! Repose en paix !
crédit photo : © Koutheir KHANCHOUCH