Accueil Economie Tawfik Jelassi – Ancien ministre des Technologies: «Oser la transformation par le digital pour ne pas disparaître»

Tawfik Jelassi – Ancien ministre des Technologies: «Oser la transformation par le digital pour ne pas disparaître»

Selon les résultats des recherches menées sur la transformation digitale par l’ancien ministre des Technologies Tawfik Jelassi, les secteurs des médias et divertissements sont les domaines les plus impactés par le digital. Ces études réalisées par l’institution académique suisse Institute for Management Development IMD, en partenariat avec Cisco, ont, également, montré que d’autres secteurs, comme la technologie, la vente au détail, les services financiers et la télécommunication sont, désormais, au cœur du “tourbillon digital”.

Il semble que ce soit une habitude d’amalgamer la transformation digitale à la numérisation. Pourtant, la transformation digitale est un concept profond qui renvoie à l’idée d’un changement ou même un chamboulement de l’écosystème via le digital. Pour l’entreprise, c’est sa raison d’être qui subit  une transformation, généralement plus créatrice de valeur, plus adaptée à l’environnement actuel marqué par l’irruption des technologies.

C’est, en tout cas, la conclusion qu’on peut tirer de la leçon inaugurale en ligne «La transformation digitale : Enjeux et opportunités pour les entreprises» qui a été organisée par la faculté Polytech Intl, et assurée par le professeur en stratégie et management des technologies et ancien ministre des Technologies, Tawfik Jelassi. Commençant le cours avec un aperçu sur les défis auxquels fait face l’entreprise dans cet écosystème en perpétuelle mutation, l’ancien ministre a fait savoir que de nouveaux paradigmes de création de valeur s’imposent désormais dans le monde de l’entreprise. Parmi lesquels, il cite  le développement de l’économie du partage, la désintermédiation de certains acteurs de la chaîne de valeur, l’upérisation croissante des produits, l’émergence de l’entreprise «étendue» et intelligente, notamment grâce à l’Intelligence artificielle et, bien entendu, la Data qui est devenue un levier pour la création de la valeur et l’amélioration de la compétitivité.

Des valeurs boursières qui montent

en flèche 

Pour mieux cerner les nouveaux défis du monde de l’entrepreneuriat et des affaires, Jelassi a mis en relief, à l’aide d’un schéma présentatif, l’évolution de la valeur boursière des plus grands groupes mondiaux. Cette dernière montre qu’en l’espace de 5 ans, l’ordre des choses a entièrement changé: les grandes compagnies, notamment  pétrolières et financières qui occupaient en 2011 les premières places en termes de valeurs boursières, ont été déclassées pour que des  entreprises technologiques comme Apple, Microsoft, Amazon et Facebook, Ali Baba et Samsung occupent les premières places. Quatre entreprises ont fait des records historiques à savoir Apple avec plus de 2000 milliards de dollars, Google, Microsoft et Amazon avec respectivement plus de 1000 milliards de dollars.

«Depuis quatre ans, l’économie mondiale est dirigée par les sociétés digitales qui créent le plus de valeur boursière. Elles dominent le monde et on a du mal à les contrôler», a-t-il commenté. Et d’ajouter que la résistance au changement dont font preuve certaines entreprises, y compris des leaders mondiaux face à la transformation digitale, ne fait que menacer leur existence. «On ne peut pas aller à contre-courant, une douzaine d’entreprises qui étaient des leaders mondiaux, n’existent plus aujourd’hui. Il faut chercher les opportunités et oser la transformation par le digital, sinon on risque de disparaître», précise-t-il.

L’ancien ministre a expliqué, qu’aujourd’hui, la technologie ne consiste pas uniquement en un recours aux IT pour réussir l’implémentation des stratégies conçues par la direction de l’entreprise mais il s’agit, plutôt,  d’une transformation du modèle d’affaires, des relations entre clients et fournisseurs, etc. via les technologies pour créer de la valeur. “La transformation digitale c’est comme les 3 étages d’une fusée, au bas de l’étage il y a la numérisation des données, ensuite il y a la digitalisation du processus et le troisième étage c’est la transformation du modèle business et la relation avec l’écosystème”, a-t-il détaillé.

Quels sont les secteurs qui

sont au cœur du tourbillon digital? 

Lors de sa présentation, l’ancien ministre, Tawfik Jelassi, évoque le “tourbillon digital” en se référant à la transformation digitale. Ainsi, aucune entreprise n’est immunisée contre l’impact du tourbillon, a-t-il affirmé. Et d’indiquer que les recherches qu’il a menées dans le centre IMD, en partenariat avec le Cisco auprès de 2000 entreprises pour étudier l’impact de la transformation digitale sur divers secteurs, ont révélé qu’il existe trois clusters, groupes de secteurs répertoriés selon l’ampleur des répercussions  du tourbillon digital sur leurs activités.

Le premier cluster comporte les médias et divertissements suivis par la technologie, la vente au détail, les services financiers et la télécommunication. A cet égard, il a précisé: «Le journal papier vous donne les informations d’hier. Qui l’achète? Les informations instantanées ne se trouvent que dans les médias électroniques. Pareil pour le divertissement, qui va louer des CD ou des DVD pour regarder des films? Il y a Netflix et Spotify. Avec Whatsap et Skype, les gens communiquent en audiovisuel. Avant, les recettes les plus importantes pour les opérateurs téléphoniques provenaient des appels internationaux et des SMS. Les opérateurs doivent changer de Business model sinon il y a un danger qui les guette. La technologie, elle aussi, a subi des changements : on n’est plus dans le package software mais on est plutôt dans le cloud base computing service SAS (Softwar As Service)», a-t-il noté.

Le deuxième cluster inclut les secteurs suivants: l’éducation, les produits à grande consommation, l’hôtellerie qui sont un peu moins impactés par rapport à ceux du premier groupe. Tandis que le troisième cluster comporte les secteurs où l’impact du digital commence à se faire sentir mais reste encore timide, à savoir le transport, l’immobilier, la santé pharmaceutique et l’énergie. “Si on pense que ça va prendre du temps pour que les secteurs du troisième cluster subissent le même impact que ceux du premier groupe, on se trompe. L’évolution n’est pas linéaire, séquentielle mais elle est dynamique. Il n’y a pas longtemps, des secteurs comme le taxi n’apparaissaient pas dans le radar. Aujourd’hui ils sont au centre du tourbillon digital”, a-t-il commenté.

Les exemples édifiants de Safaricom

et la compagnie marocaine OCP

Pour illustrer le processus de création de valeur à travers le digital, Jelassi a, tout d’abord, défini trois types de valeur, en l’occurrence le produit à moindre coût ou le service gratuit, l’expérience client qui doit être, dans ce sens, différente et enfin, la valeur plateforme qui consiste à mettre en relation des membres du réseau qui vont eux créer la valeur. Il a cité deux exemples d’illustration de changement du Business Model effectué par deux entreprises.

La première est l’opérateur téléphonique historique du Kenya, Safaricom, tandis que la deuxième n’est que la compagnie de gestion de phosphate marocaine, le groupe OCP. Il a expliqué comment l’opérateur a créé un service financier M-PESA qui était le tremplin vers l’inclusion financière des Kényans dont la population non bancarisée est passée de 80% en 2009 à 18% en 2016. «M-PESA est plus qu’une banque, elle permet de faire des transferts entre personnes, des transactions internationales, gérer des comptes courants épargnes… etc.», a expliqué le professeur.

Quant à la compagnie marocaine OCP, l’ancien ministre des Technologies a dévoilé que la société est en train de développer un nouveau produit, en l’occurrence des engrais personnalisés pour chaque ferme. Il a fait savoir que cette innovation a été lancée suite à la volonté de la direction de la compagnie d’impulser un nouveau souffle à son modèle économique (même si le Maroc est le premier producteur et exportateur de phosphate et s’accapare environ 80% des réserves mondiales). Ce nouveau produit est principalement basé sur les Data puisqu’il est conçu d’une manière adaptée aux caractéristiques  intrinsèques de la ferme (type de la terre, la culture, le climat, etc.).

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