On continue avec les services publics jugés insatisfaisants, de l’avis d’une grande majorité des Tunisiens. Et même si le scandale des déchets en provenance d’Italie n’a pas de relation directe avec ce qu’on va traiter, il est évident que le fonctionnement de l’appareil administratif public requiert une réforme en profondeur. Pour comprendre pourquoi on a des services publics lamentables à tous les niveaux, on doit alors chercher en grande partie auprès des marchés publics. C’est le dossier qui reste le maillon le plus faible dans la chaîne de valeur étatique. C’est à partir de cet outil que le budget de l’Etat (titres 1 et 2) est mis en application, essentiellement à travers les appels d’offres. Depuis 2014, un nouveau décret censé être plus souple et plus efficace (il l’est sur le papier, c’est sûr) n’a pas réussi à apporter la dose de facilité et de « rentabilité » espérée. Du dépouillement à la résolution des litiges, en passant par le suivi, l’octroi, etc, c’est un décret encore incompris et inexploité, avec une application encore frustrante d’anciennes règles dépassées. Résultat, des marchés publics mal affectés, mal gérés et mal suivis avec des soupçons de corruption ou de mauvaise lecture des textes. C’est ce qui explique, entre autres, les délais tardifs dus à la pénurie des ressources humaines qui traitent les dossiers des marchés dans les entreprises publiques et les ministères. De plus, il y a encore ce manque de formation des cadres dans ce nouveau décret, ce qui fait perdre beaucoup de temps et rater des opportunités.
Du côté des sociétés candidates ou bénéficiaires de ces marchés, il y a aussi un manque flagrant d’informations de ce décret de 2014. Sans oublier des dépassements en tous genres hérités depuis des années. Et une fois les marchés octroyés, le malaise perdure : l’application du cahier des charges reste incomplète et les erreurs et défaillances non corrigées. Et au bout du compte, des services ne respectant pas les normes et des deniers publics dilapidés.
L’élaboration du cahier des charges est, à notre avis, le point où on doit oser changer. Ce sont des cahiers qui privilégient les économies de coûts ( moins disant) aux dépens de la qualité ( mieux disant). Ce qui explique la médiocrité du service ou du produit final et que le contribuable paye de sa propre poche. Et pour terminer, le contrôle est aussi un point défaillant avec des commissions de marché qui se trouvent contraintes d’arrêter la procédure en décelant des insuffisances antérieures qui génèrent des pertes de temps. Les structures de contrôle public ont beau établir des rapports sur les dépassements de maints projets et marchés, rien ne se fait après. L’impunité que l’on voit encourage tout le monde à bafouer les règles ou à dilapider l’argent public, sachant que les sanctions n’arriveront jamais. Une manne pour certains, un cauchemar pour le citoyen, un fardeau pour l’Etat. La digitalisation ? Une voie de réforme précieuse à encourager.