Les métiers de demain font leur apparition aujourd’hui, et il faut bien se préparer en vue d’être fin prêt à l’avenir en étudiant la possibilité de créer des projets de dimension technologique et créative pour ne pas être pris au dépourvu une trentaine d’années plus tard.
Les métiers archaïques n’auront plus droit de cité dans les années à venir, compte tenu de l’évolution technologique qui progresse à un rythme effréné. La rencontre-débat, organisée, récemment, par Ctfci (Chambre tuniso-française de commerce et d’industrie) et l’AFD (Agence française de développement), sur «les métiers de demain » a été une opportunité pour mettre l’accent sur les impératifs d’adapter le système de formation professionnelle en Tunisie aux réels besoins des entreprises, d’opter pour une nouvelle gouvernance des centres de formation et de lancer l’université des métiers, en tant que levier pour former des profils en phase avec les exigences d’un secteur productif en pleine transformation.
En fait, les centres de formation professionnelle doivent se préparer dès maintenant aux nouveaux métiers pour initier les jeunes aux nouvelles technologies et leur apprendre des activités rentables. Ces centres doivent être bien équipés en matériel et outils de formation. Ils ne peuvent pas continuer à travailler avec d’anciennes méthodes qui sont devenues obsolètes depuis des années déjà. Les formateurs ont besoin, eux aussi, d’une réadaptation pour pouvoir être dans le bain et en mesure de transmettre les connaissances à leurs apprenants.
Mise à niveau de la formation
A noter que ladite rencontre a vu la participation de cinq clusters industriels, à savoir le Gitas (groupement des industries tunisiennes aéronautiques et spatiales), TAA (automobile), Elentica (électronique) et Atip (Association tunisienne des industriels en plasturgie), Mécatronique de Sousse et le cluster numérique, GET IT. C’était une occasion pour faire le point sur les actions en cours pour la mise à niveau du système de formation professionnelle, resté longtemps déconnecté des besoins des entreprises, notamment dans le secteur industriel. L’industrie a connu, de nos jours, un progrès impressionnant avec l’introduction de l’intelligence artificielle, la robotique et l’automatisme. Peu d’entreprises ont introduit ces valeurs qui ont fait leur apparition dans le monde et ont révolutionné le monde de l’industrie.
Le directeur adjoint de l’AFD, Bertrand Ficini, est catégorique dans ce sens : «La Tunisie figure parmi les cinq premiers pays à bénéficier de l’appui financier de l’AFD, avec un concours estimé à deux milliards d’euros investis dans de nombreux secteurs dont notamment celui de la formation professionnelle ». Mais a-t-on fait assez pour hisser le niveau de ce secteur et le rendre compétitif pour affronter les nouveaux défis ? L’orateur estime, en tout cas, qu’il est nécessaire d’avoir, aujourd’hui, une nouvelle vision en matière de formation professionnelle afin de mieux répondre aux besoins des entreprises.
La réalité est que le secteur public est extrêmement déconnecté des besoins des entreprises. Il a donc besoin d’un sang neuf qui peut être insufflé par la mise à niveau des centres en s’orientant vers l’industrie 4.0 et en fournissant les équipements nécessaires y afférents. D’ailleurs, l’AFD, indique Ficini, est maintenant engagée dans le processus de soutien de transformation du système pour l’adapter aux besoins des entreprises. Il s’agit de changer de modèle de gouvernance des centres de formation, à l’instar d’autres expériences réussies, en impliquant directement les entreprises et/ou leurs représentants dans le système.
Trois nouveaux projets
De son côté, Wassim Haj Ali, de l’AFD, a fait savoir l’engagement de l’institution de financement publique dans la mise en œuvre de trois nouveaux projets à travers l’utilisation de nouveaux instruments. Il s’agit, en premier lieu, de l’appui à apporter à 16 centres de formation professionnelle pour les accompagner à répondre aux besoins des territoires et des secteurs. Une autre opération non moins importante consiste en le renouvellement de l’approche pédagogique par le biais de la certification de 25 centres de formation professionnelle et l’appel à projet qui sera lancé incessamment pour la modernisation de 7 à 12 instituts supérieurs des études technologiques (Iset).
Enfin, le projet « Elife », promu par la fondation Tunisie pour le développement et soutenu par l’AFD pour favoriser la création de 10 centres techniques dans 10 régions intérieures qui dispenseront un complément de formation dans la spécialité numérique de 6 mois au profit de jeunes diplômés en vue de faciliter leur insertion professionnelle. Il est à noter que d’ores et déjà 2 centres ont été lancés respectivement à Béja et Siliana.
Pour compléter ce dispositif, deux autres projets sont visés par l’AFD, en l’occurrence la création de l’école de la nouvelle chance pour accueillir des jeunes de 18 à 30 ans, sans diplôme ni qualifications afin de faciliter leur insertion dans la vie active. Deux centres pilotes sont envisagés l’un à Sousse et l’autre à Kairouan. Un 2e financement envisagé en collaboration avec l’Etat tunisien se rapportant au lancement d’un centre de formation de l’industrie agroalimentaire à Bizerte, qui est un centre pilote dont la gestion sera confiée à la branche professionnelle.
Les représentants des clusters présents ont évoqué certaines problématiques à l’instar de la faible capacité des centres de formation et leur inadéquation avec les attentes des entreprises. La question de la formation des formateurs a été également soulevée et doit être en phase avec les évolutions des métiers. Le processus de transformation digitale des entreprises accuse, de son côté, au niveau des PME un retard qu’on impute au profil parfois inadapté des nouvelles générations sorties des écoles d’ingénieurs. D’où la nécessité d’introduire la formation par alternance au profit des responsables chargés du management. Dans le contexte actuel, la solution idoine consiste en la création d’une université des métiers. C’est une issue favorable pour répondre aux besoins des entreprises en profils et pour accroître l’attractivité des investissements en Tunisie.