Gilbert Naccache ou Papi pour les intimes et les amis, écrivain et activiste politique de gauche, est décédé hier, a fait savoir sa famille. Victime d’un accident vasculaire cérébral en 2002, il s’est battu contre la maladie jusqu’au bout. Né le 15 janvier 1939 à Tunis, Gilbert Naccache a fait ses études à l’Institut national agricole de Paris avant de retourner à Tunis pour entamer sa carrière politique.
Il a rejoint le mouvement «Perspectives», qui a été créé en 1963 à Paris et il a été condamné à 14 ans de prison en 1968 mais il a été libéré en 1979, après 11 ans. Marxiste, Gilbert Naccache est réputé être hostile au mouvement sioniste qu’il considère comme raciste et colonialiste. Après plusieurs années en exil, il est revenu en Tunisie après la révolution et il a été entendu comme témoin par l’Instance vérité et dignité.
Dans un faire-part, son fils Slim Naccache a écrit : « Gilbert Naccache a porté sur ses épaules une charge inhumaine parce qu’il avait le sens des responsabilités, parce qu’il espérait laisser un monde meilleur, un peu meilleur en partant qu’en arrivant ». Et de poursuivre que « Gilbert Naccache n’a jamais cédé à la haine. Il ne voulait pas haïr ses tortionnaires, il ne voulait pas haïr Bourguiba et il ne voulait pas haïr ses ennemis ».
« Si vous vous demandez ce qui a tué mon père, je répondrai une phrase que je tire d’un livre qui m’a marqué étant enfant : Il y a deux réponses, celle du poète et celle du savant.
Le savant vous dira que mon père est mort en raison des vaisseaux fragilisés de son cerveau qui ont causé une hémorragie cérébrale dans la zone opposée à celle de son accident vasculaire cérébral de 2002.
Le poète vous dira que mon père est mort des années de torture et de déshumanisation dans les prisons d’un régime qui ne savait exister que par la brutalité, qu’il est mort de l’antisémitisme, qu’il est mort d’avoir mené une bataille ininterrompue contre les forces de la bêtise, de l’ignorance et de la violence. Qu’il est mort d’avoir voulu mener cette bataille avec didactisme et bienveillance », explique le fils de Gilbert.
Pour lui, s’il y a une leçon à tirer de la vie de son père, « c’est qu’il ne faut jamais tourner le dos à ses responsabilités, qu’il faut persévérer et ne pas céder aux pulsions faciles de haine. Mais que, contrairement à lui, il faut savoir se reposer ».
Auteur prolifique, parmi ses principaux ouvrages, Cristal, Le Ciel est par-dessus le toit, Qu’as-tu fait de ta jeunesse ?, Vers la démocratie ?, Le Manchot et autres nouvelles.
Dans un faire-part, le Président de la République, Kaïs Saïed, a salué la mémoire de l’un des militants tunisiens les plus sincères qui croyait aux principes de libération et de justice et s’est battu pour eux jusqu’au dernier souffle.
«La Tunisie a perdu avec la mort de Gilbert Naccache l’un de ceux qui ont persévéré, malgré les affres des prisons dans lesquelles ils ont passé de nombreuses années de leur jeunesse et malgré les menottes qui ont ensanglanté leurs mains, mais qui n’ont jamais failli à leur détermination, volonté et loyauté», souligne un communiqué de la Présidence.
L’histoire le retiendra en Tunisie et dans le monde comme symbole de libération nationale et l’un des symboles de la libération de toute l’humanité.
Le Président de la République a chargé l’ambassadeur de Tunisie à Paris de faciliter le rapatriement de sa dépouille en Tunisie, où il sera inhumé conformément à sa dernière volonté.