«En flagrant délit de solitude» est le premier recueil de nouvelles de notre consœur Neila Gharbi, qui consacre, à travers des histoires fictives, des personnages marginalisés dans la société tunisienne.
Paru récemment, « En flagrant délit de solitude », nouvelles de 110 pages publiées à compte d’auteur, narre l’histoire de personnages anonymes. Des personnages qui ont ressurgi un jour des souvenirs d’enfance de l’auteur. Des personnages à la vie quelconque, terne, souvent relégués au ban de la société parce qu’ils n’ont pas spécialement un statut particulier. Ce sont tout simplement des marginaux.
L’auteur a essayé d’esquisser le portrait de ces personnages : hommes et femmes, d’inventer une histoire qui correspond au profil de chacun d’eux, de leur donner une nouvelle existence, pas forcément heureuse, pas forcément triste non plus. L’auteur les a réinventés et leur a insufflé une vie imaginaire forcément plus attractive.
Ils sont surpris en flagrant délit de solitude, fuyant ainsi leur destinée, débarquant dans un univers littéraire propice à toutes sortes de lecture et d’interprétation. Puisées dans la mémoire recomposée, ces histoires parfois farfelues représentent un vécu baigné dans un brouillard que l’auteur a tenté de démasquer, tout en préservant l’unité de lieu et de temps.
Margherita, Narjess, Camélia, Blanchette, Hiba, Morched, Farzit et d’autres ont tous les mêmes points communs. Ils partagent le même amour pour les animaux : chat, chien, papillon, oiseau, singe accompagnent, chacun d’eux, leur vie monotone et s’imposent comme de véritables acteurs de leur quotidien. Le véritable ami de l’homme n’est-il pas l’animal qui apporte réconfort et chaleur à sa vie ?
Rebelles par définition, les personnages décrits dans ces nouvelles échappent à tout formalisme. Ils sont dans un monde de désir d’être et non dans une réalité régie par un système ordonné. Ils sont dans la marge d’une société qui les proscrit et ne leur attache aucune importance.
Ils existent dans un monde qui ne leur appartient pas et n’ont aucune maîtrise sur lui, à l’image de ces herbes sauvages au bord d’une route qu’on arrache et qui repoussent malgré tout.
L’architecture narrative en compartiment est la spécificité de ces nouvelles. L’auteure emprunte une démarche assez originale dans un va-et-vient entre passé et présent des protagonistes dont il est question. L’écriture est sobre et fluide, à l’instar de ces personnages fugitifs qui finissent par disparaître d’une façon mystérieuse sans laisser de trace derrière eux. L’univers fictif tend à tenir en haleine le lecteur sans le contraindre à aucune exigence particulière, surtout pas morale. Il y a comme une part mystérieuse et magique dans cette œuvre qui contourne les standards de la création littéraire, déployant une vision humaniste assez singulière.
Rendre compte de la condition humaine sans s’enfermer dans une forme littéraire précise semble être le credo de Neila Gharbi, qui cherche à renouveler la structure littéraire en adoptant la concision, invitant ainsi le lecteur à inventer sa propre vision de l’univers que propose l’auteure.