En 2019 à Washington, la Tunisie avait remporté le prix du meilleur rapport sur la traite des personnes dans le monde. Et bien que notre pays ait été parmi les premiers dans son environnement immédiat à avoir créé une instance de lutte contre la traite des personnes, on n’arrive pas à contourner ce danger bien réel. Il y a des hauts et des bas, avec un bilan jugé souvent mitigé.
Une hirondelle ne fait pas le printemps. Cela dit, une seule main ne peut guère applaudir ! Soit, la coaction est toujours de mise pour parvenir à faire face à ce phénomène transnational. D’autant que la loi l’interdisant ne suffit pas à elle seule. Et encore moins les données statistiques, aussi imprécises soient-elles, ne reflètent pas la réalité. Etat des lieux indéchiffrable, en quelque sorte. Ceci semble évident, dans la mesure où les réseaux mafieux ne sont pas identifiables. De même pour leurs victimes qui, faute d’une stratégie de veille et de prévention, ont du mal à recouvrer leurs droits et trouver ainsi leur liberté. Sous nos cieux, il n’est pas aussi facile de combattre un tel trafic d’êtres humains. Lui déclarer la guerre relève encore du parcours du combattant. Que faire ? Certes, il n’y a pas une seule approche de traitement, d’autant que la solution ne peut qu’être globale et multiforme.
Vers une plateforme de formation
Et ce n’est donc pas un hasard si le budget annuel alloué à l’Instance nationale de lutte contre la traite des personnes (Inltp) demeure assez limité. Au point qu’elle œuvre, le plus souvent, avec les moyens du bord. Sa présidente, Mme Raoudha Laâbidi, magistrate, n’a pas cessé de crier fort, attirant l’attention sur ce manque de ressources. Car, l’argent est le nerf de la guerre, dit-on. De même pour la formation et la coopération dans ce domaine. Tout récemment, lors d’une visioconférence tenue par le Conseil de l’Europe sur «la consolidation de l’action interrégionale dans les pays du sud de la Méditerranée», les participants venant de Jordanie, du Maroc, du Liban et de Tunisie ont mis en avant l’apport de la coopération et l’échange d’informations et d’expertises à ce niveau. Soit une stratégie régionale commune en vue de lutter contre les réseaux du crime organisé. Pour ce faire, l’Inltp a appelé, de son côté, à la création d’une plateforme régionale pour la formation et la formation des formateurs. Un centre régional à Tunis va s’occuper de ce qui a été envisagé et convenu.
780 cas signalés
La société civile nationale sera aussi de la partie. Elle aura à prendre en charge les victimes de la traite des personnes, la collaboration avec ses pairs, la coordination des efforts des instances judiciaires dans la région et le suivi des programmes d’appui aux compétences élaborés dans les pays concernés. Membre de l’Inltp, Malek Khaldi, s’est félicitée de voir son instance franchir un tel pas sur la bonne voie. D’ailleurs, le prix qui lui a été décerné en juin 2019 à Washington a été, alors, une fierté. «Une récompense pour les efforts qu’elle déploie depuis sa création en 2016, en vertu d’une loi l’organisant», ajoute-t-il. Mais, quatre ans d’activité n’ont pas pu, semble-t-il, maîtriser la situation. Une chose est sûre: le trafic des êtres humains est étroitement lié au terrorisme et aux affres de la migration non organisée. L’on peut dire, ici, que pas mal d’Africains en ont été la cible. Rapport 2019 à l’appui, le nombre de victimes en Tunisie s’était élevé, en 2018, à quelque 780 cas. Un bilan qui n’est pas du tout rassurant. D’où, il y aura encore du pain sur la planche.