«Le théâtre-monde que nous construisons a été fragilisé encore plus par la pandémie, mais la volonté de continuer à construire au-delà de tout est vive et persistante».
Dernièrement, l’association l’Art Rue a organisé une séance de projection en ligne du film «Lettres du continent» des studios Kabako, réalisé par Virginie Dupray et Faustin Linyekula. Le long-métrage rapporte les 21 lettres filmées de danseurs et collectifs sur tout le continent africain qui témoignent de leurs contextes et réalités en temps pandémique.
«Nous avons réfléchi à une manière d’accompagner des artistes de toute l’Afrique. 21 artistes et collectifs ont été sollicités pour réaliser des lettres filmées à partir de leurs contextes, de leurs réalités et ce sont ces lettres que Faustin et Virginie ont transformées en film», explique Jan Goossens en introduction à la projection et d’ajouter: «Ces 21 lettres témoignent de la crise de la Covid qui s’ajoute à différentes crises présentes depuis longtemps dans certains pays mais qui, dans la plupart des cas, se transforment en opportunité et en désir d’aller au-delà, de créer… Ce film nous permet de faire la connaissance de ces artistes mais encore plus de découvrir leur force créatrice, leur force de vie. Ils nous invitent tous avec force et beauté à regarder plus loin et à inventer ensemble le monde de demain.»
Écrites en mai-juin 2020, depuis leurs villes d’origine, entre autres Tunis, Dakar, Lagos, Moroni, Maputo ou Kinshasa ou de leurs villes de résidence, Montpellier, Belfort ou le Caire. Ces lettres performances, mises en scène et chorégraphies nous plongent dans leurs réalités respectives, leurs quotidiens au temps du vil virus, leurs inquiétudes et leurs espoirs, leurs combats au quotidien…Tous ont décidé de continuer à créer pour résister. Créer contre vents et marées, avec les moyens du bord, créer à partir de rien… Confinés, ils ont continué à danser dans leurs intérieurs, à produire à distance, ils sauront quoi faire de cette matière après… Pour certains, cette crise s’ajoute à tant d’autres déjà présentes depuis très longtemps, ils ont appris à vivre avec, à créer pour les dépasser…
«Il faut sortir pour manger mais je suis bloqué. Je ne peux plus présenter mon travail, je ne peux plus voyager pour danser mais je continue à travailler chez moi, le seul espace libre qui me reste. Je dois danser…», écrit en danse Didier Ediho depuis Kinshassa. De la même ville, «le collectif D’art D’art questionne l’importance et la nécessité de l’acte de création après une telle catastrophe. Ils abordent la question de la mobilité de l’art, les nouvelles frontières qui s’ajoutent à celles déjà présentes… «Le théâtre-monde que nous construisons a été fragilisé encore plus par la pandémie mais la volonté de continuer à construire au-delà de tout est vive et persistante», clament-ils.
Depuis Montpellier, le danseur tunisien Hamdi Dridi affirme que cette crise lui a permis de revenir aux sources, de tout arrêter, de se mettre en pause, prendre du recul et prendre conscience de son environnement, de ce qui l’entoure…