Par Donald Blome *
Les États-Unis et la Tunisie ont un partenariat de longue date, fondé sur des intérêts communs et, surtout, sur des valeurs partagées. Il y a dix ans, les Tunisiens se sont battus pour la liberté, la démocratie et la dignité de chaque individu. Depuis, les États-Unis et la Tunisie n’ont cessé de travailler ensemble au sein d’une communauté mondiale de nations engagées pour la défense de ces idéaux et déterminées à relever les défis uniques que présente notre monde en mutation pour y parvenir.
L’un de ces défis est l’avancée fulgurante de la technologie, dans la télécommunication, l’intelligence artificielle et bien d’autres domaines. La Tunisie, riche en capital humain, est bien placée pour bénéficier de la transformation technologique rapide de l’économie mondiale. Pour les sociétés attachées à la liberté et à l’ouverture, le défi consiste à faire en sorte que cette nouvelle technologie favorise le progrès économique, tout en protégeant les droits et la vie privée des citoyens.
La technologie de télécommunication sans-fil de cinquième génération (5G) est un secteur de développement prometteur qui constituera le fondement du progrès économique et des services publics du futur. Des véhicules autonomes aux télé-chirurgies en passant par des réseaux électriques plus efficaces, cette nouvelle technologie de communication accélérera considérablement la vitesse à laquelle nous pouvons entreprendre une multitude de tâches, offrant ainsi la possibilité d’améliorer nos vies à tous.
Cependant, la 5G peut également entraîner des risques considérables en matière de protection des données personnelles et de sécurité. En effet, les fournisseurs de télécommunication peu fiables sont en mesure d’utiliser des «backdoors» et des «interrupteurs d’arrêt» sur leurs équipements pour siphonner et collecter des données à l’insu des utilisateurs. Aucun pays ne devrait confier ses réseaux à des entreprises redevables à des gouvernements autoritaires. Huawei, à titre d’exemple, est soumise à la loi chinoise relative au renseignement national, ce qui signifie qu’elle doit remettre toute donnée au gouvernement du Parti communiste chinois sur demande. Huawei a été inculpée par les tribunaux fédéraux américains et encourt des poursuites pénales aux États-Unis pour fraude, racket et conspiration pour vol de secrets commerciaux à des entreprises basées aux États-Unis.
La conclusion des États-Unis et d’un nombre croissant d’experts techniques de par le monde est que les risques associés à la mise en service des télécommunications sur des réseaux 5G utilisant des équipements fournis par des entreprises qui dépendent d’États autoritaires ne peuvent être atténués. En effet, et compte tenu de la façon dont les réseaux 5G fonctionnent, aucun élément d’un réseau 5G ne pourra être jugé sûr en présence d’équipements non fiables.
Les États-Unis appellent les pays, y compris la Tunisie, à prendre des mesures dès maintenant pour garantir la sécurité de leurs futurs réseaux 5G. Nous sommes donc fiers de voir que suite aux récentes annonces provenant de l’Europe, plus de 50 pays (représentant près des deux tiers du PIB mondial) ont désormais intégré le réseau Clean Network (Réseau propre) qui regroupe des pays et des entreprises s’engageant à n’utiliser que des équipements provenant de fournisseurs de confiance pour leurs infrastructures 5G. Le réseau comprend désormais 26 des 27 États membres de l’Union européenne.
Ces partenaires ont bien compris que des outils liés à un Etat policier n’ont pas de place dans leurs réseaux, qu’il s’agisse d’équipements de télécommunication (y compris les câbles sous-marins), de systèmes de «Cloud Computing» ou d’applications mobiles.
Tout fournisseur de technologie 5G doit bénéficier d’une confiance solide et durable auprès des Tunisiens, car l’intégrité des systèmes de communication est un préalable essentiel pour la sécurité nationale d’un pays, la protection des droits de l’homme, la propriété intellectuelle ainsi que pour la protection des données personnelles de ses citoyens. Nous espérons que le gouvernement tunisien, les entreprises et les citoyens tunisiens comprendront parfaitement les risques liés à l’utilisation d’équipements provenant de fournisseurs non fiables. En effet, il existe de nombreuses options pour des solutions 5G de bout en bout qui sont capables de fournir de solides garanties de sécurité. Dès lors, un pays maximisera son attrait pour les investisseurs et la sécurité de ses citoyens en choisissant l’une de ces options de confiance.
Sur le plan économique, et compte tenu de la nécessité pour la Tunisie d’être avisée de ses investissements en capitaux, nous comprenons que le coût constitue un élément important dans les dépenses liées aux infrastructures. Cependant, lorsqu’il s’agit d’équipements provenant de fournisseurs peu fiables, il est essentiel de souligner qu’un prix initial d’acquisition plus bas pourrait cacher des coûts de cycle de vie beaucoup plus importants. D’autant plus qu’il est difficile d’estimer le coût de la lutte contre les vulnérabilités en matière de sécurité qui pourraient mettre en danger les objectifs économiques et démocratiques de la société tunisienne.
Nous espérons que les Tunisiens pourront profiter pleinement de tous les avantages de la technologie 5G sans avoir à se préoccuper de savoir qui peut accéder à leurs informations personnelles. En rejoignant le Réseau propre et en s’engageant à maintenir les fournisseurs non fiables hors des infrastructures commerciales et gouvernementales de la 5G, nous favoriserons non seulement notre sécurité collective, mais nous préserverons également les droits et les libertés que les Tunisiens défendent depuis 2011.
(*) Ambassadeur des Etats-Unis d’Amérique en Tunisie
